Salah Mihoubi, docteur en économie et ancien cadre de la Banque d'Algérie, nous livre dans ce court entretien une lecture optimiste sur la déclaration de politique générale du gouvernement.Selon l'économiste, le Premier ministre a donné des éléments positifs et rassurants sur le devenir de l'économie nationale. Pour Salah Mihoubi, la réalisation des objectifs tracés par l'Exécutifs est " tout à fait possible ". " Je suis optimiste ", dit-t-il. Le Premier ministre a présenté, jeudi dernier, sa déclaration de politique générale devant l'APN. Quels sont, Dr Mihoubi, vos premiers constats ? Je dirais, tout d'abord, que la déclaration de politique générale est un indice de démocratie. Certainement, tout n'est pas parfait, mais je pense que le Premier ministre a été rigoureux et n'a pas été démagogue. Il a donné des éléments d'information détaillés sur la situation économique du pays et sur les projets à lancer. Il ne s'agit pas d'une vue d'esprit. Les données avancées sont concrètes et vérifiables. Il a parlé des contraintes et de ce qui reste à faire. Il a même cassé certains tabous en parlant, à titre d'exemple, de la surévaluation des projets. Ouyahia a mis en exergue le fait que les pouvoirs publics algériens maintiennent leur choix pour ce qui concerne la politique, appelée ces deux dernières années, de " patriotisme économique ". Un commentaire ? Les clarifications données par le Premier ministre au sujet de la nouvelle politique relatives aux IDE, sont venues à point nommé pour rassurer les investisseurs étrangers. L'affirmation portant maintien des décisions prises dans le cadre de la LFC 2009 et la loi de finance 2010, offre plus de visibilité et de stabilité à la politique du gouvernement concernant les investissements. Les opérateurs étrangers ne vont pas dire, désormais, que l'Etat algérien change sa politique chaque 6 mois. Ils vont composer avec le cadre existant. Le Premier ministre a parlé, entre autres objectifs, de porter la croissance du secteur agricole à hauteur de 8 % annuellement. Qu'en pensez-vous docteur ? Je considère que la réalisation de cet objectif est tout à fait possible. D'ailleurs, l'agriculture est l'un des rares secteurs, hors hydrocarbures, qui évoluent de manière positive, et ce depuis plusieurs années déjà. Je vous cite par exemple la production des céréales qui atteint l'année dernière un niveau record. Il y a aussi l'importance des ressources financières mobilisées par l'Etat au profit de ce secteur qui bénéficie, dans le cadre du programme quinquennal 2010/2014, d'un budget de 200 millions de dinars annuellement, soit 1 000 milliards de dinars en 5 ans. Il faut ajouter à cela le programme de construction de 45 nouveaux barrages qui devront améliorer sensiblement, à travers l'irrigation, le rendement de l'agriculture dans notre pays. Je dirais, aussi que le développement de ce créneau ne contribue pas uniquement au renforcement de la sécurité alimentaire du pays mais aussi à la création de nouveaux postes d'emploi. En somme, un taux de croissance de 8 % dans le secteur agricole est réalisable à condition que les pouvoirs publics ne relâchent pas leurs efforts et qu'il n'y ait pas une baisse importante de pluviosité. Il a été indiqué, dans la même déclaration, que la moyenne de chômage sera réduite à moins de 10 %. Certains observateurs pensent que c'est trop ambitieux … Cet objectif est réaliste et il a été confirmé par le Fonds monétaire international, qui a estimé que le phénomène de chômage en Algérie connaît un recul consécutif ces dernières années. Le FMI a prévu un taux de chômage à moins de 10 % en 2011. Une estimation qui s'inscrit en droite ligne avec les projections du gouvernement qui a prévu la création de 3 millions d'emplois au cours des 5 années à venir. Je vous dirais pourquoi ce n'est pas impossible. Premièrement, le développement de l'agriculture et de l'industrie vont contribuer directement à la création de milliers de postes de travail. Il y a aussi la Fonction publique qui a recruté 50 000 fonctionnaires l'année passée en plus de 60 000 postes prévus pour 2011. Ajoutons à cela le vaste programme de réalisation des infrastructures qui contribue aussi à la résorption du chômage. Citons la réalisation de 2 millions de logements, 35 barrages et les 6 000 kilomètres de voies ferrées. Selon la Banque d'Algérie, le phénomène de l'inflation tournait autour de 6 % depuis 2009. Pour juin 2010, son taux est estimé à 4.5 %. Quel est l'impact de cette tendance inflationniste sur l'économie nationale ? La première conséquence de ce phénomène est visible sur les prix des produits alimentaires, notamment les produits frais, qui ont connu une hausse importante. Ce phénomène est le résultat d'un déséquilibre entre l'offre et la demande. Il aura des conséquences négatives sur le pouvoir d'achat des Algériens et sur la compétitivité des produits locaux. L'inflation fait que les produits algériens deviennent chers et, par voie de conséquence, peu compétitifs. Un taux d'inflation à près de 6 % constitue, actuellement, le point noir de l'économie algérienne. Le cadre macroéconomique est au rouge. Propos recueillis