La banque britannique Lloyds Banking Group a annoncé sa première acquisition depuis 2008 avec le rachat de l'activité cartes de crédit au Royaume-Uni de l'américain Bank of America. Le groupe va débourser 1,9 milliard de livres (2,3 milliards d'euros) pour cette opération qui est la première pour la banque depuis qu'elle a été sauvée de la faillite par l'Etat dans la foulée de la crise financière de 2008. En rachetant MBNA, filiale du géant bancaire Bank of America, Lloyds met la main sur une activité à forte valeur ajoutée, qui lui permettra de porter sa part de marché dans le secteur des cartes de crédit à 26%, contre 15% actuellement, selon un communiqué. La marque MBNA continuera d'exister indépendamment de celle de Lloyds. Cette acquisition, qui devrait être bouclée d'ici la fin du premier semestre 2017 une fois les feux verts réglementaires obtenus, va augmenter le chiffre d'affaires de la banque de 650 millions de livres par an et améliorer nettement ses marges. L'opération est conforme à "notre vision stratégique de croître en tant qu'établissement recentré sur la banque de détail et commerciale au Royaume-Uni", a expliqué Antonio Horta-Osorio, directeur général de Lloyds Banking Group, cité dans le communiqué. Certains analystes mettent toutefois en garde contre les risques qui pèsent sur le marché des cartes de crédit, qui est très dépendant de l'évolution de la consommation des ménages. Cette acquisition intervient "avant un possible ralentissement de l'économie britannique une fois que seront connus les termes de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne", prévient Gary Greenwood, analyste chez Shore Capital Markets. Le lancement des négociations sur le Brexit prévu d'ici fin mars 2017 et la chute récente de la livre qui font redouter une poussée de l'inflation dans les prochains mois pourraient ainsi peser sur la consommation et par ricochet sur l'utilisation des cartes de crédit, qui peuvent financer toutes sortes de biens de consommation, de l'alimentation à l'achat d'une voiture. "Perspectives économiques incertaines" Sans compter que si le chômage augmente, le risque est de voir de plus en plus de consommateurs avoir du mal à rembourser la dette contractée à travers leurs cartes de crédit. "Le Brexit rend les perspectives économiques très incertaines et Lloyds renforce son exposition à la dette des consommateurs britanniques au pire moment", note Neil Wilson, analyste chez ETX Capital. Il ajoute en outre que cette acquisition, financée sans endettement ni levée de fonds, va solliciter la trésorerie de la banque, alors même que ses résultats financiers sont encore loin d'être exceptionnels. Le groupe parvient à améliorer doucement ses profits, comme l'ont montré ses derniers résultats sur les neuf premiers mois de l'année. Il traîne toutefois encore quelques casseroles comme le scandale des assurances-crédit défectueuses PPI qui l'ont contraint, comme la plupart des autres banques britanniques, à de lourdes dépréciations ces derniers trimestres. Le prix d'achat de MBNA inclut d'ailleurs 240 millions de livres destinés à couvrir les futurs dédommagements liées à cette affaire. Le marché saluait de son côté la nouvelle mais en se gardant de toute euphorie, l'action prenant 1,20% à 63,30 pence à la Bourse de Londres vers 09H50 GMT dans un marché en légère baisse. Pour Lloyds Banking Group, il s'agit d'une étape importante alors que la banque sort à peine d'une cure d'austérité drastique qui s'est traduite notamment par la suppressions d'une cinquantaine de milliers d'emplois en moins d'une décennie. La banque s'est recentrée sur ses activités de banque de détail et de prêt aux entreprises au Royaume-Uni et a vu l'état britannique progressivement se désengager de son capital. Ce dernier détient encore un peu moins de 7% du capital mais des informations de presse suggéraient récemment qu'il pourrait solder sa participation en début d'année prochaine.