Le choc que vient de causer la Turquie en abattant un chasseurbombardier russe, l'accusant d'avoir violé son espace aérien est venu aggraver la tension internationale et, dans un autre sens, affaiblir la portée de l'intervention aérienne de la Russie en Syrie à travers ses opérations de lutte contre Daech. Mais personne ne s'y trompe car Ankara ne fait qu'exprimer volontairement sa rancoeur et son irritation envers la Fédération de Russie pour avoir répondu à l'appel du président syrien Bachar el-Assad pour l'accompagner dans sa lutte contre le terrorisme. Dans cette conjoncture où le fossé ne cesse de grandir entre le gouvernement turc qui a donné toute latitude au terrorisme pour satisfaire les ambitions géopolitiques de ses alliés occidentaux et utiliser le régime syrien légal comme cible et le sol de ce pays comme un immense laboratoire de formation de terroristes, on imagine bien que la position de la Turquie en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme est tout à fait en contradiction avec le vouloir pressant de la communauté internationale d'en finir avec ce phénomène. En choisissant le dérivatif de " violation " de son espace aérien pour abattre le bombardier russe, la Turquie cherche à faire oublier des réalités qui ne peuvent pourtant être escamotées. Ankara et ses relais dans la région sont les vrais pourvoyeurs du terrorisme matériellement et financièrement. Lorsque les autorités de ce pays deviennent au su et au vu de tout le monde les complices de Daech et sombrent dans de tels engagements criminels, elles sont à présent chargées de tous les maux dans la région y compris à travers le monde, car la Turquie n'est en fait qu'un Etat qui cherche l'explosion de la Syrie et de tenter une collusion internationale. Dans de telles conditions on voit mal comment la situation pourrait évoluer dans la bonne direction pour éradiquer le terrorisme. Avec la tension qui monte déjà entre Moscou et Téhéran, toutes les conditions semblent être réunies pour une aggravation de la situation et qui ne profiterait qu'à Daech et à ses commanditaires, voire une explosion généralisée… Un bombardier russe Sukhoi Su-24 engagé dans l'opération contre le groupe terroriste de Daech a été abattu mardi sur le territoire syrien, à 4 km de la frontière turque. Selon le président russe Vladimir Poutine, l'attaque a été opérée dans l'espace aérien syrien par un missile air-air tiré par un chasseur turc F-16. Pour sa part la Turquie affirme que l'avion a violé son espace aérien. Selon la Syrie, l'attaque de la Turquie contre le bombardier russe Su-24 engagé dans une opération en Syrie est une agression flagrante contre la souveraineté syrienne et témoigne du soutien du gouvernement turc au terrorisme. Les autorités turques poursuivent délibérément une politique axée sur l'islamisation du pays. " Le problème ne réside pas dans la tragédie à laquelle nous avons été confrontés (mardi), le problème est beaucoup plus profond. Nous observons, et pas uniquement, le monde entier le voit croyez-moi que le gouvernement actuel de la Turquie depuis un certain nombre d'années mène une politique intérieure assez délibérée visant à soutenir l'islamisation de ce pays ",a indiqué hier, Vladimir Poutine. Poutine crie au " coup dans le dos porté par des complices des terroristes. Moscou. Après s'être demandé si la Turquie voulait " mettre l'Otan au service de l'EI, accuse ouvertement Ankara de soutenir Daech. " Nous ne voulons pas d'escalade, nous voulons que dans cette guerre contre Daech, chaque pays choisisse son camp. En abattant notre avion, la Turquie prend le camp de Daech ", a accusé hier matin l'ambassadeur de Russie en France Alexandre Orlov. Le diplomate a estimé que " la Turquie hélas joue un rôle très ambigu dans ce conflit. Elle se dit faire partie de la coalition contre Daech mais en fait c'est un Etat complice. Et d'énumérer toutes les armes achetées par Daech qui transitent par la Turquie, l'achat de pétrole aux terroristes de l'EI. Ce n'est pas surprenant, compte