L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et ses partenaires, soit 24 pays qui représentent plus de 50% de la production mondiale, se sont réuni vendredi et samedi à Vienne pour discuter de l'avenir de leur accord de 2016 qui vise à limiter leur production dans l'objectif de redresser les prix du brut. La rencontre s'annonce tendue entre l'Arabie saoudite et la Russie, d'une part, favorables à un assouplissement des quotas, et l'Iran, l'Irak et le Venezuela, d'autre part, qui refusent d'approuver une quelconque hausse de la production. Alors que l'Iran avance qu'il ne croit pas à une révision à la hausse des objectifs de production mondiale de pétrole, l'Arabie saoudite plaide en faveur d'une augmentation de la production de pétrole de l'OPEP. "Nous ferons tout notre possible pour maintenir la stabilité du marché et nous assurer qu'il n'y aura pas de pénurie de pétrole", a affirmé le ministre saoudien des Affaires étrangères Abdelaziz ben Salmane. Depuis début 2017, l'OPEP et dix autres producteurs non membres, dont la Russie, limitent leurs extractions dans le but de faire remonter les cours et de maintenir un marché à l'équilibre. Tandis que l'offre mondiale pourrait être perturbée par les problèmes de production du Venezuela et les sanctions américaines contre l'Iran, l'Arabie saoudite et la Russie ne cessent d'avancer de vouloir mettre sur la table une proposition de hausse des seuils de production lors de leur réunion dans la capitale autrichienne. L'Arabie Saoudite et la Russie donnent ainsi l'impression d'être les seuls producteurs à pouvoir augmenter leurs exportations dans les semaines qui viennent. Selon la banque américaine Citigroup, l'Arabie Saoudite aurait 2,12 millions b/j de capacité supplémentaire de production contre 400.000 b/j pour la Russie. Mais pour ménager les opposants à toute hausse de la production, l'Arabie saoudite suggère d'augmenter la production de l'OPEP et de ses partenaires mais sans toucher aux objectifs fixés par l'accord de limitation de 2016, et ce, travers une réallocation au sein de l'OPEP de quotas de production non utilisés par certains pays, comme le Venezuela. Quant aux autres pays pétroliers, la majorité préfère d'abord voir les prix augmenter de manière substantielle, avant de changer de cap. En réaction à un éventuel assouplissement des quotas, le Venezuela et l'Iran ont demandé à l'Opep de maintenir son unité, affirmant que toute augmentation de la production des autres membres au détriment de leur part de marché va à l'encontre des statuts de cette organisation pétrolière, destinés à protéger les intérêts de chaque pays membre. Les cours pétroliers, qui avaient plongé à moins de 30 dollars le baril en 2016, sont revenus à plus de 80 dollars en mai dernier, soit au plus haut depuis 2014. La chute de la production du Venezuela pour cause de crise économique et les sanctions américaines qui menacent celle de l'Iran ont favorisé cette remontée.
La production iranienne et vénézuélienne au plus bas L'Iran, selon son ministre de l'Energie, Bijan Namdar Zanganeh, produit actuellement 3,8 millions b/j et pourrait en produire 100.000 barils de plus quotidiennement. Ce volume de production, freiné par les sanctions européennes et américaines, n'a jamais été aussi bas depuis deux ans. Les Etats-Unis se sont retirés en mai de l'accord sur le nucléaire iranien et ont annoncé de nouvelles sanctions contre ce pays qui est le 3ème plus grand producteur de pétrole de l'OPEP, derrière l'Arabie saoudite et l'Irak. S'agissant du Venezuela, ce pays a vu sa production de pétrole s'effondrer de 50% en un an et demi, selon le FMI. La production pétrolière vénézuélienne s'est ainsi établie à 1,5 million de b/j en avril, selon l'OPEP, au plus bas depuis 30 ans. Touché par l'effondrement des cours du brut depuis 2014, ce pays, qui tire 96% de ses revenus du pétrole, souffre d'un manque de devises qui l'a plongé dans une crise aiguë. En conséquence, lors de la prochaine rencontre des 24 pays producteurs de pétrole à Vienne, le Venezuela, selon son ministre du Pétrole, Rafael Ramirez, appellera "très fermement" les pays qui surproduisent à réduire leur production. "Nous pensons qu'il nous faut conserver le plafond de production de 30 millions convenu lors de notre dernière réunion en décembre", a déclaré Ramirez.
La Position de l'Algérie Le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, avait récemment affirmé à Alger que l'Algérie œuvrerait avec les pays membres de l'OPEP et hors OPEP, durant la rencontre de juin à Vienne, à garantir l'équilibre entre l'offre et la demande pour préserver la stabilité des marchés pétroliers. "Ce qui nous importe, c'est qu'il y ait un équilibre entre l'offre et la demande pour préserver la stabilité des marchés pétroliers", avait-il soutenu. Lors du 7ème Séminaire international de l'OPEP, qui se tient depuis mercredi à Vienne, M. Guitouni a évoqué les efforts soutenus de l'Algérie afin de stabiliser les marchés pétroliers à l'appui d'une économie mondiale saine, et ce, en coopération avec les pays OPEP et non OPEP, en privilégiant le dialogue avec les parties prenantes. Il y a lieu de rappeler le concours décisif de l'Algérie qui avait rendu possible l'accord historique d'Alger du 28 septembre 2016 et dont a découlé la réussite de tout le processus actuel. L'OPEP avait accepté, pour la première fois depuis 2008, de plafonner sa production de pétrole afin de stabiliser le marché mondial du pétrole. Des pays producteurs non membres de cette organisation, dont la Russie, avaient joint cet accord en réduisant leur production totale de 600.000 b/j. Cet accord OPEP-non OPEP a été prolongé jusqu'à fin 2018 lors de la réunion de l'organisation en novembre 2017.
