L'élaboration d'une politique financière en Suisse stagne, selon un expert en droit fiscal, H.Torrione. Il appelle Berne à faire le deuil du passé, tout juste un an après la décision du CF d'assouplir le secret bancaire pour échapper à la liste noire de l'OCDE. Selon l'expert,qui s'exprimait dans "La Liberté", H-R.Merz veut signer un maximum de conventions de double imposition pour sortir la Suisse de la crise. Or, miser sur la quantité plutôt que sur la qualité "est peu judicieux", selon lui. Il faut accepter l'échange de données, mais les banquiers n'ont pas à s'assurer que l'argent est déclaré, conclut-il. La stratégie helvétique a peu progressé depuis le 13 mars 2009, "ce qui m'inquiète", confie le professeur de l'Université de Fribourg dans une interview publiée par "La Liberté". Les propositions pour la place financière présentées il y a une dizaine de jours par le grand argentier Hans-Rudolf Merz l'ont "largement déçu". Selon M. Torrione, le ministre des finances part du principe qu'il faut signer un maximum de conventions de double imposition renégociées selon les standards de l'OCDE pour sortir la Suisse de la crise. Miser sur la quantité plutôt que sur la qualité "est peu judicieux". "Il vaudrait mieux se concentrer sur nos principaux partenaires (Etats-Unis, Allemagne, France, Italie, etc.) et s'assurer que la mise en oeuvre envisagée de ces textes les satisfera". Et le professeur d'appeler à l'abandon, face à ces partenaires, de l'approche restrictive de l'échange d'informations sur demande, qui "appartient au passé". S'il prône la mise en oeuvre intégrale de l'échange sur demande, Henri Torrione ne veut pas obliger les banquiers à s'assurer que l'argent est déclaré. "Une mise en garde des clients suffit." Le professeur ne goûte pas non plus l'idée d'un impôt libératoire prélevé par les banques, car "il concerne uniquement le rendement des avoirs placés dans les banques suisses". Cette proposition des banquiers permet ne permet donc pas de déterminer si le capital de base est le fruit d'une soustraction fiscale. Notons que la banque suisse UBS a estimé récemment que l'industrie financière suisse sera confrontée à des risques "considérables" si le Parlement suisse n'approuve pas un accord fiscal avec les Etats-Unis, et d'autres banques helvétiques pourraient se retrouver sous la pression des autorités américaines. Dans une lettre aux députés, UBS précise que le fisc américain (IRS) a collecté des informations sur les activités transfrontalières d'une vingtaine de banques suisses, et pourrait bientôt chercher à punir les fraudeurs américains clients de ces établissements. UBS exhorte le Parlement d'approuver un traité signé en août par le département américain du Trésor et le Conseil fédéral suisse sur la coopération bilatérale en matière d'évasion fiscale. "Les risques sont vraiment considérables pour le secteur financier et l'économie suisse dans son ensemble si le Parlement" ne donne pas son feu vert, avertit la banque dans la lettre, obtenue vendredi par l'Associated Press. "En dehors d'UBS, de nombreuses autres banques suisses ont été impliquées dans des activités transfrontalières avec des clients américains", précise la banque en référence aux comptes offshore de riches clients américains. "L'IRS a obtenu des informations sur une vingtaine de banques suisses" dans le cadre d'un récent programme d'amnistie. "Il est tout à fait possible que l'IRS veuille obtenir des informations sur d'autres clients de ces banques." Le gouvernement suisse s'efforce de sauver l'accord, dont certaines clauses ont été jugées illégales par la justice suisse en janvier. Il a demandé au Parlement d'approuver le texte, qui assouplirait le strict secret bancaire suisse pour permettre à Washington d'avoir un plus large accès aux dossiers de clients américains suspectés d'évasion fiscale. UBS estime que la Suisse risque de se retrouver sur la liste noire des paradis fiscaux non coopératifs si les députés ne valident pas l'accord, conclu après des mois d'âpres négociations entre Washington et Berne. Les entreprises suisses opérant aux Etats-Unis pourraient alors faire l'objet d'une surveillance accrue de l'IRS, ajoute-t-elle.