La filière avicole est dans le rouge depuis quelques temps déjà ; elle risque encore gros dans les prochaines années si des mesures nécessaires à son redéploiement ne sont pas prises à temps. La crise qui guette la filière avicole et sa kyrielle de sous-traitants est une arme à double tranchant. D'abord, sur le plan social dans la mesure où 400 000 familles vivent de la volaille. Conséquence économique, ensuite, les producteurs voient leurs caisses s'assécher et leurs bénéfices se volatiliser. Des milliers d'aviculteurs risquent d'abandonner à vie l'activité. La volatilité des prix des produits agricoles met la filière avicole algérienne dans un univers de plus en plus incertain. La crise a frappé la filière dès 2005, et n'a cessé de s'amplifier au fil des ans jusqu'à 2008. Pour certains experts en production animale, le secteur n'a pas tiré toutes les leçons de la crise qui l'a frappé de plein fouet durant trois longues années. Le prix du maïs, intrant essentiel de l'aliment de la volaille, par exemple, a subi une hausse de 72% entre janvier et décembre 2007. Il y a à peine une année, les prix de l'aliment avaient donné des sueurs froides aux aviculteurs. Les premières mesures de soutien prises par l'Etat se sont vite révélées insuffisantes. Premièrement, parce que les aviculteurs produisent à 95% à crédit, et deuxièmement les céréales, gros dévoreurs de l'investissement, sont importées et dépendent d'un marché international volatile. Le choc de 2005 et sa réplique brutale de 2007/2008 étaient d'autant plus graves que la crise est aussi globale. La filière avait lutté miraculeusement pour sa survie. Autrement dit, aujourd'hui il faut une restructuration profonde de tous les intervenants dans la filière. A défaut, 2010 sera tout aussi redoutable que 2005 et 2007. Chez les producteurs, on reconnaît naviguer à vue. Les professionnels de l'élevage insistent sur la nécessité de mettre le cap sur l'incontournable céréaliculture. C'est-à-dire produire localement les céréales et les oléagineuxs pour assurer l'autosuffisance alimentaire de leurs élevages. Les mesures dites "d'urgence" prises par les pouvoirs publics ne sont qu'un traitement symptomatique de la crise. Les prix des intrants rentrant dans la composition de l'aliment de volaille, qui jouent au yo-yo, ont causé un énorme préjudice financier aux producteurs. Une contrainte ruineuse qui rendra salutaire la mise en place d'une véritable politique d'encouragement de la production locale du maïs et du tourteau de soja. Les aviculteurs le savent bien : créer un élevage de poulets de chair équivaut à jouer une partie de poker, tant les aléas entourant cette activité sont imprévisibles. Le groupe public de l'aliment de bétail et d'aviculture (Onab) a baissé de 10% les prix des aliments destinés à l'élevage. Mais pour les experts, un rebond des céréales est envisageable dans les prochains mois. En d'autres termes, le même scénario risque de se reproduire à tout moment tant que la filière dépend entièrement des céréales importées. Le maïs, le blé, voire le soja, pourraient voir leurs cours repartir à la hausse. Conséquences, la baisse annoncée des prix ne peut avoir les résultats escomptés sur les coûts des viandes blanches et de l'oeuf, les opérateurs privés n'ayant pas de visibilité à long terme, voire même à moyen terme, en plus des charges fiscales lourdes dont ils réclament une baisse sans cesse. Résultat : sur les étals, le kg de dinde frôle les 350 DA, le poulet affiche 300 DA le kg, alors que le prix de l'œuf est passé à 12 DA. Du jamais vu ! Dalila B.