Les autorités islandaises se verraient bien entrer dans l'Union européenne, mais les baleiniers rejettent une adhésion qui menace leur pêche. Le coup d'envoi, en juillet, des pourparlers entre Reykjavik et Bruxelles en vue d'une adhésion à l'Union européenne est regardé d'un mauvais œil par les baleiniers islandais. Leur pays est l'un des rares, avec le Japon et la Norvège, à autoriser la pêche à la baleine et ils redoutent que l'Europe change la donne. La Commission européenne a en effet relevé que cette pratique n'était "pas en ligne avec l'acquis communautaire" et Berlin a fait de son abandon un préalable. Les professionnels islandais n'en ont cure : ils s'appuient sur l'approche diamétralement opposée, selon les baleiniers, des Islandais et de leurs interlocuteurs européens concernant l'exploitation de la mer. Cette ressource est devenue encore plus précieuse pour l'île de 320 000 habitants depuis l'effondrement de son système bancaire. "La politique de la pêche dans l'UE est le pire exemple de gestion des ressources naturelles que l'on puisse trouver", estime Kristjan Loftsson, patron d'un armateur dans le "fjord des baleines". L'UE est attachée au moratoire qui interdit la chasse des baleines depuis 1986. "Nous espérons que l'UE prendra en considération le fait que l'Europe du Nord a des traditions spéciales", souligne Thomas Heidar, représentant de l'Islande à la Commission baleinière internationale (CBI). "L'Islande n'adhérera pas à l'UE, alors ce n'est pas un problème", assène Kristjan Loftsson, le patron de Hvalur, une société qui arme deux navires dans le Hvalfjord ("fjord des baleines") au nom prédestiné. Une certitude qui s'appuie sur l'approche diamétralement opposée, selon lui, des Islandais et de leurs interlocuteurs européens concernant l'exploitation de la mer, une ressource devenue encore plus précieuse pour l'île de 320.000 habitants depuis l'effondrement de son système bancaire. "La politique de la pêche dans l'UE est le pire exemple de gestion des ressources naturelles que l'on puisse trouver", estime M. Loftsson. "Ils ont vidé les mers (avec la surpêche) et cela se produira aussi dans les eaux islandaises si on est assez stupides pour adhérer". Concernant les baleines, l'Islande juge leurs populations assez abondantes pour supporter des prélèvements limités --150 rorquals communs et 200 petits rorquals par an-- tandis que les pays de l'UE sont attachés au moratoire qui interdit leur chasse depuis 1986. Figurant sur la liste des espèces menacées de la Cites, les populations de rorquals communs et de petits rorquals sont estimées à respectivement 20.000 et 70.000 spécimens dans l'Atlantique nord. "Tout cela n'est qu'une affaire de politique. ça n'a rien à voir avec le bon sens ou la science", lâche M. Loftsson, qui estime que les pays anti-chasse ne cherchent qu'à "conquérir des voix" au sein de leur électorat en affichant une conscience écologique à bon compte. Pour Thomas Heidar, représentant de l'Islande à la Commission baleinière internationale (CBI), la chasse a trois raisons d'être: son poids économique direct non-négligeable en temps de crise, son impact économique indirect --pêcheurs et cétacés sont en concurrence pour les stocks de poissons-- et, "peut-être plus crucialement: c'est une question de principe". "Un Etat côtier a le droit d'exploiter raisonnablement toutes les ressources marines vivantes", dit-il, s'étonnant que "certains considèrent la mer comme un zoo qui n'est pas fait pour être exploité mais protégé". Ayant le sentiment d'avoir été malmenés dans le contentieux avec les Britanniques et les Néerlandais sur l'indemnisation des épargnants lésés par la faillite de la banque Icesave, les Islandais risquent d'être piqués au vif en cas de nouveau bras de fer. "Si des déclarations fracassantes sont faites par l'autre partie, ils pourraient bien en faire une affaire de fierté nationale", affirme M. Heidar. "Nous espérons que l'UE prendra en considération le fait que l'Europe du Nord a des traditions spéciales", souligne-t-il. Selon un sondage paru en juin, 60% des Islandais sont hostiles à une adhésion contre seulement 26% qui y sont favorables. A Reykjavik, dans le coquet restaurant "3 Frakkar" ("Les trois imperméables") qui sert aux touristes et aux locaux des steaks au poivre ou des sashimis de baleine, l'UE n'est pas au goût du jour. "J'adore la baleine. C'est la viande rouge la plus saine au monde. Il n'y a pas d'hormones dedans", confie le propriétaire, Ulfar Eysteinsson.