La paix définitive et irréversible aura-t-elle droit de cité un jour dans le Nord-Mali et plus particulièrement à Kidal, foyer incandescent des multiples rébellions qui ont embrasé le pays et où, rien que la semaine dernière, trois militaires français de la force Barkhane ont perdu la vie suite à l'explosion d'une mine. Il y a de quoi se poser la question et plutôt deux fois qu'une, tant les regains de violence sapent régulièrement les fondements du fragile édifice que représente la paix dans cette région. Ce fut de nouveau le cas hier 18 avril dans la métropole du grand Nord-Mali où une manifestation a eu lieu contre la MINUSMA, la force antiterroriste, les arrestation et perquisition arbitraires menées ces derniers temps par les militaires de la force Barkhane. La manifestation a vite dégénéré et basculé dans la violence entre les jeunes et les casques bleus. "Les manifestants se sont dirigés vers l'aéroport et ont commencé à secouer les fils barbelés qui entourent la piste, c'est alors que des agents de la MINUSMA ont fait des tirs de sommation", a expliqué un habitant de la ville qui a ajouté que les manifestants sont parvenus à accéder à la piste d'atterrissage et ont répondu par des jets de pierres aux tirs de sommation de la mission onusienne avant de saccager des installations, ce qui entrainera des tirs à balles réelles. Bilan provisoire de cette matinée houleuse : outre les dégâts matériels, deux morts et des blessés. Cette nouvelle poussée de fièvre montre une fois de plus les limites de l'accord de paix signé en grande pompe en juin 2015 entre le gouvernement malien et les différents groupes touareg protagonistes du conflit qui depuis 2012 mine le pays. "La signature de ce texte est une étape nécessaire mais pas suffisante, qui marque le début du règlement de la crise. Sur le terrain, tout reste à faire", affirmait alors un haut gradé de l'opération Barkhane. Il ne croyait pas si bien dire, car après une année, cet accord se résume à une compilation de vœux pieux malgré le timide redéploiement de l'administration et de l'armée dans cet incontrôlable septentrion. On en est toujours à une insupportable situation de ni guerre ni paix ponctuée par des escarmouches et des attaques en tous genres. Mais comment pouvait-il en être autrement quand on sait que pour la signature de cet accord de paix il a fallu forcer la main à certains chefs de la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA) qui ne se seront assis à la table des négociations qu'à contrecœur ? Et qui pis est, derrière cette unité de façade de la CMA se cachait et se cache encore un amas d'intérêts hétéroclites et de desseins contradictoires. Au milieu de cet incroyable fatras, l'échafaudage de la paix aura bien de la peine à tenir debout. Mais qu'à cela ne tienne, car ce chantier des plus ambitieux, les ouvriers sont nombreux et déterminés à le mener à son terme.