La stratégie des fonds souverains s'oriente de plus en plus vers des investissements financiers, la participation au capital d'entreprises occidentales voire leur prise de contrôle. Cependant face à ces fonds souverains, les Etats-Unis ont adopté une législation visant à empêcher ces fonds de contrôler des secteurs affectant leur sécurité nationale. En Allemagne, en France et aussi en Grande-Bretagne, on envisage de telles mesures de défense. Autrement dit, tous les Etats se préparent d'ores et déjà à faire face à ce genre de fonds. Ainsi, pour le cas de l'Algérie, quelle serait donc la politique de gestion de ses réserves de change face aux fonds souverains ? Tel est la question posée par le docteur Abderrahmane Mebtoul, Professeur d'Université et économiste, dans une contribution adressée hier à notre rédaction. L'expert rappellera que les réserves de change sont estimées à plus de 144 milliards de dollars fin juin 2009, qui sont affectées sous forme de placements en bons du Trésor américains et dans certaines banques internationales bien cotées dites AAA. L'expert international estime, toutefois, que l'Algérie doit être prudente dans toute sa politique de gestion. Or, selon M. Mebtoul, pour une gestion efficace des fonds souverains, celle-ci doit reposer sur cinq facteurs, tenant compte du processus de mondialisation, de notre place au sein des différentes stratégies économiques et géopolitiques. Premièrement une bonne gouvernance interne (solidité et moralité des institutions), ce qui est loin d'être le cas en Algérie. Mebtoul, dira dans ce contexte, qu'il faut d'abord répondre à une question stratégique : que voulons-nous et où allons-nous par rapport aux réformes car la rentabilité des fonds souverains s'inscrit dans le cadre d'un marché mondial concurrentiel et dans le cadre d'une économie administrée et de surcroît bureaucratisée à l'extrême comme en Algérie ? Deuxièmement, souligne-t-il encore, la gestion des ressources humaines par la revalorisation du savoir, dont une spécialisation très fine dans l'ingénierie financière et le management stratégique qui nécessitent un minimum de 10 ans d'expérience. Troisièmement, avoir à la fois un système financier national performant (ce qui est loin d'être le cas avec des banques qui sont des guichets administratifs et une bourse en léthargie), regrette-t-il. Aussi, suggère-t-il de mettre en place une surface financière appréciable tenant compte des dépenses pour le développement. Avec les dernières mesures gouvernementales limitant l'apport étranger donc utilisant presque à 100% les fonds publics, et avec la chute actuelle du baril et du prix de cession du gaz, la surface financière est donc relativement faible malgré les difficultés d'absorption qui ont entraîné la mauvaise gestion à tous niveaux. Capacité financière d'autant plus réduite que les recettes de l'Algérie proviennent d'environ 1/3 du gaz, l'Algérie ayant réalisé d'importants investissements gaziers alors le prix du gaz naturel a baissé de moitié aux Etats-Unis, à 3 096 dollars par million de BTU (British Thermal Units) du fait de l'introduction de nombreux producteurs et de la faiblesse de la demande due à la crise mondiale. Si ce prix se maintient dans cette fourchette, et tenant compte du nouveau modèle de consommation énergétique qui se mettra en place entre 2015/2020, il sera difficile de rentabiliser sur une période raisonnable les investissements hautement capitalistiques. M. Mebtoul préconise, enfin, de revoir le code pénal dépénalisant les actes de gestion des acteurs économiques et éventuellement choisir un bon partenariat. Dans ce cadre, pour le cas de l'Algérie, " cela implique d'être prudent, les conditions n'étant pas actuellement remplies", conclut le docteur. Synthèse Samira H.