Elle vivait mal sa gloire surgie le jour d'une rencontre bouleversante avec Nadir Mokhnéche, qui l'a hissée sur les arènes célestes du monde artistique. Malgré le succès, la célébrité et le départ définitif du ghetto où nos réalisateurs l'ont confinée pour être l'éternelle ventriloque, Biyouna ne digérait pas tout cela parce qu'au fond, elle savait que pour être un comédien complète, il fallait le prouver aussi par les planches. "Mon rêve c'est de monter sur les planches ". " Personne ne m'a jamais donné l'occasion de le faire. Je ne sais pas ce que c'est mais je sais que j'y arriverais", confiait-elle dans les feux de sa gloire cinématographique amorcée avec, "Le Harem de Madame Hosman " puis, " Viva l'Algirie " de Nadir Mokhnéche. Comme un prophète qui demande à Dieu un avantage, son rêve sera réalisé sur place, chez elle en Algérie, avec Fouzia Ait El Hadj, elle aussi désireuse d'offrir à la Biyouna un autre costume que celui d'une mégère rigolote. C'était en 2004 lorsqu'elle lui confiait un rôle loufoque et humoristique. Rien que çà ! La tirelire de Biyouna étant pleine, elle pouvait aller ailleurs pour s'accomplir définitivement auprès des autres, sans doute plus doués et plus laborieux. Deux années plus tard, et lorsque le jeune metteur en scène français, Philipe Salvario, lui a fait appel pour le rôle du coryphée dans Electre, la Biyouna nous a confié qu'elle était à son aise, et ni Birkin, ni les autres ne la faisaient rougir. " Je sais que je vais les bouffer sur scène " nous a-t-elle martelé alors qu'elle était sur les plateaux de " Delice Paloma " troisième long-métrage de Nadir Mokhnèche. Elle arborait alors le costume d'un coryphée, chef de chœur dans la tragédie antique. Dans cette pièce, Philipe calvario associe un chœur féminin guidé par la voix de la populaire Biyouna, ainsi qu'une musique orientale aux sons enivrants, jouée en direct et composée. Après Coryphée, la Biyouna remet çà ! Du 14 janvier au 1er mars, Biyouna sera visible au Vingtième Théâtre de Ménilmontant à Paris, puis du 13 au 14 mars 2009 au Théâtre des Trois-Vallées, avec "Célestine" signé par le papa Henri Lazarini et sa fille Frédérique.La Célestine, née en 1499 sous la plume de Fernando de Rojas, fut un roman avant de devenir une tragi-comédie. L'œuvre connaîtra de nombreuses versions, et ce personnage hantera la littérature européenne jusqu'à l'époque baroque. De ce texte foisonnant, Henri Lazarini a tiré un spectacle d'une heure trente, très " grand public ", en réduisant l'intrigue à ses éléments essentiels. Calixte, amoureux fou de Mélibée, fait appel, par l'intermédiaire de son valet Semporio, à une mère maquerelle, la Célestine, pour parvenir à ses fins. Les ruses et les manipulations de la Célestine (l'éternel combat du vice contre la vertu !) constituent l'essentiel des péripéties, avant le rendez-vous nocturne dans le jardin de Mélibée. Le texte est fascinant en ce qu'il contient en germe tout un pan de la littérature européenne. Il permet en particulier de mesurer l'influence de ce théâtre espagnol sur le théâtre français, de Molière (on pense à l'entremetteuse de l'Ecole des femmes) aux romantiques. Biyouna est là aussi, confinée dans un rôle piège de la maquerelle, dans lequel elle venait à peine de sortir dans "Delice Paloma " de Nadir Mokhnéche. C'est sûr qu'elle s'en défèrera grâce à ses attributs d'artiste internationale. Par Yasmine Ben