Alors que la grippe A/ H1N1 fait de plus en plus de victimes et de contaminés, des millions de doses de Tamiflu sont commandées aux quatre coins du globe au laboratoire Roche et à des personnalités, dont Donald Rumsfeld. La pandémie fait des victimes mais fait aussi le bonheur des laboratoires pharmaceutiques. L'Afrique échappe pour le moment à cette pandémie médiatique. En une année, la France dépensera davantage pour se protéger de la grippe A que le monde entier pour se protéger du paludisme. La barre des 1000 morts est franchie début août, alors que l'on dénombrait 162 380 personnes touchées depuis mars dernier. Mais, aussi regrettable soit le taux de mortalité de la grippe A, il n'atteint pas heureusement celui du paludisme, qui fauche entre 1 et 3 millions de personnes tous les ans et qui ne déclenche aucune pandémie médiatique. Pour le moment, le taux de mortalité de la grippe A ressemble à celui de la grippe aviaire. Si elle provoque moins de morts que la grippe saisonnière, la grippe porcine booste l'action Roche, revigorée par les commandes de Tamiflu. Mais plus que le virus en lui-même, c'est la panique provoquée qui coûte le plus cher aux finances publiques. Le coup de gueule, passé sous silence, de l'ancien directeur de la Croix Rouge française, Marc Gentilini, n'a pas rectifié le tir. Son pays, la France, mobilisera bien 1 milliard d'euros pour le Tamiflu. Le malheur, c'est qu'on fait comprendre au gens que le niveau de stock mondial est insuffisant pour faire face à une pandémie généralisée. En Afrique, les plans d'urgence sont assez hétérogènes. Ainsi, au Maroc, où 102 cas de grippe porcine ont été confirmés (90% des patients sont déjà guéris), quelque 528 millions de dirhams ont été consacrés à l'achat de 4 millions de doses de Tamiflu au groupe Roche. Quelque 20 millions ont été mobilisés pour l'achat des masques. Le plan d'action global totalise 852 millions de dirhams. Courant août, le gouvernement a passé commande de plus de 6 millions de doses de vaccins anti-grippe A auprès de plusieurs laboratoires. De son côté, la Tunisie a mis en place un générique, Saiflu, développé par le laboratoire médical Saiph, administré gratuitement aux personnes malades. En Afrique subsaharienne, partie la moins concernée par la grippe, l'OMS cherche à mobiliser 31 millions de dollars pour un ensemble de pays. Hormis l'Afrique du Sud, qui a réagi comme n'importe quel pays développé, rare sont ceux qui ont mobilisé un budget pour combattre une grippe dérisoire comparée aux ravages du paludisme et du VIH/Sida. Le Sénégal, qui avait mis en branle il y a quelques années un plan de 7 milliards de F CFA étalé sur cinq ans pour contrer la grippe aviaire, se contente d'appliquer les recommandations de l'OMS, en relevant notamment le niveau de surveillance à l'entrée des ports et des aéroports. L'Algérie a pris les mesures nécessaires pour faire face au virus en renforçant son stock de médicaments antigrippaux. Près de 7 millions de boîtes de Tamiflu ont été ainsi acquis. De plus, un stock de 16 millions de masques de protection sont disponible, pour protéger les citoyens de la maladie. Des masques ont déjà été distribués aux médecins et spécialistes des maladies contagieuses ainsi qu'aux personnels des aéroports, ports et postes frontaliers. Les masques seront distribués gratuitement aux citoyens en cas de nécessité. En terme, de médicaments qui pourraient réduire la virulence de la maladie, l'Algérie dispose à ce jour de plus de 6,5 millions de boîtes de Tamiflu, et près de 50 mille de Saiflu produit localement par Saidal. La tutelle a élevé le niveau d'alerte pour tous les comités de contrôle sanitaire des aéroports, ports et postes frontaliers, et renforcé les stocks de médicaments dans différentes wilayas pour traiter d'éventuels cas de la maladie, en attendant leur transfert à l'hôpital spécialisé d'El Kettar à Alger. Nassima Bensalem