Les risques pesant sur la croissance mondiale ajoutés à la récente baisse des prix du pétrole semblent augurer d'un statu quo à l'issue de la réunion de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), vendredi à Vienne. En effet, les yeux des 13 pays membres du cartel seront tournés, vendredi, vers les Etats-Unis, au bord de la récession alors qu'ils représentent un quart de la consommation mondiale. "Ce serait très surprenant que l'Opep augmente sa production vu les incertitudes économiques actuelles et l'impact qu'aurait une récession américaine sur la demande pétrolière mondiale", remarque Bill Farren-Price, analyste de Medley Global Advisors. D'ailleurs, une source nigériane de l'Opep fait valoir qu'"il n'y a pas besoin d'augmenter la production à l'heure actuelle", notamment parce que "les prix ont baissé". De leur côté les Saoudiens, membres les plus influents de l'Opep, ont poliment opposé une fin de non recevoir au président George W. Bush qui, lors de sa récente visite dans le Golfe, avait demandé au premier producteur mondial d'augmenter sa production. Le secrétaire général de l'Opep Abdallah Al-Badri a indiqué, il y a quelques jours, que l'Opep est "prête" à tout moment à "augmenter sa production si les fondamentaux le justifient", mais "il n'y a pas de manque" de pétrole actuellement, a-t-il ajouté. Les membres de l'Opep répètent depuis plusieurs mois que le marché est bien approvisionné et n'a pas besoin de plus de brut. Ils attribuent régulièrement l'envolée des prix, l'an dernier, aux spéculateurs, aux tensions géopolitiques, aux problèmes de raffinage aux Etats-Unis. En outre, l'économie mondiale est moins vulnérable aux prix du pétrole qu'elle ne l'était par le passé. L'Opep devrait donc "être très réticente à l'idée de mettre plus de pétrole sur le marché", juge Mike Wittner, analyste de la Société Générale. Par ailleurs, un ralentissement de la demande américaine pourrait peser sur celle des pays émergents, dont la demande pétrolière augmente à grande vitesse alors que celle des pays riches stagne. "Cette année, c'est vraiment l'Asie et le Moyen-Orient qui vont tirer la demande. Beaucoup de signes montrent que la demande chinoise va rester forte, mais les exportateurs du pays devraient souffrir du ralentissement économique", ce qui pourrait peser sur la consommation mondiale d'or noir, remarque Bill Farren-Price. L'autre grande raison, qui fait douter d'une hausse de production vendredi, est la chute de 10 dollars du baril de brut depuis son record du 3 janvier (100,09 dollars). Mercredi, il est tombé jusqu'à 86 dollars, même s'il a rebondi à presque 91 dollars vendredi, alors que les marchés boursiers de la planète reprenaient des couleurs après le mini-krach du début de semaine. Si la situation économique se dégradait dans le monde, faisant reculer les prix jusqu'à "75 ou 80 dollars le baril fin février-début mars, et sachant que la demande baisse généralement au deuxième trimestre", Francis Perrin, directeur de la rédaction de Pétrole et gaz arabes, juge même une baisse de production "tout à fait possible" lors de la réunion suivante, prévue le 5 mars. Pour Mike Wittner, l'Opep pourrait se contenter de diminuer légèrement sa production discrètement, sans toucher à ses objectifs officiels de production.