Total a conclu un nouvel accord dans l'exploration pétrolière au Kurdistan irakien, en rachetant, hier, les parts d'une société canadienne dans un permis d'exploration, un mois après s'être attiré les foudres de Bagdad en signant un premier accord dans cette province. ShaMaran Petroleum, compagnie basée à Vancouver (ouest du Canada), a annoncé dans un communiqué avoir vendu ses 20% dans le bloc d'exploration de Taza à une filiale de Total pour 48 millions de dollars américains au comptant, plus le remboursement des frais encourus entre le 1er avril et la finalisation de la transaction. Un premier puits exploratoire, Taza-1, est actuellement en cours de forage dans cette zone, à environ 80 kilomètres au sud-ouest de la ville de Souleymanieh. Les 80% restants du projet sont détenus par la compagnie de Papouasie Nouvelle-Guinée Oil Search (60%) et le gouvernement régional du Kurdistan irakien (20%). Les opérateurs du projet étaient ShaMaran et Oil Search. Cette nouvelle transaction intervient alors que l'Irak a posé le 12 août un ultimatum à Total, en sommant la compagnie française de rompre ses liens avec le Kurdistan irakien, ou de vendre ses parts dans un champ pétrolier majeur qu'elle coexploite dans le cadre d'un consortium dans le sud de l'Irak, le gisement de Helfaya. Le Kurdistan a signé des dizaines de contrats pétroliers avec des compagnies étrangères sans l'approbation de Bagdad, qui exige que ce type de négociations passe par son ministère du Pétrole et considère comme illégal tout contrat conclu en dehors de ce circuit. Le mois dernier, Total s'était engouffré dans un bras de fer avec le gouvernement irakien, en se lançant à son tour dans l'exploration pétrolière au sein de la province. La troisième compagnie pétrolière européenne avait acquis auprès de l'américain Marathon Oil 35% de deux permis d'exploration au Kurdistan. Total, dont les origines sont liées aux débuts de l'extraction du pétrole en Irak et qui en avait chassée lors de la nationalisation du secteur en 1972, était revenu par la petite porte dans le pays après la chute de Saddam Hussein, en remportant en 2009 un appel d'offres pour le développement et l'exploitation du gisement de Helfaya, dans le sud du pays, dans le cadre d'un consortium avec des compagnies asiatiques. La production de ce gisement géant, qui recèle des réserves connues de 4,1 milliards de barils, a commencé officiellement le mois dernier, et elle devrait atteindre 535 000 barils de pétrole par jour d'ici cinq ans. Les compagnies américaines Chevron et ExxonMobil sont également en conflit avec le gouvernement irakien pour avoir signé des accords dans la province. Les relations entre Bagdad et les autorités du Kurdistan sont au plus bas en raison de différends notamment sur le dossier stratégique des hydrocarbures. En effet, les contrats de partage de production proposés par le Kurdistan sont beaucoup plus lucratifs que les contrats de service du gouvernement fédéral, qui offrent un prix fixe par baril de brut. Du coup, les compagnies pétrolières sont de plus en plus tentées de passer outre l'ire de Bagdad. Conscient du problème, le gouvernement irakien a dit étudier une modification de ses contrats pour les rendre plus attractifs. L'Irak est le deuxième producteur de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) devant l'Iran, avec 3,2 millions de barils par jour.