Le Team Sky contrôle totalement ce Tour de France 2016. A l'heure d'aborder les Alpes, on peut se demander si l'équipe de Chris Froome a une réelle faiblesse. Car si les adversaires du tenant du titre ne parviennent pas à le mettre en difficulté, c'est avant tout la faute des équipiers du maillot jaune, qui n'ont rien laissé passer depuis le départ. "Un Tour attentiste", "L'ennui règne en maitre", "Chris Froome n'est pas attaqué". Les commentaires sur ces deux premières semaines de Tour de France dessinent une même critique : celle d'une Grande boucle verrouillée à double tour par Christopher Froome et ses hommes en noir de la Sky. La réflexion est légitime à la vue des images et du relatif faible nombre d'offensives lancées contre le maillot jaune. Frilosité ? Petits calculs pour préserver une place d'honneur au général ? Peut-être un peu. Mais ce serait trop rapidement oublier le travail de sape de l'escouade de Dave Brailsford autour de son leader. Car la supériorité du tenant du titre ne serait peut-être pas grand-chose sans l'appui de ses lieutenants. Et c'est là que se situe l'une des grandes forces de la Sky. Chacun des équipiers de Froome se met entièrement à son service, alors que plusieurs d'entre eux seraient considérés comme des leaders sous un autre maillot. Les performances actuelles de Richie Porte, ex-coéquipier de luxe de Froome, à la BMC en sont un exemple parfait. Si les Bardet, Aru et autres Valverde n'ont pas pu faire la différence dimanche dans le Grand Colombier, c'est parce qu'un coureur comme Wout Poels, vainqueur de Liège-Bastogne-Liège fin avril, est capable de faire tourner les jambes au niveau des tous meilleurs, d'imprimer un train d'enfer dans les cols, au point d'en faire exploser certains et de dissuader les autres de tenter une offensive.
La force du nombre Le Néerlandais n'est qu'une des nombreuses cartes dont dispose la Sky. L'effectif réuni pour ce Tour 2016 n'usurpe pas sa réputation d'armada. La gestion des forces, liée à l'absence totale d'ambitions personnelles, offre à l'équipe anglaise toute latitude pour gérer le rythme du peloton, sans puiser abusivement dans les ressources de ses ouailles. A Bagnères-de-Luchon, Sergio Henao avait accompagné Froome jusqu'au sommet de Peyresourde avant qu'il ne fasse son numéro de descendeur en solo. Dans l'étape du Ventoux, le maillot jaune avait pu compter sur un train complet avec Henao, Thomas, Poels, Nieve et Landa, tous classés entre la 24e et la 44eplace de la 12e étape. Au lac de Payolle, seul Landa n'entourait pas Froome sur la ligne d'arrivée. Ces coureurs de premier plan, utilisés dans un rôle bien défini, n'ont pas besoin de rouler à bloc tous les jours pour préserver une place au général et peuvent garder en fraicheur pour l'étape suivante. Quand Poels arrive avec douze minutes de retard au Lioran, Henao et Nieve assurent les arrières. Henao craque dans le Grand Colombier ? Poels est là pour calmer les ardeurs de la concurrence. La force collective de cette équipe, parfaitement préparée, force - et impose - le respect. Même sur le plat, les rouleurs que sont Stannard, Rowe et Kiryienka n'ont pas de bon de sortie. Ils sont eux aussi présents pour entourer le double vainqueur du Tour, et c'est tout. Quitte à ne pas pouvoir esquisser la moindre attaque qui pourrait leur titiller les jambes pour viser une victoire d'étape. Le sacrifice de chacun pour un but ultime. Avec une stratégie parfaitement définie en amont - qui n'a jamais été mise en défaut jusqu'à maintenant - et un groupe aux qualités sans équivalence sur le plateau de ce Tour, difficile de rivaliser et de tenter de briser cette formidable armure autour de Froome. Même les principaux rivaux ne peuvent que reconnaitre la supériorité de la Sky. "L'équipe du leader est vraiment très, très bonne", admettait Alejandro Valverde après la 15e étape. Un constat de domination qui ne doit toutefois pas devenir celui de la résignation, alors que le menu sera particulièrement copieux jusqu'à samedi dans les Alpes.