Un mois après sa prise de fonctions, Hamid Karzaï, dont la réélection à la présidence de l'Afghanistan dès le premier tour de scrutin en août dernier reste controversée, dévoile ce samedi son nouveau gouvernement. Celui-ci est considéré comme un test de sa crédibilité en Occident, où sa popularité a pâti de la faiblesse, de la mauvaise gestion et de la corruption de son administration précédente. Dans les milieux parlementaires, on déclare que le président afghan renouvellera près de la moitié de ses ministres mais conservera les titulaires des portefeuilles clés, principalement détenus par des technocrates, comme le souhaitent ses partenaires étrangers. Soumis à d'intenses pressions de ces derniers, Hamid Karzaï s'est engagé à nommer des ministres compétents et honnêtes et la composition de son équipe sera considérée comme un premier indice de la sincérité de son engagement à lutter contre la corruption. Un audit américain a émis jeudi de "sérieux doutes" sur la composition et l'indépendance de la commission anti-corruption qu'il a mise en place l'an dernier. Et Karzaï a pris la défense, la semaine dernière encore, du maire de Kaboul, qui encourt quatre ans de prison pour corruption. Mais le maintien attendu à leurs postes des titulaires des portefeuilles clés des Finances, des Affaires étrangères et de la Défense, Omar Zakhilwal, Rangeen Dadfar Spanta et Abdul Rahim Wardak, a reçu l'agrément de l'Occident. La semaine dernière, lors d'une visite à Kaboul, le secrétaire américain à la Défense a fait l'éloge de Wardak et du ministre de l'Intérieur, Hanif Atmar, rendant difficile pour Karzaï de les priver de leurs portefeuilles. Initialement, le président afghan avait annoncé la présentation de son gouvernement au parlement pour mercredi, mais, ce jour-là, il soupesait encore sa décision sur les titulaires de deux ministères, a dit son porte-parole. Hamid Karzaï doit en partie sa réélection au ralliement d'anciens "seigneurs de la guerre" régionaux. De source diplomatique, on s'attend à ce que ceux-ci, où leurs représentants, soient récompensés d'une manière ou d'une autre par des maroquins. "Karzaï n'arrive pas à caser tout le monde. Il a promis plus de postes qu'il n'en existe", a confié un diplomate sous le sceau de l'anonymat. Washington a prévenu le président afghan qu'il couperait son aide financière aux secteurs confiés à des ministres en lesquels il n'aurait pas confiance. Parmi les ministères visés figurent notamment ceux de la Santé, de l'Education et de l'Agriculture, destinataires de milliards de dollars d'aide occidentale. De source diplomatique on prédit que la liste que Karzaï produira sera "présentable" en ce qui concerne les principaux portefeuilles, mais on admet qu'il lui sera impossible d'exclure totalement la participation de chefs de guerre. Deux d'entre eux, Mohammad Qasim Fahim et Karim Khalili, chefs des milices des minorités respectivement tadjik et hazara, sont d'ores et déjà vice-présidents. L'ancien chef de guerre Ismaïl Khan devrait pour sa part conserver le ministère des Mines. Mais deux autres alliés puissants de Karzaï, Abdul Rashid Dostum et Abdul Rasul Sayyaf, ont été trop critiqués en Occident pour avoir des chances de figurer dans le gouvernement. Tous les ministres doivent être avalisés par les parlementaires avant de prendre leurs fonctions, ce qui pourrait prendre encore quelques semaines.