Au moment où les pouvoirs publics parlent d'un label qualité pour l'huile d'olive algérienne destinée notamment à la commercialisation à l'étranger, les professionnels , eux, déplorent les conditions de production de l'huile d'olive qui sont , selon leurs propos, très loin des normes de qualité. Il ne s'agit donc pas de mettre en place un label avant même de penser à améliorer les conditions de production. C'est la première des choses à faire. Mais en attendant, la production d'huile d'olive est "otage" des pratiques de fabrication archaïques faisant fi des normes de qualité non sans danger en matière de santé, relèvent les oléiculteurs eux- mêmes. Ils appellent, à cet effet, les pouvoirs publics à intervenir pour contrôler les conditions de production et de commercialisation dans cette filière agricole. Ces pratiques continuent à s'exercer dans toutes les étapes de production "à commencer par l'entretien de l'olivier jusqu'au conditionnement de l'huile d'olive", affirment plusieurs professionnels du secteur. L'attitude rétive des agriculteurs et fabricants artisanaux à adhérer aux normes admises de fabrication ont amené certains investisseurs à se "délocaliser" des zones traditionnelles d'oléiculture pour s'installer même dans le sud du pays.. En effet, l'oléiculture étant un créneau nouveau dans les wilayas du sud "il a été plus facile d'inculquer à la population locale les méthodes modernes et saines de production de l'huile d'olive de qualité", explique à l'APS Ahmed Adjrad, investisseur et ingénieur spécialisé dans les corps gras, qui a décidé de transférer ses activités oléicoles de Bouira, sa ville natale, à Biskra "Les normes de fabrication doivent être scrupuleusement respectées en amont et en aval: tout d'abord, l'olivier doit être bien taillé, suffisamment irrigué et, surtout, procéder à la cueillette en temps opportun", précise-t-il. "Il faut surtout éviter de laisser les olives noircir totalement pour les cueillir, en raison du fort taux d'acidité que cela engendre", selon ce professionnel, regrettant le fait que beaucoup d'agriculteurs continuent à croire que la bonne huile provient des olives restées le plus longtemps à leur arbre. Autre danger relevé: le stockage des olives dans des sacs en plastique pour de longues durées allant jusqu'à plusieurs mois, alors que les normes exigent l'utilisation de sacs aérés tels ceux en jute ou des caisses où la durée de stockage ne doit pas dépasser les 48 heures après la cueillette. Dans la phase transformation, la majorité des huileries font chauffer l'eau à une température de 80° alors qu'elle ne doit pas dépasser les 27°. "Toutes ces pratiques font augmenter le taux d'acidité de l'huile jusqu'à 6°, alors que la norme internationale autorisée par le Conseil oléicole international (COI) doit varier entre 0,8 à 1,5° par 100 grammes". De son côté, Smaïl Saoudi, transformateur et producteur d'huile d'olive fait le même constat et souhaite l'intervention de l'Etat pour exiger des fabricants le respect des normes de qualité. Il reconnaît avoir transformé pour le compte de clients des olives de "très mauvaise qualité": "Je sais que le produit n'est pas de bonne qualité, mais j'ai une huilerie et je dois la faire fonctionner". Ce producteur met en garde également sur le danger non seulement de conditionnement de l'huile d'olive dans les jerricans ou les bouteilles en plastique mais aussi de sa commercialisation dans des espaces non adéquats comme la rue où l'exposition du produit au soleil la rend nocive. Le marché de l'huile d'olive "est noyé par des produits douteux", ce qui fait que l'oléiculture n'est pas porteuse d'un développement durable, juge-t-il tout en regrettant l'absence d'un centre technique qui peut intervenir sur le terrain. L'on s'attend voir se concrétiser sur le terrain ce genre de labos avec l'instauration du label qualité. Dalila B.