La détermination. C'était le maître mot du premier grand discours d'Angela Merkel devant les députés allemands du Bundestag depuis son investiture le 28 octobre. Lors de cette allocution, prononcée mardi 10 novembre, la chancelière chrétienne démocrate, encore auréolée du succès des cérémonies d'anniversaire des vingt ans de la chute du mur, a défendu avec une vigueur rare les projets de son gouvernement CDU-FDP. Mme Merkel, toute vêtue de noir, a voulu montrer qu'elle est investie d'une mission particulière dans cette période de sortie de crise. "L'Allemagne est confrontée à un test comme elle n'en a pas vécu depuis la réunification", a-t-elle annoncé dès le début de son intervention. Pour répondre aux difficultés économiques qui "vont d'abord augmenter" et "donner une nouvelle force à l'Allemagne", elle a fixé cinq priorités pour les quatre années à venir : surmonter les conséquences de la crise, restaurer la confiance des citoyens dans l'Etat, répondre au défi du vieillissement démographique, définir un cadre pour la gestion des ressources naturelles, définir un nouvel équilibre entre la sécurité et la liberté. Mesure phare de son programme, le choix controversé de baisser les impôts et de laisser filer les déficits budgétaires : "Nous avons choisi une autre voie, nous devons tout faire pour créer une croissance nouvelle et forte", a-t-elle asséné. Pour mieux prouver sa détermination, la chancelière assure qu'elle maintiendra ce cap "quelles que soient les résistances". Outre les partis d'opposition, plusieurs ministres présidents de son camp protestent contre ces projets. Elle s'est montrée tout aussi ferme sur la question des systèmes sociaux. Si la retraite à 67 ans constitue "un premier pas", d'autres mesures "durables" doivent être prises. De même, la chancelière a plaidé avec véhémence pour une réforme de l'assurance maladie et de l'assurance dépendance. Le nouveau gouvernement souhaite introduire des cotisations santé indépendantes des revenus des assurés et compléter l'assurance dépendance avec des éléments de capitalisation. "Il n'y a pas d'alternative à cette voie", résume t-elle. Sur le sujet sensible du nucléaire, Mme Merkel a redit qu'elle était prête à rallonger la durée d'activité des centrales. "C'est une partie indispensable de notre concept énergétique", a-t-elle déclaré sous les huées des députés verts. Elle n'a pas oublié de soigner son image sociale, en s'engageant à respecter l'autonomie des partenaires sociaux et à faire interdire les salaires immoraux. Pour montrer que sa nouvelle coalition de centre droit agit rapidement, la chancelière avait fait adopter en conseil des ministres, dès lundi 9 novembre, un premier paquet de mesures en faveur d'allègements fiscaux d'un montant de 8,5 milliards d'euros à partir de 2010. Au menu, une hausse du rabais fiscal pour les familles et des allocations familiales, une baisse de la TVA pour le secteur de l'hôtellerie et quelques modifications dans le système de taxation des entreprises. En 2011, elle veut aller plus loin en réformant le système fiscal de manière à ce que les revenus des classes moyennes soient moins ponctionnés et que les familles voient leurs avantages fiscaux revalorisés. En revanche, les députés sont restés sur leur faim en ce qui concerne l'application concrète des projets de réforme ou le financement des baisses d'impôts. Seules annonces précises : le gouvernement va prolonger le système du chômage partiel et veut faciliter les contrats à durée déterminée. Lors du débat parlementaire qui a suivi, les partis d'opposition n'ont pas ménagé la chancelière. "Ce n'est pas un discours gouvernemental, c'est une énigme gouvernementale et vous n'avez même pas la solution", a fustigé le nouveau chef du groupe parlementaire SPD, Frank-Walter Steinmeier, qui faisait partie du gouvernement précédent de coalition en qualité de ministre des affaires étrangères avant de se retrouver dans l'opposition après les élections du 27 septembre.