Le président syrien Bachar al-Assad s'est à nouveau défendu, hier, d'avoir donné des ordres de tirer sur son peuple, accusant des parties étrangères de "chercher à déstabiliser" le pays, secoué depuis 10 mois par une révolte dont la répression a fait des milliers de morts. Dans un discours d'une heure quarante-cinq retransmis par la télévision officielle, le dirigeant syrien a par ailleurs annoncé la tenue d'un référendum populaire sur une nouvelle Constitution "la première semaine de mars", une fois que "la commission sur la nouvelle Constitution aura terminé ses travaux". "Aucun ordre n'a été donné de la part d'aucune autorité pour ouvrir le feu" sur des manifestants, a affirmé M. Assad, soulignant que "selon la loi, personne ne peut ouvrir le feu sauf en cas d'autodéfense". "Je gouverne avec la volonté du peuple et si je renonce au pouvoir ce sera aussi avec la volonté du peuple", a ajouté Bachar al-Assad qui a succédé à son père en 2000, alors que de nombreux pays appellent à son départ. La Syrie est en proie depuis la mi-mars à une vague de contestation réprimée dans le sang, mais le régime ne reconnaît pas l'ampleur de la révolte et attribue les troubles à des "bandes armées" ou à des "groupes terroristes" manipulés par l'étranger. Le président Assad a ainsi accusé mardi des "parties régionales et internationales" à "chercher à déstabiliser" la Syrie, s'en prenant notamment aux "médias internationaux" qui tentent selon lui "sans relâche de pousser la Syrie à l'effondrement". "Ils ont échoué mais ne désespèrent pas" de le faire, a-t-il dit. Le président syrien a affirmé que le rétablissement de la sécurité dans le pays était "la priorité absolue" promettant de frapper les "terroristes" d'une main de fer. "Il ne faut pas tolérer ceux qui terrorisent les gens, ni ceux qui sont complices avec les parties étrangères", a-t-il affirmé. "La bataille avec le terrorisme c'est notre combat à tous, tout le monde doit y participer, mais un Etat fort c'est un Etat qui sait pardonner", a-t-il ajouté dans cette quatrième intervention télévisée depuis le début de la révolte. Peu avant, lors d'un discours prononcé dans l'église de la Croix Sacrée à Damas et retransmis par la télévision, le grand mufti de Syrie cheikh Ahmad Badreddine Hassoune avait appelé les opposants à "déposer les armes", lors d'une messe islamo-chrétienne à la mémoire des 26 victimes tuées, vendredi dernier, dans un attentat suicide à Damas. "Si vous désirez participer au pouvoir, présentez-nous vos programmes sans lever vos armes et s'ils nous convainquent, nous les adopterons", a ajouté le grand mufti, qui représente la plus haute autorité religieuse de l'islam en Syrie. Son fils Sariah Hassoun a été assassiné en octobre dans le cadre d'une vague d'attentats visant les alliés du président syrien. Le discours de M. Assad intervient en pleine controverse sur la mission des observateurs de la Ligue arabe, présents en Syrie depuis le 26 décembre, pour rendre compte de la situation. La Ligue arabe s'est prononcée dimanche pour la poursuite et le renforcement de cette mission, accusée d'inefficacité face à une crise qui a encore fait des dizaines de morts ces derniers jours. Le plus important groupe d'opposition, le Conseil national syrien (CNS), a affirmé lundi que "le rapport sur le travail des observateurs représentait un pas en arrière dans les efforts de la Ligue, et ne reflétait pas la réalité constatée par les observateurs sur le terrain". Il a appelé au transfert du dossier au Conseil de sécurité de l'ONU et à "la création de zones de sécurité et d'exclusion aérienne" afin de protéger les civils. Lundi, six civils ont encore été tués par les troupes gouvernementales, malgré le déploiement de quelque 160 observateurs à travers le pays. Le Comité ministériel arabe a décidé dimanche de "donner aux observateurs le temps nécessaire pour poursuivre leur mission conformément au protocole", après avoir examiné leur premier rapport. Ce protocole prévoit, outre la mission d'observation d'une durée d'un mois, l'arrêt des violences, la libération des détenus, le retrait de l'armée des villes et la libre circulation pour les observateurs arabes et la presse. Le comité ministériel a néanmoins demandé un renfort financier, logistique, matériel et en effectifs de la mission, pour en "assurer le succès". Un "rapport complet" est attendu le 19 janvier. La France a annoncé qu'elle continuerait pour l'instant d'apporter son soutien à la mission qui doit être renforcée "significativement".