Des chercheurs américains ont séquencé le génome de trois espèces de guêpes tueuses de parasites, révélant de nombreuses caractéristiques qui pourraient permettre de développer de nouveaux insecticides naturels, selon leurs travaux publiés jeudi dernier. Les "guêpes parasites", dont un grand nombre ne dépasse pas quelques millimètres, sont très bénéfiques puisqu'elles s'attaquent et détruisent de nombreux insectes nuisibles. Ces guêpes, dont on recense 600.000 espèces, pondent leurs oeufs à l'intérieur de leur hôte, comme les pucerons et des chenilles, ce qui les tuent. "Sans elles et d'autres prédateurs naturels, nous serions littéralement envahis par ces insectes nuisibles", explique John Werren, biologiste à l'Université de Rochester (Etat de New York, nord-est des Etats-Unis) et co-auteur de ces travaux parus dans la revue Science datée du 15 janvier. Ces guêpes sont comme des "bombes intelligentes" qui cherchent et tuent sélectivement certaines espèces d'insectes", ajoute-il. "Si nous pouvons utiliser ce potentiel pour fabriquer des insecticides naturels ce serait nettement plus préférable que les insecticides chimiques qui détruisent ou empoisonnent sans distinction de nombreux organismes vivant y compris l'homme", poursuit le chercheur. Les trois génomes séquencés par cette équipe appartiennent à des espèces du genre nasonia, considéré comme le laboratoire d'étude des insectes parasitoïdes (qui se développent sur ou à l'intérieur d'un autre organisme). Mais pour développer de nouveaux insecticides, il reste à identifier les gènes déterminant quels insectes les guêpes parasitoïdes attaquent, ainsi que leurs différents venins, précisent les chercheurs. Ces venins, qui agissent de façons différentes sur la physiologie cellulaire, pourraient aussi déboucher sur de nouveaux traitements médicaux. Autrement dit, on a toujours besoin d'un plus petit que soi, dit le dicton. Est-ce pour cela que les scientifiques s'intéressent aux génomes des insectes? Peut-être, car dans le patrimoine génétique de ceux-ci, on peut y repérer quelque 60% de gènes équivalents à ceux de l'humain. Utilisée depuis des décennies, la mouche du vinaigre est ainsi devenue le couteau suisse des généticiens. Mais, à en croire le vaste consortium de chercheurs qui a séquencé le génome d'une sorte de guêpe parasitaire, la Nasonia, et qui publie aujourd'hui ses résultats dans Science, la drosophile pourrait bien se faire détrôner! Adulte, la Nasonia ne mesure qu'un ou deux millimètres. Elle est déjà considérée comme le "rat de laboratoire" des hyménoptères, ordre incluant les fourmis, les abeilles et les guêpes. Mais son caractère haplodiploïde - ce qui signifie que la femelle est issue d'un œuf fécondé et porte deux jeux de chromosomes, alors que le mâle se développe à partir d'un œuf non fécondé et ne possède qu'un seul jeu chromosomique - lui donne un avantage certain. La pauvreté chromosomique des mâles facilite la recherche des responsables de divers traits, notamment ceux qui font appel à l'interaction de plusieurs gènes. "La comparaison des gènes et du génome de la Nasonia avec l'humain montre que près de 7000 gènes ont des contreparties chez l'humain", précise le professeur assistant Evgeny Zdobnov, de l'Institut suisse de bioinformatique, à Genève, qui a pris part au projet international. Autre avantage sur la drosophile, la Nasonia dispose d'un "kit de méthylation de l'ADN", c'est-à-dire un ensemble de gènes codant pour des protéines capables de modifier l'ADN de l'organisme. Ce type de modification s'avère jouer un rôle important dans de nombreux processus biologiques tels que le développement, alors que la drosophile en est dépourvue. Enfin, le côté parasitaire de cette guêpe permet de l'utiliser comme une bombe intelligente. La Nasonia prend comme hôte des ravageurs agricoles et finit par les tuer. En exploitant cette faculté, les chercheurs imaginent utiliser ce genre de guêpe parasitaire en lieu et place des pesticides chimiques.