Avec l'annonce du crash samedi matin , la population polonaise s'est réveillée déboussolée. En la personne de Lech Kaczynski, qui menait le pays depuis 2005, les Polonais perdent leur président mais aussi une figure majeure de leur vie politique. "Jésus, Sainte Marie, c'est une tragédie inimaginable, un malheur inimaginable", s'est écrié Lech Walesa, chef historique du syndicat polonais Solidarité. Devant le palais présidentiel, la foule endeuillée a aussitôt commencé à affluer. Conformément à la constitution polonaise c'est Bronislaw Komorowski, président de la Diète, chambre basse du parlement polonais, qui assurera les fonctions de chef de l'Etat. "Il est en route pour Varsovie depuis Gdansk (nord) où il se trouvait ce matin", a annoncé sa chancellerie. Bronislaw Komorowski, candidat officiel du parti libéral Plate-forme civique (PO) pour l'élection présidentielle prévue cet automne, devait affronter Lech Kaczynski, candidat virtuel de la droite conservatrice. Une réunion d'urgence du Conseil des ministres polonais doit par ailleurs se tenir à Varsovie dès que possible, a annoncé le porte-parole du gouvernement. Donald Tusk, le chef du gouvernement, et ses ministres sont en route vers la capitale. La perte pour la Pologne ne s'arrête pas à celle de son président. Selon les autorités russes, 85 à 132 personnes se trouvaient à bord de l'appareil. Il y avait aussi "le chef de l'état-major de l'armée et le vice-ministre des Affaires étrangères, Andrzej Kremer", a annoncé le porte-parole du ministère polonais des Affaires étrangères. Le président de la Banque centrale polonaise, Slawomir Skrzypek, figurait également sur la liste des passagers. Enfin, plusieurs députés se trouvaient à bord.Le président polonais a fait partie de plusieurs gouvernements, dont celui de Lech Walesa, avant de devenir maire de Varsovie puis président de la Pologne... Il n'aura pas eu le temps de faire part de ses intentions pour la présidentielle de 2010, avant l'accident d'avion qui l'a emporté. Lech Kaczynski, 60 ans, était depuis 2005 président de la Pologne, après près d'un demi-siècle d'engagement politique dans son pays. Cet engagement commence dans les années 1970, alors que la Pologne est encore sous domination soviétique. Lech Kaczynski prend part au mouvement démocratique et anti-communiste. Il devient en août 1980 conseiller au Comité de Grève du chantier naval de Gdansk et du mouvement Solidarnosc. Pendant la loi martiale, imposée par les communistes en décembre 1981, il est interné comme "élément anti-socialiste". En juin 1989, il est élu membre du Sénat et vice-président du syndicat Solidarnosc. Il est le conseiller principal de Lech Walesa, lorsqu'il est élu président de la République de Pologne en décembre 1990. Lech Walesa nomme Kaczynski ministre de la sécurité nationale. Après avoir occupé de hautes fonctions auprès du président polonais, Lech Kaczynski et son frère jumeau Jarosaw se brouillent avec lui au début des années 1990, notamment sur des questions économiques.Lech Kaczynski prend ensuite la présidence de la Chambre Suprême de Contrôle, la Cour des Comptes polonaise, de février 1992 à mai 1995. Il devient ensuite ministre de la Justice au sein du gouvernement de Jerzy Buzek (juin 2000- juillet 2001). En 2001, il fonde avec son frère jumeau le parti conservateur "Droit et justice" (Prawo i Sprawiedliwo??, PiS), et est élu 2002 maire de Varsovie, capitale de la Pologne. Le 19 mars 2005, il déclare officiellement sa candidature à l'élection présidentielle de 2005, qu'il remporte le 23 octobre de la même année. Lors de sa victoire, il expliquait que son frère, son aîné de 45 minutes et président de leur parti victorieux, l'avait "toujours poussé en avant". Pour ne pas entraver la marche de Lech vers la présidence de l'Etat, Jaroslaw avait renoncé en 2005 au poste de Premier ministre. Mais il avait gardé des leviers de commande et principalement le poste très influent de président du parti. Lech Kaczynski, dirigiste, prônait la réconciliation avec l'Allemagne et la Russie, tout en exploitant la peur chez certains polonais de leurs deux grands voisins. Eurosceptique convaincu, Lech Kaczynski avait tout de même ratifié le traîté de Lisbonne le 10 octobre 2009, comme il avait promis de le faire en cas de "oui" au référendum irlandais. Le traité de Lisbonne avait déjà été ratifié par le Sejm (Parlement) et le Sénat polonais.