Le risque d'un affrontement à Washington autour du plafond de la dette commence à inquiéter les gérants américains qui redoutent une répétition du "shutdown" de 2011 quand la fermeture prolongée des administrations fédérales et l'abaissement subséquent de la note de crédit des Etats-Unis avaient provoqué une chute de plus de 15% de l'indice S&P-500 à Wall Street. Les investisseurs augmentent la part des liquidités dans leurs portefeuilles et achètent des produits de couverture à l'approche du 29 septembre, date fixée par le Trésor pour que le Congrès vote un relèvement du plafond de la dette indispensable à la poursuite du financement de l'Etat fédéral. Une nouvelle impasse budgétaire pourrait déclencher une récession et provoquer la première véritable correction de Wall Street sous l'ère Trump. Le S&P-500, l'indice de référence des gérants américains, n'a pas corrigé de plus de 5% depuis plus d'une année, ce qui ne s'était plus vu depuis 20 ans. Le gouvernement compte sur l'élan de solidarité après les inondations historiques au Texas pour faire pression sur les élus du Congrès à leur retour à Washington après un mois de vacances. Le président Trump a demandé une enveloppe de 7,85 milliards de dollars (6,6 milliards d'euros) pour financer la reconstruction des zones sinistrées, mais le déblocage de ces fonds pourrait être compromis si le plafond de la dette n'est pas relevé. Selon la banque Goldman Sachs, la probabilité d'un "shutdown" du gouvernement fédéral est tombée à 35% contre 50% il y a encore deux semaines, avant les inondations. Le relèvement du plafond de la dette, estiment les analystes de Goldman dans une note publiée mardi, pourrait être inclus dans un texte législatif plus large sur le secours aux sinistrés. "Pour autant, le problème ne sera peut-être que remis à plus tard", ajoutent-ils. "Le président continue de brandir la menace d'une fermeture des administrations fédérales si le mur (avec le Mexique) n'est pas financé, et le prolongement attendu de l'autorisation de dépense ne sera probablement que temporaire, décalant le risque d'un 'shutdown' aux derniers mois de l'année."
Limiter le risque Les gérants font aussi preuve de prudence. "On a un environnement politique très conflictuel, pas seulement entre droite et gauche mais au sein même du Parti républicain", rappelle Jeff Klingelhofer, l'un des gérants du Thornburg Strategic Income Fund qui représente 1,1 milliard de dollars. "Si le ton monte, les marchés vont prendre peur et nous sommes en train de limiter le risque en augmentant nos liquidités et en réduisant les maturités de notre portefeuille obligataire." David Ader, stratège chez Informa Financial Intelligence, note que les rendements des bons du Trésor sont supérieurs d'environ 10 points de base à leur niveau normal à cause des craintes sur le plafond de la dette. "Les gens les évitent", dit-il. Le président Trump a reproché à la majorité républicaine de ne pas lier le relèvement du plafond à un texte de loi facilitant le renvoi des employés du département des Anciens Combattants pour mauvaise conduite, qualifiant la situation de "foutoir" dans un tweet du 24 août. Interrogé de son côté sur la possibilité d'intégrer le relèvement du plafond dans un texte de loi sur les secours aux victimes de la tempête tropicale Harvey, le secrétaire au Trésor Mnuchin a dit jeudi au Wall Street Journal : "Tout ce que je veux, c'est qu'il soit relevé." "Sans relèvement du plafond de la dette, je ne suis sûr qu'on puisse acheminer des fonds au Texas ce mois-ci pour reconstruire", a-t-il insisté dimanche sur la chaîne Fox News. Rassuré par de solides résultats de sociétés - les bénéfices des entreprises du S&P-500 ont augmenté de 12,1% en moyenne au deuxième trimestre, dépassant pour 74% d'entre eux le consensus des analystes - le marché boursier a fait peu de cas des tensions avec la Corée du Nord, ravivées par un nouvel essai nucléaire dimanche, ou des diverses enquêtes sur l'ingérence présumée de la Russie dans l'élection présidentielle de 2016. Mais sa hausse quasi continue cette année (+11% pour le Dow Jones et le S&P-500 depuis le 1er janvier) le rend vulnérable à une correction d'ampleur si le Congrès ne vote pas la hausse des dépenses d'ici la fin du mois, avertit Matt Watson, co-gérant du James Balanced Golden Rainbow Fund qui gère 3,2 milliards de dollars. En conséquence, son fonds a lui aussi augmenté sa part de cash et se tient prêt à acheter des obligations de maturité plus courte. "Le marché boursier est considérablement surévalué alors il est judicieux d'alléger le risque en cette période", dit-il. Sur la semaine écoulée, le Dow Jones a pris 0,80%, le S&P-500 1,37% et le Nasdaq 2,71%. Le marché sera fermé lundi pour le Labor Day, la fête du Travail aux Etats-Unis.
