La police a réprimé, hier, toute tentative de rassemblement des partisans d'Etienne Tshisekedi dans un stade de Kinshasa, où l'opposant qui s'est autoproclamé "président élu" de la RD Congo voulait "prêter serment" après avoir rejeté la réélection du chef de l'Etat Joseph Kabila. Tôt le matin les autorités ont déclaré interdite la manifestation prévue au stade de Martyrs à partir de 10H00 (09H00 GMT) lors de laquelle l'opposant de 79 ans devait "prêter serment" devant "le peuple congolais", comme il l'avait annoncé lui-même dès dimanche. "Il n'y a pas de manifestation, elle est interdite. Il y a déjà un président élu qui a prêté serment. On ne peut pas prêter serment à nouveau, c'est un acte de subversion. On doit empêcher de poser cet acte contraire à la Constitution", a déclaré une source proche du chef de la police congolaise. Les forces de l'ordre ont rapidement bouclé le quartier Limete, dans l'est de la capitale, où M. Tshisekedi a sa maison non loin du siège de son parti, l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Les journalistes ont été interdits d'approcher de la résidence de l'opposant, où il pourrait finalement "prêter serment", et les regroupements de ses partisans ont été dispersés à coup de gaz lacrymogène par la police, qui a procédé à des arrestations. Aux abords du stade des Martyrs, près du centre-ville, quatre chars de la Garde républicaine y étaient toujours positionnés depuis dimanche. Déployée en force et patrouillant à pied, ou bien roulant à pleine vitesse à bord de pick-up ou de gros véhicules blindés, les policiers ont également dispersé avec du gaz lacrymogène les partisans du leader de l'UDPS qui tentaient de se regrouper. Quelques tirs à balles réelles ont également été entendus, sans faire de victimes, selon les premières constatations. Les manifestants arrivaient individuellement à pied. Ils ont été jusqu'à 200 environ à pouvoir se regrouper aux cris de "Tshisekedi président", avant d'être dispersés. Plusieurs dizaines ont été arrêtées. "Le Congo n'a pas voté pour Kabila. Ils nous maltraitent comme si on était des étrangers. Le président légitime c'est Etienne Tshisekedi, c'est pour lui que nous avons voté, c'est lui qui va diriger le pays. Nous avons entendu la voix de notre président et nous voulons entrer dans le stade. Il ne peut pas y avoir deux présidents au Congo", a expliqué devant le stade un homme d'une trentaine d'années. "On a étudié mais il n'y pas d'avenir pour les jeunes. On a choisi Tshisekedi librement, sans contrainte. Il avait un programme de société, c'est pour ça qu'on a voté pour lui", ajoute un autre partisan. Ailleurs la ville est restée calme, les commerces étaient ouverts et les taxis ont circulé. Le carton d'invitation officiel pour la "cérémonie de prestation de serment du président élu" M. Tshisekedi, titré "Présidence de la République, protocole d'état", donnait un programme détaillé du déroulement de la matinée, avec notamment l'arrivée minutée des "officiers supérieurs militaires et la police nationale", "des hauts magistrats", "des ambassadeurs" ou encore "des présidents et délégations de pays frères et amis". L'opposant de 79 ans s'est autoproclamé "président élu" après avoir rejeté les résultats de l'élection présidentielle à un tour du 28 novembre, entachée de nombreuses irrégularités dénoncées notamment par des missions d'observation et plusieurs pays. Le président sortant Joseph Kabila a officiellement été réélu avec 48,95% des suffrages, contre 32,33% à son rival, arrivé second devant neuf autres candidats. Le chef de l'état, proclamé réélu pour un second quinquennat par la Cour suprême de justice, a été officiellement investi et a prêté serment mardi à Kinshasa.