tenu de l'information disponible sur l'intérêt financier direct de certains fonctionnaires turcs liés aux livraisons de produits pétroliers provenant des entreprises appartenant à l'EI, a indiqué le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev. Cela explique que le pétrole que vend l'EI va sans doute en Turquie. Pour un ex-commandant de l'Otan : " Il faut être conscient que l'EI n'est pas un groupe terroriste, c'est un groupe terroriste sunnite. Ce qui veut dire qu'il attaque les chiites et sert les intérêts de la Turquie et de l'Arabie saoudite, même s'il les menaces ". Wesley Clark ajoute : " Le fait que ni la Turquie, ni l'Arabie saoudite ne veulent qu'un pont soit créé par l'Iran, l'Irak, la Syrie et le Liban qui isolerait la Turquie et l'Arabie saoudite. Voilà le contexte stratégique de la situation ". Les autorités russes sont de fait convaincues que l'attaque contre leur avion a été planifiée par Ankara. La Turquie ne pouvait pas ne pas savoir qu'il s'agissait d'un avion russe. Le coup était planifié à l'avance et bien réfléchi. Aussi Ankara s'est-il adressé tout de suite mardi à l'Otan. Tout explique selon un membre de la Douma russe qu'il s'agissait d'une riposte à l'opération militaire russe en Syrie. " Il était prévisible que l'Otan soutienne la Turquie, Obama a déclaré qu'elle avait le droit de protéger sa frontière. Mais en réalité il s'agit d'une riposte à notre opération militaire en Syrie ", a indiqué le président de la commission des Affaires étrangères de la Douma. Ainsi, le Kremlin doute de la détermination de la Turquie dans la lutte antiterroriste. Le porte-parole du Kremlin a fait remarquer hier qu'en ce qui concerne la Turquie, " la coopération peut être remise en doute, au moins à ce stade. Mais, bien sûr, cela ne concerne pas les autres membres de la coalition ". Au lendemain de cette attaque contre le bombardier russe, abattu dans l'espace aérien syrien, la communauté internationale est dans l'absolue nécessité d'évaluer le rôle de la Turquie, de l'Arabie saoudite et du Qatar qu'ils ont joué et jouent toujours dans la crise syrienne durant ces cinq dernières années. LA TURQUIE SE REFUGIE DERRIÈRE L'OTAN Selon le représentant russe auprès de l'Otan, la réunion d'urgence du Conseil de l'Atlantique nord représentait un "théâtre d'ombres" sur fond de menace générale du terrorisme. La réunion du Conseil de l'Atlantique nord tenue mardi dernier aurait pu être le moment de vérité pour l'Alliance, car l'avion russe a été abattu par un des principaux alliés, un pays impliqué dans les efforts internationaux de lutte contre le terrorisme, a déclaré mardi soir à Bruxelles le représentant russe auprès de l'Otan, Alexandre Grouchko. "Néanmoins, le moment de vérité n'a pas eu lieu. Dans son discours, le secrétaire général de l'Otan n'a pas condamné l'attaque turque de l'avion russe, qui ne constituait et ne pouvait constituer aucune menace pour la sécurité de la Turquie, et qui se trouvait dans l'espace aérien syrien", indique M.Grouchko0 En outre, le représentant russe estime que la Turquie a forcé l'Otan à justifier ses actions, tout en s'abritant derrière le principe de solidarité de l'Alliance. "En fait, Ankara a atteint son but, en s'abritant derrière la fameuse solidarité de l'Otan, et a forcé l'Alliance à justifier ses actions illégales, qui sapent non seulement les efforts communs dans la lutte contre l'EI, mais créent de nouveaux risques pour la sécurité nationale des pays liés à la Turquie en vertu des obligations des alliés", a déclaré Alexandre Grouchko, en commentant les résultats de la réunion. Selon M.Grouchko, il est de nouveau devenu clair que "l'Otan est guidée non par des principes, dont ses représentants aiment tant parler, mais par l'opportunisme politique". Ce "théâtre d'ombres" devient particulièrement étrange suite à la résolution récemment adoptée par le Conseil de sécurité de l'Onu, qui appelle explicitement les Etats à lutter contre la menace du terrorisme "par tous les moyens", ajoute Alexandre Grouchko.