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" Le libéralisme proposé par la Banque mondiale et le FMI ne nous convient "
Reda Hamiani, lors du Forum de Marseille
Publié dans Le Maghreb le 16 - 10 - 2011

Institutionnels et chefs d'entreprise européens et de la région Mena se sont réunis, à Marseille, pour évoquer les nouveaux courants d'affaires envisageables après " les révolutions arabes ", mais aussi renouveler les vœux pour un rapprochement entre les pays du Maghreb, selon un reseau méditerranéen spécialisé en économie. "Une vision commune pour une prospérité partagée" tel était le crédo du Forum de Marseille, premier forum d'affaires Europe-Mena, organisé les 13 et 14 octobre 2011 par le think tank CAPmena (Center of Analysis and Prospective for Middle East and North Africa) et Euromed Management, dans le cadre de la Semaine économique de la Méditerranée. Les orateurs, institutionnels et dirigeants des pays du pourtour méditerranéen et du Golfe se sont succédé pour affirmer la nécessité du développement d'une zone économique méditerranéenne. "Nous avons besoin d'une stabilité juridique, réglementaire et institutionnelle. Plus rapidement cela arrivera, et plus facilement nous pourrons nous développer dans cette zone" commente Jean-Laurent Granier, CEO MedLA du groupe Axa. "On parle beaucoup du printemps arabe, mais c'est surtout actuellement la région des quatre saisons avec les inquiétudes et les incertitudes. Nous sommes passés de l'étatisation de la société à une privatisation de l'Etat. Il faut redéfinir le rôle distributif de l'Etat " souligne Nassif Hitti, ambassadeur des Etats de la Ligue arabe en France. "L'intégration régionale à géométrie variable commence à être possible avec l'ouverture et la création d'un Etat de droit" poursuit-il. Reste à savoir quelle voie emprunter. Réda Hamiani, ancien ministre et président du Forum des chefs d'entreprises , se dit séduit parle modèle turc. "Nous avons, avec beaucoup de plaisir, abandonné l'économie de type soviétique, mais le libéralisme proposé par la Banque mondiale et le FMI ne nous convient pas. Nous recherchons une solution de synthèse, une troisième voie comme on dit en France." Comment la trouver ? "Nous souhaitons que nos amis européens nous aident. Mais il ne faut pas que cette aide sente le pétrole ! Et qu'ils viennent avec leurs idées pour nous les imposer ! Dans le monde existe un problème de liquidités. Chez nous, nous avons un problème de surliquidité. il faut se placer ensemble dans des logiques gagnantes-gagnantes. Nos attentes constituent autant d'opportunités pour les Européens " prévient Réda Hamiani. "Les gouvernements de l'ère Ben Ali ont poursuivi un modèle de développement qui servait leurs intérêts. Il s'agissait d'un régime libéral avec une intervention minimale de l'Etat mais sans aucun respect de la concurrence, dans un système corporatiste" rappelle Elyès Jouini, ancien ministre tunisien et vice-président de Paris Dauphine. "Ce système a été dans l'incapacité de distribuer la croissance économique et donc de répondre aux vrais problèmes économiques et sociaux. La croissance de 5% par an a été insuffisante" poursuit-t-il en évoquant "la nécessité d'une réforme de la gouvernance, la levée des freins à l'entrepreneuriat avec des règles claires en matière d'investissement et de concurrence." La Tunisie affronte deux défis : le chômage et particulièrement celui des jeunes diplômés qui représente 200 000 personnes sur un total de chômeurs de 700 000. Un chiffre à rapprocher de celui de la population active : 3,5 millions. Et le fossé creusé entre la côte tunisienne et le centre du pays. "Une course est entamée avec des échéances et des choix politiques" affirme Elyès Jouini.

Conférence des arrières pensés
La question de l'entente entre les pays du Maghreb reste le noeud gordien à dénouer avant de parler de prospérité dans les pays du Maghreb, d'une zone de libre-échange avec l'Europe. C'est ce que constate l'ensemble des intervenants. Ainsi, pour Abdelmalek Alaoui, managing partner de Gobal Intelligence Partners au Maroc, "la croissance est interdite à l'Est et donc le Maroc va la chercher au Sud. Maroc Telecom a ainsi cinq licences GSM en Afrique." Réda Hamiani reconnaît aussi "regretter ce non-Maghreb qui pèse sur la région. "Nous perdons de 1 à 2 points de croissance à cause de cela." Selon Abdelmalek Alaoui, "pour créer l'étincelle susceptible de créer le couple maroco-algérien, il faut arrêter les procès en sorcellerie, savoir qu'aucun conflit ne saurait être dépassé, et que la société civile et la presse aient le souci de construire un respect mutuel." "Je pense que la prochaine rencontre méditerranéenne doit se dérouler autour du couple algéro-marocain. La société civile doit prendre le leadership" explique Abdelmalek Alaoui. Il propose même de nommer cette réunion, "la conférence des arrières-pensées ". "Il existe une complémentarité parfaite entre le Maroc et l'Algérie. Les hommes de bonne volonté doivent se regrouper. Il en va de notre avenir et de celui de l'Europe. Mais, nous n'avons pas besoin de tuteur pour passer un coup de fil de Rabat à Alger" poursuit-il. Se pose également l'ouverture de nouveaux marchés issus des printemps arabes. "Le retard d'infrastructure existait avant les révolutions et a même été estimé à 300 milliards d' euros. Il est juste dans une nouvelle dimension, car il se trouve au coeur de l'aspiration des populations pour une nouvelle gouvernance" a tenu à rappeler Henry Marty Gauquié, directeur des relations internationales à la Banque européenne d'investissement (BEI). Et de prévenir : "les pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée vont passer à une politique plus sélective dans leurs marchés. "Une affirmation à rapprocher de celle d'Ahmed Tibaoui, ancien ministre algérien et directeur général du World Trade Center d'Alger, pour qui, "les entreprises européennes sont plus chères. Les Chinois vont plus vite pour des coûts moindres et une qualité identique."


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