Le 16 janvier 1992, le militant de la cause nationale, Mohamed Boudiaf foule le tarmac de l'aéroport Houari Boumediène, retrouvant ainsi sa terre natale après 28 ans d'exil. Il était venu, convaincu d'aider son pays qui se trouvait dans une situation " politique " de blocage. Le 11 janvier 1992, le président de la République, Chadli Bendjedid, annonce à la télévision sa démission de son poste de premier magistrat du pays tout en annonçant également la dissolution de l'APN. Cette situation a eu comme principale cause l'annulation du processus électorale suite au premier tour, le 26 décembre 1991, où des islamistes du Front islamique du salut (FIS) obtiennent 188 sièges. Certains soutiennent cette décision tandis que d'autres la refusent catégoriquement et le pays s'enfonce dans une crise profonde. On pense donc en haut lieu de faire appel au " père de la Révolution " si Tayeb El Watani de son vrai nom Mohamed Boudiaf, historique du FLN. Un Haut-Comité d'Etat est installé et institué et c'est Mohamed Boudiaf qui a été convaincu par les responsables politiques de l'époque pour diriger le pays à la tête de ce HCE. Boudiaf a donc accepté cette " mission délicate de sauver le pays ". Le professeur Mahfoud Bennoune rapporte ces propos de Boudiaf tenus peu avant que lui soit proposée la présidence du HCE : "Si un jour, des perspectives meilleures se présentaient pour que je sois utile à l'Algérie, je rentrerais, mais si c'est pour faire des histoires, non. L'Algérie a besoin d'hommes capables de se sacrifier pour elle, la servir et non se servir.". Les responsables politiques l'ont persuadé que son refus entraînerait l'Algérie dans une guerre civile. Et c'est ainsi qu'il est devenu président de ce nouvel organe exécutif sous la houlette du Haut Conseil de Sécurité : le Haut-Comité d'Etat : une Présidence collégiale qui avait pour mission de pallier la vacance de l'institution présidentielle suite à la démission du Président Chadli. En si peu de temps, Mohamed Boudiaf a su gagner la confiance de tous les Algériens de par sa simplicité et surtout son langage franc et direct. Et la majorité des jeunes algériens découvraient pour la première fois si Tayeb el Watani. Beaucoup d'entre eux ne connaissaient pas l'un des héros du déclenchement de la Guerre de Libération nationale. Né le 23 juin 1919 à Ouled Madi (M'Sila), Mohamed Boudiaf s'engage très tôt dans la résistance. Il adhère au PPA, puis devient membre important de l'Organisation secrète (OS). En 1950, il est jugé et condamné par contumace, il réussit à s'évader et entre dans la clandestinité. Il devient ensuite l'un des principaux organisateurs du Comité révolutionnaire pour l'unité et l'action (CRUA), membre du groupe des 22 ayant déclenché la Guerre de Libération nationale. Le 20 septembre 1962 il fonde le Parti de la révolution socialiste (PRS). En juin 1963, il est arrêté par le président Ben Bella, et mis sous résidence surveillée à Béchar. Il y séjournera 3 mois, puis sera libéré. Mohamed Boudiaf choisit alors de s'exiler dès 1979, il voyagera entre l'Europe et le Maroc où il activera pour son parti le PRS. En 1979, après la mort du président Houari Boumediene, il dissout sa formation politique et se consacrera à ses activités professionnelles. Il dirigera alors une briqueterie à Kenitra, au Maroc. Et c'est ainsi qu'après 28 ans il est appelé par le " devoir du pays " en prenant la tête du Haut-Comité d'Etat, le 16 janvier 1992. Il décide de mener une lutte implacable contre la corruption, la faisant comme priorité tout en s'engageant à remettre sur pied le processus démocratique. Ce qui suscite un très grand espoir chez les Algériens qui l'ont vite adopté. Boudiaf avait bien tendu la main à tous les Algériens. Mais, l' "espoir " Mohamed Boudiaf a été assassiné ! Le 29 juin 1992, il est assassiné en direct à la télévision par l'un des éléments de sa garde rapprochée, le sous-lieutenant Lembarek Boumaârafi, alors qu'il prononçait un discours à la Maison de la culture de Annaba. Depuis il repose en paix dans sa dernière demeure au cimetière d'El-Alia à Alger.