Si les marchés des produits alimentaires internationaux connaissent actuellement une accalmie après les envolées record de l'an dernier, les prix des produits alimentaires de base ne devraient pas redescendre en-dessous d'un palier plus élevé au cours de la décennie à venir, sous l'effet d'une demande ferme et d'un ralentissement de la croissance de la production mondiale, ont indiqué l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO) et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dans un rapport portant sur les perspectives agricoles 2012 - 2021, visant à améliorer la sécurité alimentaire mondiale. " La croissance démographique, l'élévation des revenus par habitant, l'exode rural et l'évolution des habitudes alimentaires dans les pays en développement, mais aussi les mesures en faveur des biocarburants, viennent accentuer les pressions pesant sur la demande ", souligne le rapport. Parallèlement, dans les pays développés exportateurs, la production agricole a été longue à réagir à l'augmentation des prix au cours de la décennie écoulée ajoute le rapport. Les productions nécessaires pour faire face à la progression de la demande auront un coût de plus en plus élevé. Les surfaces agricoles ne devant s'accroître que légèrement dans la décennie à venir, le rapport indique que la hausse de la production passera par des gains de productivité, et notamment par la réduction du retard des pays en développement dans ce domaine. Les perspectives prévoient que la croissance de la production agricole va se limiter à 1,7 % par an en moyenne sur les dix années à venir, contre 2 % par an ces dernières décennies. La hausse du coût des intrants, des contraintes de ressources de plus en plus grandes, l'aggravation des pressions exercées sur l'environnement et les incidences du changement climatique vont se conjuguer pour atténuer la réaction de l'offre. La progression prévue sera imputable en majeure partie aux pays en développement, qui pèseront de plus en plus lourd dans la production de la plupart des produits agricoles de base et joueront aussi un rôle croissant dans leurs échanges. "Une productivité accrue, une croissance verte et des marchés plus ouverts seront essentiels si nous voulons répondre aux besoins alimentaires et nutritionnels des générations futures", a déclaré Angel Gurría, Secrétaire général de l'OCDE. "Les pouvoirs publics doivent renoncer aux pratiques commerciales distorsives et créer un environnement favorable pour une agriculture prospère et durable fondée sur une productivité améliorée. Nous avons mis en avant nombre de ces problèmes dans notre travail sur la sécurité alimentaire réalisés pour le G20 et ces Perspectives fournissent davantage d'analyses importantes et recommandations à l'intention des gouvernements". "Pour les consommateurs, en particulier pour les millions de gens vivant dans l'extrême pauvreté, les prix alimentaires élevés ont causé des difficultés considérables. Nous devons redoubler nos efforts pour diminuer le nombre de personnes souffrant de la faim. Nous devons mettre l'accent sur l'augmentation durable d'une croissance de la productivité, notamment dans les pays en développement et plus particulièrement chez les petits exploitants agricoles", a indiqué José Graziano da Silva, Directeur général de la FAO. "La hausse des prix réels pour les produits agricoles de base offre des perspectives accrues pour les agriculteurs et le développement rural, en particulier lorsque les marchés sont ouverts et que les mécanismes de prix fonctionnent bien et que les fermiers ont la capacité de répondre à la demande". Problèmes de durabilité Les perspectives indiquent que 25 % de l'ensemble des terres agricoles sont très dégradées. Dans beaucoup de pays, la pénurie d'eau est d'ores et déjà une réalité. Plusieurs stocks halieutiques sont surexploités ou en danger. On s'accorde de plus en plus à penser que la fréquence des événements météorologiques extrêmes s'accroît et que les régimes climatiques changent dans beaucoup d'endroits du monde. Le rapport plaide donc en faveur de politiques complémentaires en matière de productivité et de durabilité, mais il estime aussi que le secteur privé jouera un rôle moteur dans le progrès de l'agriculture. Les pouvoirs publics devraient encourager de meilleures pratiques agronomiques, créer des conditions commerciales, techniques et réglementaires propices, et renforcer les systèmes d'innovation agricole (recherche, enseignement, vulgarisation, infrastructures, etc.), en étant attentifs aux besoins particuliers des petits exploitants. Créer des conditions favorables consiste aussi à s'assurer que la conjoncture se prête à l'investissement intérieur et étranger, de sorte que les pouvoirs publics devraient limiter les mesures qui restreignent les échanges et les mécanismes de soutien interne qui faussent les incitations à produire et à investir dans l'agriculture. Il faut renforcer les dispositifs nationaux d'investissement et accroître l'aide en faveur de la recherche et du développement, l'adoption des innovations et le déploiement des infrastructures dans l'agriculture, d'après le rapport. Les pays en développement devraient faciliter les investissements dans les infrastructures agricoles en milieu rural de manière à améliorer les systèmes de stockage, de transport et d'irrigation, ainsi que l'électrification et les systèmes d'information et de communication. Non moins importants, les investissements dans le capital humain nécessitent une augmentation de la dépense publique consacrée aux soins de santé, à l'enseignement et à la formation. L'action doit aussi viser à réduire les pertes et les gaspillages de produits alimentaires estimés dans une étude récente de la FAO à environ un tiers de la production d'aliments destinés à la consommation humaine dans le but de limiter l'accroissement nécessaire de la production et d'épargner des ressources.