Augmenter la production Les ministres de l'Opep se retrouvaient vendredi à Vienne pour leur réunion semestrielle, au cours de laquelle l'Arabie saoudite, soutenue par la Russie, veut convaincre l'Iran d'accepter une hausse de la production mondiale, à laquelle Téhéran est hostile sur fond de sanctions américaines. Les objectifs de production établis fin 2016 par l'Opep et ses partenaires, soit 24 producteurs de pétrole représentant plus de 50% de l'offre mondiale, ont contribué à l'envol des prix, et le premier exportateur mondial plaide désormais pour des extractions plus importantes dans un contexte de rebond de la demande. "Nous nous devons d'être responsables et réactifs en déployant une offre adéquate", a estimé le ministre saoudien de l'Energie, Khaled al-Faleh. En pratique, l'Arabie saoudite et la Russie ont indiqué jeudi soir vouloir proposer une augmentation de la production de l'Opep et de ses partenaires d'un million de barils par jour pour contrer un possible emballement du marché. Mais après avoir soufflé le chaud et le froid, Téhéran a signifié qu'il refusait d'envisager un assouplissement de l'accord de plafonnement de production entré en vigueur début 2017. Le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namar Zanganeh, a ainsi quitté une réunion technique de ministres jeudi soir, affirmant devant des analystes qu'il n'y aurait "pas d'accord" vendredi, toute modification nécessitant l'unanimité des membres du cartel. Frappée en mai par le retrait américain de l'accord nucléaire de 2015, qui selon elle a contribué à faire flamber les cours, la République islamique ne souhaite pas subir de pertes de revenus et de parts de marché face notamment à son rival régional saoudien. Comme l'Irak et le Venezuela, un pays en pleine crise économique, l'Iran fait en effet face à des capacités de production et d'exportation limitées. La Russie et l'Arabie saoudite font de leur côté valoir que l'objectif de hausse de la production d'un million de barils par jour qu'ils proposent permettrait d'"empêcher le marché de se resserrer", selon les termes du ministre saoudien Khaled al-Faleh. L'option retenue se base sur les chiffres de l'Opep, selon lesquels l'accord initial, qui visait une réduction de 1,8 million de barils par jour, a mené à une baisse réelle de 2,8 millions de barils. "Cette option sera débattue par l'Opep vendredi, puis par l'Opep et ses partenaires samedi", lors d'une seconde réunion programmée à Vienne, a affirmé le ministre russe, Alexandre Novak.
'Empêcher la surchauffe' L'Iran produit actuellement à des niveaux historiquement élevés, mais pourrait voir son industrie neutralisée par les sanctions déclenchées par le président américain Donald Trump après sa sortie de l'accord sur le nucléaire. "Le président Trump a créé les difficultés du marché en multipliant les sanctions contre deux membres fondateurs de l'Opep", l'Iran et le Venezuela, a accusé le ministre iranien mardi soir à son arrivée à Vienne. Le président américain a critiqué le cartel sur Twitter, accusant l'organisation de maintenir les cours à un niveau élevé, alors que le prix de l'essence grimpe aux Etats-Unis à quelques mois d'élections législatives. En Russie, les entreprises pétrolières privées ont de leur côté de plus en plus de mal à justifier auprès de leurs actionnaires de retenir leurs extractions et de ne pas profiter pleinement de la hausse des cours. Depuis 2016, la baisse de production établie par l'Opep et de ses partenaires a fait rebondir les prix de l'or noir, brièvement passés sous les 30 dollars début 2016 avant de dépasser les 70 dollars au deuxième trimestre 2018. L'accord, qui s'achève fin 2018, nécessite l'unanimité des membres de l'Opep pour toute modification, une disposition qui place l'Iran en position de force. Mais l'Arabie saoudite tente de faire valoir que la hausse de production pourrait passer en partie par une réallocation de quotas de production non utilisés par certains pays, comme le Venezuela. "Nous devons empêcher la surchauffe du marché", a prévenu pour sa part jeudi le ministre russe Alexandre Novak.
Accord Russie-Arabie saoudite sans l'Iran La Russie et l'Arabie saoudite proposeront une augmentation de la production de l'Opep et de ses partenaires d'un million de barils par jour, ont annoncé leurs ministres jeudi soir, mais devront convaincre l'Iran de ne pas opposer son veto à la décision. "Cela devrait empêcher le marché de se resserrer", a affirmé le ministre saoudien Khaled al-Faleh devant des journalistes. L'option retenue se base sur les chiffres de l'Opep, qui estime que l'accord initial, qui visait une réduction de 1,8 million de barils par jour, a mené à une baisse réelle de 2,8 millions de barils par jour. "Cette option sera débattue par l'Opep vendredi, puis par l'Opep et ses partenaires samedi", a affirmé son homologue russe, Alexandre Novak. Mais l'Arabie saoudite a encore fort à faire pour convaincre l'Iran, qui pourrait s'opposer à la mesure alors que l'Opep a besoin de l'unanimité de ses membres. Présent à la même réunion que l'Arabie saoudite et la Russie, le ministre iranien du Pétrole a claqué la porte. De retour à son hôtel, il a affirmé devant des analystes qu'il n'y aurait "pas d'accord" vendredi. En fin d'après-midi, le représentant iranien avait cependant indiqué que Téhéran était "prêt à un accord", sans toutefois donner plus de précisions. L'Arabie saoudite avait annoncé à la mi-journée vouloir parvenir à une solution "acceptable politiquement" par tous les pays, via une réallocation au sein du cartel de quotas de production non utilisés par certains pays, comme le Venezuela, sans nécessairement remonter les plafonds fixés fin 2016 et valables jusqu'à fin 2018.