Le président français, Nicolas Sarkozy, sera, aujourd'hui, l'hôte du président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika. Cette visite est présentée du côté français sous le signe de la "réaffirmation de l'amitié profonde de la France avec l'Algérie et la Tunisie", puisqu'il se rendra également en Tunisie, pour présenter son projet d'Union méditerranéenne. Le programme prévoit un tête-à-tête entre les deux présidents algériens et français, suivi d'un déjeuner de travail. La dernière visite du nouveau président français remonte au mois de novembre 2006, alors qu'il était ministre de l'Intérieur. Nicolas Sarkozy s'était longuement entretenu avec le président de la République. Les deux hommes avaient abordé de nombreux sujets, notamment les relations bilatérales, le continent africain, le monde arabe. Il semble que les deux hommes s'apprécient grandement. Les deux objectifs de cette visite du président Nicolas Sarkozy en Algérie et en Tunisie, celle au Maroc ayant été annulée à la dernière minute à la demande du palais royal, visent, selon les officiels français, à " honorer l'amitié à la fois unique et indéfectible qui unit nos deux peuples et nos pays ". Selon les mêmes sources, le président français souhaite que " cette amitié, qui plonge ses racines dans une longue histoire commune et parfois tumultueuse, continue de prospérer et de s'enrichir dans la conscience partagée d'un certain destin commun ". Du point de vue économique, les échanges entre l'Algérie et la France, même extrêmement denses, demeurent insuffisants. Les investissements français en Algérie ne suivent pas la position de ce pays en tant que premier partenaire commercial. L'Algérie est le premier client de la France au niveau maghrébin et son premier partenaire économique sur le continent africain. Et même si les investissements français ont augmenté de plus de 111% en un an, cela ne correspond pas à la proximité des deux pays ni à la volonté des autorités algériennes de diversifier l'ouverture du marché. Le second objectif de cette visite du président français tend à présenter son idée d'Union méditerranéenne à la fois au président Abdelaziz Bouteflika et au président Zine El Abidine Ben Ali. Déjà, pendant la campagne électorale de la dernière présidentielle française, Nicolas Sarkozy avait clairement fait de l'Union de la Méditerranée un axe majeur de son projet de politique étrangère. Il est convaincu que l'avenir de l'Europe et de la France se joue aussi, " et peut-être d'abord, en Méditerranée ". Il a eu l'occasion de dire, à plusieurs reprises, " qu'en tournant le dos à la Méditerranée, l'Europe ne tourne pas le dos à son passé mais plutôt à son avenir ". Ce projet avancé par Nicolas Sarkozy pendant sa campagne électorale vise à " faire de la Méditerranée un espace de solidarité et de coopération dont les piliers seraient la lutte contre l'insécurité, le développement durable, l'intégration énergétique, le co-développement et la gestion concertée de l'immigration ". La Tunisie et le Maroc ont émis un avis favorable alors que, l'Algérie ne s'est pas encore prononcée sur le dit projet méditéranéen. Donc, les discussions entre Bouteflika et Sarkozy porteront sur le véritable contenu de cette Union méditerranéenne et sur la manière de construire ensemble cet espace. Le devoir de mémoire demeure une des questions qui a souvent miné les relations entre les deux pays. Le traité d'amitié algéro-français qui devait être signé à la fin de 2005 semble avoir complètement disparu des rapports et de l'actualité politique entre les deux pays. En 2006, lors de la visite effectuée à Alger par le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, le ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères, Mohamed Béjaoui avait déclaré que " depuis une vingtaine d'années, on entend parler ici et là de repentance, et nous autres Algériens, qui avons vécu les affres du colonialisme, nous pensons que le colonialisme français devrait s'insérer dans ce cadre général de repentance pour tous les crimes subis par le peuple algérien ". Le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, est revenu sur le même sujet en affirmant jeudi dernier au siège du ministère de la Défense nationale dans un discours adressé à la nation à l'occasion de la célébration du 45e anniversaire du recouvrement de l'indépendance nationale, que " le droit à la dignité des Algériens a été conquis sur un système colonial oppresseur et raciste qui a condamné le peuple algérien au mépris, à l'ignorance et à l'exploitation ". Les relations entre Paris et Alger ont été parfois tendues ces dernières années. La signature du traité d'amitié entre les deux pays, prévue fin 2005, a été gelée en raison de la polémique issue de la loi française du 23 février 2005 relative au rôle positif de la colonisation. Sur cette question de repentance, le président Sarkozy est tout à fait en phase avec la position de son prédécesseur Jacques Chirac. En effet, la France officielle version Sarkozy précise que le traité d'amitié n'est pas enterré mais ce n'est pas sa priorité. L'autre question sur laquelle les avis divergent concerne l'octroi des visas aux ressortissants algériens. Les autorités algériennes ont toujours fait savoir, et à haute voix, leur mécontentement de la gestion de ce dossier par les autorités consulaires françaises. L'Algérie ne saurait admettre les conditions humiliantes et totalement inacceptables qui prévalent dans la gestion et l'octroi des visas à ses concitoyens et qui relève d'un véritable parcours du combattant. Les autorités françaises dans ce domaine sont loin d'offrir l'illustration de ce que doit être l'amitié franco-algérienne. La seule satisfaction enregistrée a été la levée de ce qu'on appelle la consultation préalable Schengen, obligatoire pour la délivrance du visa et qui était appliquée aux Algériens. Cette décision est intervenue juste après la visite effectuée en novembre 2006 à Alger par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur. Les observateurs sont unanimes à dire que la rencontre entre Bouteflika et Sarkozy ne sera pas couronnée d'accords économiques mais la dimension économique sera naturellement au cœur des discussions entre les deux chefs d'Etat. A la veille de cette visite de Sarkozy à Alger, le porte-parole de la présidence française a souligné qu'il est certain que la coopération en matière de nucléaire civil entre l'Algérie et la France ainsi que le rapprochement Sonatrach-GDF interviendront dans les discussions. Nul doute que le dossier du Sahara occidental sera au menu des discussions entre le président Abdelaziz Bouteflika et son homologue français, Nicolas Sarkozy, en dépit de la position de la France très proche des thèses marocaines.