L'Autriche a signé, samedi, un accord avec la Russie, prévoyant la construction par Vienne d'un segment du gazoduc South Stream, concurrent du projet de l'Union européenne Nabucco. L'Autriche est devenue un point central de la rivalité entre les deux gazoducs, qui doivent traverser ce pays pour alimenter l'Union européenne en gaz naturel. Le gazoduc South Stream, initié par le groupe russe Gazprom, avec la coopération de l'Italien ENI, doit, à partir de 2015, et depuis Novossibirsk (Sibérie) acheminer du gaz russe vers l'Italie et la Grèce sous la Mer Noire, en évitant ainsi l'Ukraine et les coupures d'approvisionnement de l'Europe survenues ces dernières années en raison du contentieux russo-ukrainien. L'accord a été signé par le ministre autrichien de l'Economie,Reinhold Mitterlehner, et le ministre russe de l'Energie, Sergei Chmatko. Parallèlement, le président de Gazprom, Alexei Miller, et le président du groupe autrichien OMV, Wolfgang Ruttensdorfer, ont signé un accord-cadre sur la coopération entre les deux groupes énergétiques. Au cours d'une conférence de presse commune, Vladimir Poutine a souligné que South Stream était "un projet concurrent" du gazoduc Nabucco, dont l'un des principaux partenaires est OMV, qui joue ainsi sur les deux tableaux. Nabucco doit relier les champs gaziers d'Asie centrale, notamment de la Mer Caspienne, à l'Europe, via la Turquie et le sud-est de l'Europe, en évitant la Russie. Avec Nabucco, l'UE espère, pour un investissement de 7,9 milliards d'euros, pouvoir diversifier ses sources d'approvisionnement en gaz naturel et réduire sa dépendance vis-à-vis de la Russie en acheminant jusqu'à 31 milliards de m3 de gaz par an de la Caspienne vers un site autrichien, en passant par la Turquie et les Balkans. Mais le projet n'a, pour l'heure, aucun founisseur confirmé, et a subi plusieurs reports, ce que le Premier ministre russe Vladimir Poutine, présent à Vienne, n'a pas manqué de souligner. "Construire un gazoduc sans contrats d'approvisionnement est inutile et très dangereux. Citez-moi un seul contrat signé pour Nabucco", a-t-il remarqué. Faymann s'est efforcé de relativiser la rivalité entre les deux projets et a assuré que l'Autriche pourrait tirer profit des deux. "Nous ne savons pas de tout comment et d'où viendra le gaz de Nabucco. C'est une raison supplémentaire pour laquelle nous sommes intéressés par plusieurs gazoducs, plusieurs options, et une diversification. Mais cela ne signifie pas du tout que les deux projets sont jugés l'un par rapport à l'autre", a-t-il dit. Samedi, le groupe autrichien OMV, pourtant déjà actionnaire de Nabucco, a signé un contrat par lequel il s'engage à construire le segment autrichien de South Stream. "La décision sur l'investissemnt final aura lieu dans les 18 prochains mois, et le gazoduc sera opérationnel avant la fin 2015", annonce le groupe dans un communiqué. La mise en service de South Stream est prévue pour la fin 2015, son coût étant estimé entre 19 et 24 milliards d'euros. Le gazoduc, long de 3.600 km, livrera 63 milliards de m3 de gaz par an, soit 35% des exportations de gaz russe vers l'Europe, dont les besoins en gaz sont aujourd'hui couverts à 42% par des importations de Russie. Avant la signature de l'accord russo-autrichien, la Russie avait déjà signé des accords bilatéraux avec d'autres pays de transit: Bulgarie, Grèce, Serbie, Slovénie et Hongrie. Outre le groupe italien ENI, le groupe français EdF doit prochainement intégrer le consortium. Les négociations sur son entrée vont s'achever "d'ici un mois et demi ou deux mois," a indiqué le président de Gazprom dans un communique samedi. La veille, le consortium international du projet Nabucco avait lancé un appel d'offres pour la fourniture des tubes d'aciers de son gazoduc, long de 3.300 km, entre la frontière orientale de la Turquie et l'Autriche. Avec une mise en service prévue pour 2014 et un coût de construction estimé à 7,9 milliards d'euros, Nabucco doit livrer 31 milliards de m3 de gaz par an, soit moitié moins que South Stream. Selon des prévisions de l'Union européenne, les besoins en gaz des pays de l'UE devraient augmenter jusqu'en 2030 d'un pour cent par an.