Les Bourses en Europe baissent Les principales Bourses européennes baissent lundi en début de séance et les valeurs refuges s'apprécient dans le sillage de l'essai nucléaire nord-coréen annoncé la veille mais la réaction des marchés reste modérée, suivant un schéma désormais bien rodé. À Paris, l'indice CAC 40 cède 0,54% à 5.095,41 points vers 07h30 GMT. À Francfort, le Dax perd 0,54% et à Londres, le FTSE abandonne 0,25%. L'indice EuroStoxx 50 de la zone euro abandonne 0,53%, le FTSEurofirst 300 0,57% et le Stoxx 600 0,56%. Tous les indices sectoriels sont dans le rouge, à commencer par les banques (-0,80)%. Du côté des valeurs individuelles, Fiat Chrysler recule de 1,27% après les déclarations de son administrateur délégué, Sergio Marchionne, déclarant que son groupe n'avait pas reçu d'offre d'achat et ne travaillait pas à une "grosse fusion". Gemalto cède 5,20%, la plus forte baisse du Stoxx 600 après l'abaissement par plusieurs intermédiaires de leur objectif de cours de l'action du spécialiste de la sécurité numérique, qui a reporté vendredi son nouveau plan stratégique pluriannuel au premier semestre 2018 après quatre avertissements sur ses résultats en moins d'un an. Contre la tendance, Coface prend 5,75% sur des informations faisant état d'un intérêt d'un groupe chinois pour la filiale d'assurance-crédit de Natixis.
L'or à un pic de près d'un an La Bourse de Tokyo a fini sur un repli de 0,93% et l'indice MSCI regroupant les valeurs d'Asie et du Pacifique (hors Japon) cède 0,77%. Séoul a cédé 1,19% mais Shanghai a pris 0,38%. En dehors des marchés actions, le yen, les emprunts d'Etat et l'or, habituelles valeurs refuges en période de tension géopolitique, sont orientés à la hausse et les contrats à terme sur les indices de Wall Street préfigurent une poursuite de la baisse mardi, les marchés américains étant fermés ce lundi pour le "Labor Day". Très prisé dans ce genre de scénario, l'or a ainsi atteint vers 07H00 GMT 1.340,15 dollars, à son plus haut niveau depuis septembre 2016, quand l'incertitude avant les élections américaines de novembre laissaient les marchés sur leur garde. Le yen et le franc suisse s'inscrivaient également en nette hausse. Sur le marché des changes, le dollar cède 0,2% face à un panier de devises de référence et l'euro se traite autour de 1,1890 dollar, en hausse de 0,3%. Le président américain, Donald Trump, a réaffirmé dimanche son soutien à la Corée du Sud après le sixième essai nucléaire réalisé par Pyongyang, le plus puissant de l'histoire de la Corée du Nord, en déclarant que "toute menace contre les Etats-Unis ou leurs territoires, y compris Guam, ou nos alliés sera suivie d'une réaction militaire massive". L'armée sud-coréenne a procédé lundi à un exercice de tir de missiles et annoncé le déploiement temporaire de quatre batteries supplémentaires du système antimissiles américain THAAD en réponse à l'essai effectué la veille par son voisin. Ce nouvel accès de tension sur le dossier coréen occulte en partie les préoccupations liées aux dégâts causés par la tempête Harvey en Texas et en Louisiane, tout en favorisant la volatilité sur les cours du brut. Pénalisé par le repli sur l'or, le Brent cède 0,97% à 52,24 dollars le baril alors que le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) prend 0,15% à 47,36 dollars, soutenu par l'interruption prolongée d'une partie de la production du Golfe du Mexique. Sur les marchés européens, l'absence des investisseurs américains pourrait limiter les volumes de transactions, tout comme l'attente de la réunion de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) jeudi dans un contexte dominé par la solidité de la croissance, la faiblesse de l'inflation et la vigueur de l'euro.
L'euro monte face au dollar L'euro gagnait face au dollar lundi alors que le ton monte entre les Etats-Unis et la Corée du Nord, faisant bondir l'or à son plus haut depuis septembre 2016 et profitant aux autres valeurs refuge. Vers 09H00 GMT (11H00 HEC), l'euro valait 1,1917 dollar contre 1,1862 dollar vendredi vers 21H00 GMT. La devise européenne baissait face à la devise nippone, à 130,52 yens contre 130,81 yens vendredi soir. Le dollar reculait aussi face à la monnaie japonaise à 109,54 yens contre 110,28 yens vendredi soir. Vers 09H00 GMT, la livre britannique baissait face à l'euro, à 92,10 pence pour un euro, comme face au dollar, à 1,2940 dollar pour une livre. La monnaie suisse montait face à l'euro, à 1,1398 franc pour un euro, et grimpait face au dollar, à 0,9567 franc pour un dollar. La devise chinoise valait 6,5215 yuans, à son plus haut niveau depuis mai 2016, contre 6,5584 yuans pour un dollar vendredi vers 15H30 GMT. L'once d'or s'échangeait pour 1.335,89 dollars.