Le pionnier japonais des jeux vidéo Nintendo a affiché une perte nette de 24,53 milliards de yens (211 millions d'euros) au premier trimestre de son exercice 2016-2017, avant que ne soit lancée l'application Pokemon Go dont les effets sur l'année devraient aussi être limités selon le groupe. Le chiffre d'affaires des trois premiers mois de l'exercice comptable débuté le 1er avril a dévissé de 31,3% sur un an à 61,97 milliards de yens et le groupe a également déploré une perte d'exploitation de 5,13 milliards de yens. Il a toutefois maintenu ses prévisions annuelles. Si Nintendo s'est félicité de bonnes ventes de quelques jeux pour les consoles de poche 3DS, les acheteurs ne se sont pas précipités sur ces petites machines à deux écrans qui n'ont été écoulées qu'à 940 000 exemplaires en trois mois. Pire encore du côté de la console de salon Wii U qui n'a guère profité du succès du jeu Splatoon. Seulement 220 000 Wii U ont été achetées durant le trimestre, soit 53% de moins qu'un an plus tôt. Même les petites figurines "amiibo" sur lesquelles mise Nintendo pour donner plus d'attractivité à ses jeux et consoles n'ont pas réalisé d'exploit, en raison d'un nombre limité de nouveautés, a expliqué le groupe. Quant aux téléchargements, ils n'ont pas davantage changé la tournure générale des affaires, du fait là aussi d'un manque de titres inédits. Le groupe plus que centenaire, spécialiste des cartes, reste toutefois plutôt optimiste pour l'année, tablant sur le lancement de nouveaux titres Pokemon pour ses consoles en novembre, des jeux attendus qui marqueront les 20 ans de ces monstres de poche. La mystérieuse console NX (nom provisoire), qui selon des rumeurs de presse pourrait être un hybride entre modèle fixe et de poche, devrait aussi redonner du tonus aux ventes en toute fin d'exercice, espère Nintendo. Le groupe n'attend cependant pas une envolée de ses recettes grâce à Pokemon Go, l'appli pour Smartphone qui déchaîne les foules dans le monde depuis début juillet, car la maison de Kyoto (ouest) n'est pas directement impliquée dans le développement et la gestion de ce jeu pour Smartphone. Nintendo peut cependant en espérer quelques retombées positives découlant des revenus de la société affiliée Pokemon Company, de ses ventes d'autres jeux Pokemon ou de produits dérivés. Nintendo précise cependant qu'il va lui-même lancer prochainement comme prévu d'autres applications pour Smartphone, dans le cadre d'une première série de cinq débutée en mars dernier avec le réseau social ludique Miitomo, en partenariat avec la société japonaise DeNA. Nintendo envisage aussi une diversification dans le cinéma d'animation via une adaptation des aventures de son plombier Mario entre autres. Pour l'ensemble de l'année qui sera bouclée en mars 2017, Nintendo table toujours sur un chiffre d'affaires a peu près stable sur un an, à 500 milliards de yens, et espère un gain d'exploitation de 45 milliards de yens (+37%), ainsi qu'un bénéfice net doublé sur un an, à 35 milliards de yens.
L'action plonge de 18% L'action Nintendo, qui avait bondi de plus de 100% sur fond de fièvre Pokemon Go, a rechuté de 18% lundi, après que le groupe a dit s'attendre à un impact "limité" sur ses résultats du succès planétaire de ce jeu de chasse virtuelle. Le titre est tombé à 23 220 yens à l'issue des échanges à la Bourse de Tokyo, soit un recul de 5 000 points (-17,71%), le maximum autorisé pour la journée. Le géant japonais, inventeur de ces "pocket monsters" (monstres de poche) il y a deux décennies, a rappelé, dans un communiqué, ne pas être directement impliqué dans le divertissement: c'est le studio américain Niantic qui a développé cette application gratuite (mais avec des fonctionnalités payantes en sus). Nintendo a pour sa part investi dans Niantic et détient 32% des droits de vote dans The Pokemon Company, qui gère la marque Pokemon et "recevra des droits de licence ainsi qu'une indemnité pour sa collaboration dans le développement et la gestion de l'application", a expliqué la firme. Elle a par ailleurs conçu un accessoire portable, le Pokemon Go plus, qui se met au poignet et permet de participer au jeu sans regarder son smartphone. Du fait de cette faible implication, Nintendo, qui présentera ses résultats trimestriels mercredi, "ne modifie pas à ce stade ses prévisions financières annuelles" annoncées fin avril malgré le phénoménal succès remporté par le jeu. Il avait alors indiqué espérer un doublement de son bénéfice net annuel en 2016-2017 à 35 milliards de yens, pour un chiffre d'affaires quasi inchangé à 500 milliards de yens.
Raison gardée "Ce communiqué vise à inciter le marché à revenir à la raison", ont commenté les analystes de Morgan Stanley MUFG dans une note citée par l'agence Bloomberg. A la suite de la sortie du jeu, l'action Nintendo avait doublé de valeur en huit séances, dépassant les 30 000 yens en début de semaine dernière, et sa capitalisation boursière avait temporairement dépassé celle de Sony. "Je pense que Nintendo a publié cette déclaration car le groupe n'était pas à l'aise avec une telle envolée du titre", a renchéri Hideki Yasuda, analyste chez Ace Research Institute. Selon lui, on assiste actuellement à "une période d'ajustement" de l'action, qui pourrait bientôt repartir à la hausse. "Auparavant, on avait l'impression que Nintendo ne pouvait pas réussir dans les Smartphones", a-t-il souligné. Longtemps, la maison centenaire n'a en effet pas voulu s'aventurer sur ce créneau. Elle ne s'est convertie que tout récemment, contrainte d'opérer un virage stratégique face à de piètres ventes de consoles et de jeux. Donc, même si les retombées de Pokemon Go restent incertaines, ajoute l'analyste, ce jeu ouvre une nouvelle ère pour le créateur de Mario et Zelda. Disponible dans plus de 40 pays, dont le Japon depuis vendredi, Pokemon Go a déjà séduit des millions d'adeptes. Après avoir chassé Pikachu et autres créatures imaginaires sur leurs consoles, les joueurs peuvent désormais les capturer sur leurs Smartphones grâce à la réalité augmentée, une technologie qui fait apparaître des éléments virtuels dans le monde réel. Le phénomène est tel que les autorités de nombreux pays ont lancé des appels à la vigilance et rappelé les règles de sécurité de base dans l'espace public, certains utilisateurs prenant des risques inconsidérés pour mettre la main sur des Pokemon.