Longue procession, fabuleuse cérémonie de louanges à Dieu, l'Unique, dans une ambiance encensée de bkhour et de fumigènes qui partent de la terre pour rejoindre le ciel comme des météores. Le festival du gnaoui va se fêter encore cette année, à Béchar, la contrée de Malika Mokkedem et de Yasmina Khadra. La fête est dédiée à l'Unique et à son prophète Mohamed (QSSSL), évoqué entre deux vers d'un poème de vaudeville.C'est ainsi que la troisième édition du très attendu Festival national de musique et danse gnaouies, se produira du 2 au 7 mai prochain au stade En-nasr de Béchar. Ce rendez- vous sera marqué par une forte participation, a estimé le commissaire du festival, Hocine Zaidi. Les invités pour la plupart des associations locales dont Ahl Diwan de Kenadsa, patrie de l'immense association El Ferda, seront à ce rendez- vous musical dont l'expression est revenue depuis quelques années en force sur la scène nationale et aussi internationale. Perçus il y a quelques années encore comme des " mendiants " ou des amuseurs publics, les gnaoua sont aujourd'hui considérés, à juste titre, comme des artistes à part entière voire des stars que réclament et s'arrachent les scènes nationales et internationales les plus prestigieuses. Libératrice, salvatrice, la musique gnaouie, la musique est un moyen de libérer les âmes. Les ancêtres des gnaouis, qui ont essaimé un peu partout en Algérie et depuis le XVIe siècle au Maghreb, sont venus, dans leur majorité, d'Afrique noire essentiellement par la voie forcée de l'esclavage et avaient, pour subsister, pratiqué des métiers peu rémunérés (forgeron, menuisier, tailleur etc.) et étaient la pluspart du temps tenus en marge de la société. En habiles musiciens, ils sont devenus, au fil des ans, très populaires et les gens faisaient appel à leurs airs et à leurs couleurs pour animer les fêtes de famille et les longues nuits de transe " thérapeutiques ". l'imaginaire populaire et le folklore national se sont enrichis par les percussions qui résonnent encore aux oreilles des ruelles des médinas. En parallèle à ces représentations lyriques qui seront comme dans tout genre de ce rendez- vous, soumises à un jury qui aura à évaluer les troupes participantes, des conférences-débats sur la musique et la danse gnaouies sont également au menu. Les thèmes qui y seront débattus sont entre autres "la transe, désordre extérieur et ordre intérieur" pour une meilleure connaissance scientifique des danses et chorégraphies traditionnelles nationales, notamment le gnaoui. Des chercheurs ainsi que des spécialistes donneront des conférences et débattront autour de cet art populaire qui a traversé des âges en gardant sa jouvence. Le répertoire des gnaouis est composé de chansons, dont plusieurs invoquent les "mlouk" (esprits qui, selon eux, habitent les corps) à se manifester. Au cours d'une "layla", nuit traditionnelle, le rituel comporte trois grandes phases successives : l'aâda (procession), les kouyou (chants, jeux et danses) et les mlouk (lors de la transe).Initié par le ministère de la Culture depuis trois ans à Béchar, considérée comme la capitale de cette expression musicale et chorégraphique séculaire, ce festival verra sans doute une forte participation du public du fait que la fête est populaire et que dans cette région rien ne se passe hormis le fait de déboulonner sur le sable. En raison de son caractère populaire, ce festival attire de plus en plus de chercheurs, de musiciens, de médias et de citoyens de diverses régions du pays. Zaidi souligne que le festival constitue une vraie réponse aux questions relatives à la prise en charge et à la valorisation du patrimoine culturel populaire et traditionnel. "Cette manifestation soutenue par les autorités locales et les élus est un levier du développement culturel et artistique de la région, de même qu'elle constitue un rendez-vous incontournable pour la connaissance d'une expression artistique qui a été jalousement préservée des aléas de l'histoire, par les populations des différentes régions du nord et du sud du pays", précisera-t-il. Rebouh H