Plusieurs figures des "Gilets jaunes" appellent à une nouvelle mobilisation ce samedi à Paris et en région, dénoncent une répression des pouvoirs publics et refusent les "mesurettes" présentées selon eux par Emmanuel Macron, auquel ils demandent d'être reçus à l'Elysée. Dans une lettre ouverte au président de la République publiée sur Facebook, le collectif "La France en colère" répond aux vœux télévisés d'Emmanuel Macron, jugés signe d'une absence d'écoute, et assure vouloir "aller plus loin". "La colère va se transformer en haine si vous continuez, de votre piédestal, vous et vos semblables, à considérer le petit peuple comme des gueux", écrit le groupe parmi les plus suivis du mouvement. Ce groupe est géré entre autres par Eric Drouet, interpellé à deux reprises et convoqué devant les juges le 15 février, et Priscillia Ludosky. La lettre sera lue par des "Gilets jaunes" samedi à 14h00 devant l'Hôtel de ville de Paris lors d'un "acte 8" du mouvement, précise sur Twitter cette dernière. Les manifestants, qui disent avoir informé la préfecture de police, prévoient de défiler ensuite vers l'Assemblée nationale, en passant par l'Ile de la cité, Saint-Michel-Notre Dame et le musée d'Orsay. La préfecture précisait vendredi n'avoir reçu aucune déclaration pour ce parcours-là en date de jeudi après-midi. Eric Drouet, figure des "Gilets jaunes" sorti jeudi de garde à vue pour organisation de manifestation non déclarée à Paris, a dénoncé une opération politique. Cette deuxième arrestation, après une première le 22 décembre, a déclenché une vague d'indignation au Rassemblement national (ex-Front national) et à La France insoumise, soutiens du mouvement.
"PIÈGE" Les "Gilets jaunes" de "La France en colère" refusent également le grand débat national proposé par l'exécutif pour désamorcer la contestation. "Nous nous méfions de la mise en place de votre plan de consultation nationale. Nous le considérons comme un piège politique pour tenter de noyer le sujet qui vous terrifie : redonner la souveraineté au peuple de France par la mise en place du Référendum d'initiative citoyenne", peut-on lire dans la lettre destinée au chef de l'Etat. A l'issue d'une première phase qui se clôturera le 15 janvier, pendant laquelle les maires ruraux ont ouvert des cahiers de doléances à leurs administrés, des débats seront organisés pendant deux mois sur les quatre thématiques (transition écologique, fiscalité, organisation de l'Etat et démocratie et citoyenneté) annoncées par le Premier ministre. Chantal Jouanno, la présidente de la commission nationale du débat public, a assuré entendre les "Gilets jaunes". "Ce qui est important dans leur positionnement, c'est ce qu'ils disent sur le grand débat (...) : on ne veut pas quelque chose qui soit un paravent soit pour une absence de décision, soit un faux débat", a-t-elle dit sur CNEWS. "En terme d'organisation et de méthode, c'est un débat que les habitants organisent. Ce n'est pas un débat qui sera piloté par des institutions, que ce soit un préfet ou des parlementaires", a-t-elle ajouté, tout en rappelant que les résultats de la consultation ne seraient en rien contraignants. "Le débat est un éclairage important pour le décideur. Ensuite, le débat ne contraint pas le décideur. Donc, il appartiendra au gouvernement de dire ce qu'il retient ou pas."
Les "stylos rouges" en colère Les "stylos rouges", un mouvement regroupant plus de 40.000 personnes travaillant dans l'enseignement, emboîtent le pas aux "gilets jaunes" pour des revendications socio-économiques et un besoin de considération. Se sentant les "oubliés" de la crise sociale que traverse la France depuis quelques mois, les enseignants et professeurs du primaire et du secondaire ont décidé de créer leur mouvement à travers les réseaux sociaux pour pallier à l'inaudibilité de leurs syndicats. Lancé le 12 décembre dernier, le mouvement a recueilli à la date du 2 janvier plus de 45.000 adhérents, même s'il n'est pas encore organisé. C'est le deuxième mouvement social en France qui est né hors syndicats. A travers Facebook, le groupe reste fermé et toute demande d'intégrer le mouvement doit être validée. Un chapelet de revendications sont portés par ce mouvement, se disant apolitique, qui ne se contente pas de rester dans le monde virtuel en projetant des actions sur le terrain dès la rentrée après les vacances d'hiver. Mais ils doivent, ont-ils annoncé, définir leur mode d'action. Il faut rappeler qu'à travers le tag Pasdevague, il y a deux mois, les professeurs avaient dénoncé le silence du ministère de l'Education nationale face aux violences dans les écoles. Parmi leurs doléances, ils revendiquent le dégel du point d'indice des salaires correspondant aux heures de travail et moins d'élèves par classe et de contrats précaires. "Pour l'instant, nous listons nos revendications et nous allons nous mettre d'accord sur les événements à mettre en place par département, parce que toute la France est concernée par ce mouvement", lit-on sur leur mur, indiquant qu'ils vont soutenir les lycéens et les étudiants dans leur combat contre les dernières réformes du bac et de Parcoursup. "Le temps de l'action est maintenant venu. Après les gilets jaunes et les lycéens, les stylos rouges ont décidé de suivre le mouvement et reconquérir certains droits", ont-ils ajouté. Ils réclament du gouvernement une revalorisation de leur métier "tant mis à mal", une "vraie bienveillance" de l'Etat pour ses élèves en améliorant leurs conditions d'apprentissage, soulignant qu'il est temps que l'Etat prenne soin de ses enseignants. Ce mouvement est venu grossir les rangs de la contestation sociale, même si, en apparence, le mouvement des "gilets jaunes" donne l'impression d'un affaiblissement après presque deux mois de mobilisation. Il vient également à quelques jours de la "Lettre aux Français" que le président Emmanuel Macron a l'intention de la diffuser à travers la presse et les réseaux sociaux pour expliquer son initiative de lancer au courant du premier trimestre le "grand débat national". Sous la tension du mouvement des "gilets jaunes", le président Macron a du ajuster sa politique en matière sociale sans pour autant changer de cap dans son programme de réformes, ce qui lui a valu d'ailleurs une chute vertigineuse de sa popularité.