Le groupe Samsung, en pleine restructuration avant une succession au sommet, a annoncé hier son retrait de co-entreprises qu'il avait fondées avec les Français Total et Thales dans la pétrochimie et la défense. Samsung est un "chaebol", vaste empire diversifié constitué de dizaines de divisions, dont l'emblématique Samsung Electronics, numéro un des téléphones portables et des écrans de télévision, générant au total un revenu équivalant à 20% du produit intérieur brut de la Corée du Sud. Samsung (qui signifie "Trois étoiles") a été créé en 1938 par Lee Byung-Chull, fils d'un riche propriétaire terrien. Depuis, la petite société de commerce a étendu sa toile dans le monde entier, ses smartphones sont les plus vendus sur la planète, et son nom symbolise le formidable redressement économique et moral de la Corée du Sud après la guerre contre le Nord communiste (1950-53). Ces dernières années, le groupe actuellement dirigé par le fils de son fondateur, Lee Kun-Hee a fusionné, scindé ou introduit en Bourse des entités en vue d'assurer sa succession et de simplifier une structure de plus en plus opaque. Agé de 72 ans, le patriarche est hospitalisé dans un état stable depuis mai après une crise cardiaque. Son seul fils, Jay Yong Lee, vice-président de Samsung Electronics, doit prendre la suite mais les héritiers ont besoin d'argent frais pour acquitter l'impôt sur la succession estimé par les analystes à plus de quatre milliards d'euros. Jay Yong Lee détient pour l'heure 25,1% de Cheil Industries (ex-Everland), la holding de fait du groupe qui devrait prochainement faire son entrée en Bourse pour dégager des liquidités. Ses deux soeurs, Lee Boo-Jin et Lee Seo-Hyun, en contrôlent chacune 8,37%. Cheil Industries a lancé cette semaine un processus de consultation auprès d'investisseurs en vue de sa mise à la cote en décembre, laquelle pourrait rapporter jusqu'à 1,4 milliard de dollars, selon l'agence Dow Jones. L'intérêt semble vif, croient savoir les revues spécialisées IFR Asia et FinanceAsia. Dans le même but, la division des technologies de l'information, Samsung SDS, a récemment levé 1,1 milliard de dollars (880 millions d'euros) lors de son introduction à la Bourse de Séoul. Jay Yong Lee pourrait vendre une partie de ses parts dans cette entité début 2015, d'après le Korea Times.
Un leader mondial des Smartphones en difficulté Toutefois, selon Samsung, la transaction annoncée hier est avant tout destinée à soutenir Samsung Electronics, en perte de vitesse sur le marché des Smartphones. Le numéro un mondial, pris entre le marteau de l'iPhone 6 et l'enclume des producteurs chinois, voit sa domination et ses bénéfices s'éroder au fil des trimestres. C'est la première fois que Samsung se sépare de filiales depuis la vente de sa division automobile en 1997, en pleine crise financière en Asie. Evaluée à 1 900 milliards de wons, la transaction consiste en la vente à un autre conglomérat, Hanwha, des 57,6% détenus par Samsung Electronics et d'autres filiales dans Samsung General Chemicals et des 32,4% qu'elles détiennent dans Samsung Techwin. "La vente de ces actifs doit apporter des ressources financières à Samsung Electronics pour lui permettre d'investir dans de nouveaux projets et de consolider son activité", a justifié Samsung dans un communiqué. Elle inclut la cession de la moitié des parts de Samsung General Chemicals dans Samsung Total, une société-conjointe opérée avec Total, et la moitié des parts de Samsung Techwin dans Samsung Thales, opérée avec le groupe d'électronique de défense et de transport Thales. Pour l'analyste Kim Ji-San, ces cessions "montrent que Samsung est déterminé à se séparer d'activités annexes jugées non suffisamment compétitives et de se concentrer sur son cœur de métier, l'électronique, les finances, la construction et l'ingénierie". La grande réorganisation du groupe ne va pas sans quelques accrocs. Samsung a en effet dû renoncer voici une semaine à fusionner ses chantiers navals (Samsung Heavy Industries) et son unité de construction industrielle (Samsung Engineering, raffineries et centrales électriques), en raison du coût élevé du rachat des parts d'actionnaires hostiles au projet. Il pourrait faire une nouvelle tentative en cas de baisse du cours boursier de Samsung Engineering. Le groupe Samsung n'est pas coté. Le titre Samsung Electronics s'appréciait de 1,51% à la Bourse de Séoul, suivant l'évolution générale de l'indice Kosdaq.