Les autorités kenyanes s'apprêtent à accueillir le sommet Sud-Sud qui se tiendra du 1er au 3 décembre prochain. Ce sommet fait suite aux grandes conférences des Nations unies sur les domaines économique, social et connexes, notamment la Déclaration de Doha sur le financement du développement, le Programme d'action de la Havane qui a été adopté lors du premier sommet du Sud sur le Cadre de Marrakech pour la mise en oeuvre de la coopération Sud-Sud. Le sommet de Nairobi permettra également de jeter les bases pour élaborer les questions clés de développement économique, notamment les préoccupations d'actualité sur l'environnement, ainsi que l'élaboration de la position du Sud pour le sommet de Copenhague sur le changement climatique. Lors d'une récente conférence intitulée "Pour une redéfinition de la coopération Sud-Sud" et ayant pour cadre de référence l'Afrique, il a été souligné que cette coopération n'est plus l'apanage des Etats. Sa base s'est élargie pour toucher les opérateurs économiques et la société civile dans son ensemble. Aujourd'hui, la coopération Sud-Sud n'est plus une option mais un impératif pour les pays en développement afin de relever leurs défis communs. Face aux défis d'ordre historique, politique et socioéconomique, les pays du Sud peuvent partager leurs problématiques d'intérêt commun, élargir leurs solutions et restructurer les institutions globales et développer des formes équitables d'interdépendance. Cette nouvelle forme de partenariat pourra amplifier la voix du Sud sur des questions d'importance capitale pour les pays en développement. Dans cette perspective, le continent africain projette actuellement une nouvelle image caractérisée par un grand marché émergent avec des ressources naturelles inexploitées. Cette image a décuplé l'intérêt porté à l'Afrique au niveau global et en particulier de la part de la Chine et de l'Inde. L'engagement de la Chine et de l'Inde est aussi perçu comme une stratégie alternative à celle que l'Afrique avait connu à la redéfinition de cette coopération Sud-Sud où l'Afrique pourra émerger à travers la coopération bilatérale pour aboutir à des questions communes au niveau régional et éventuellement des questions globales d'intérêt commun comme les Objectifs de développement du Millénaire. Il est nécessaire pour les pays du Sud de mettre en œuvre des plans d'action pour une coopération interne. Il semble cependant que le manque d'actions effectives a réduit l'impact et l'efficacité de la coopération Sud-Sud dans le renforcement des économies des pays en développement afin de répondre aux défis qu'apporte la mondialisation car il existe une inquiétude perçue dans ces pays concernant les moyens par lesquels ils pourraient récolter les bénéfices de la mondialisation et savoir comment ces défis affecteront les individus, le commerce et les gouvernements. Il est nécessaire pour le prochain sommet de Nairobi de faire en sorte que les pays en développement jouissent des profits de la mondialisation rapide caractérisés par l'avancée continue des technologies informatiques et des communications qui jouent un rôle crucial dans la nouvelle économie mondiale dépourvue de solidarité, d'égalité et de réciprocité. La question cruciale est bien sûr celle de l'opérationnalisation de ces nouvelles orientations politiques et théoriques en matière de développement. Celle-ci est hautement dépendante des rapports de force nationaux et internationaux. Les dynamiques de régionalisation en cours et la capacité retrouvée des pays du Sud à former des alliances stratégiques sur la scène internationale sont des éléments promoteurs, mais il ne faut minimiser ni la capacité de cooptation des pays industrialisés face aux revendications du Sud, ni la portée des divergences d'intérêt entre pays en développement. Les conditions politiques internes à ces pays sont un autre facteur déterminant en termes de choix des politiques de développement et d'orientation au sein des enceintes internationales. A ce niveau, la formation de coalitions sociales et politiques nationales en faveur de stratégies de développement orientées vers la redistribution des richesses et la satisfaction des besoins des populations est indispensable pour contrebalancer l'influence des élites qui bénéficient de la stratégie néolibérale d'intégration au marché mondial. Dans ce contexte, les pays du Sud n'ont pas d'autre choix que celui de multiplier les signes et les rapprochements pour l'intensification de leurs échanges et de leur coopération. Celle-ci peut se traduire notamment par la création d'alliances politiques nouvelles entre Etats du Sud qui déstabilisent la suprématie des nations industrialisées sur la scène mondiale. Et bien qu'un consensus émerge sur la nécessité de regagner des marges de manœuvre politiques dans la mondialisation, l'activisme diplomatique Sud-Sud ne se présente pas comme un phénomène univoque. Ce chemin est tout indiqué dans le renforcement des liens Sud-Sud à se coordonner, à développer une capacité de négociations collectives et à peser davantage sur les processus de décision qui les concernent au sein des enceintes internationales. Ahmed Saber