Synthèse de Saïd B. Comme désormais de coutume depuis le 22 février dernier, les citoyens algériens ne se lassent pas pour sortir chaque vendredi revendiquer le changement radical du système. Avant hier, c'était le 16ème vendredi du "Hirak" et le premier juste après le mois sacré de Ramadhan qui a coïncidé avec le discours du chef de l'Etat à la nation, prononcé jeudi soir. Un discours qui a été différemment apprécié par les marcheurs : les uns, le discours du chef de l'Etat est une nouvelle provocation alors que pour les autres, c'est plutôt un prélude à un dialogue inévitable alors que d'autres y voient une invitation à une nouvelle élection sans date précise. Les contestataires ont d'ailleurs qualifié le discours du chef de l'Etat de jeudi dernier de provocation, tout en appelant à ouvrir le dialogue avec les parties et personnalités "crédibles". N'étant point convaincus, des citoyens réclament du pouvoir, en première réaction au discours de Abdelkader Bensalah, à œuvrer pour des conditions permettant d'aller vers des élections libres et transparentes, élire un président probe et vivre durablement en paix. Des marches populaires pacifiques ont eu lieu pour le seizième vendredi consécutif, dans plusieurs wilayas du pays pour revendiquer un "changement radical" du système et appeler à un "dialogue mené par des personnalités nationales propres". Pour le 16e vendredi consécutif, les manifestants sont sortis nombreux dans des marches pacifiques à Alger pour réitérer leur attachement au changement radical, au départ de tous les symboles du système et l'instauration d'un Etat de droit. Les manifestants se sont regroupés dès la matinée au niveau de la Grande-Poste, Boulevard Colonel Amirouche, Avenue Pasteur, Place Maurice Audin et au niveau du Boulevard Zighout Youcef où un dispositif sécuritaire important a été déployé pour parer à tout débordement. Drapés de l'emblème national et arborant des portraits des martyrs de la Révolution du 1er novembre, les manifestants scandaient des slogans réclamant le départ de tous les symboles du système, en particulier les trois "B" (Bensalah-Bedoui-Bouchareb). Ces nouvelles manifestations interviennent au lendemain du discours du chef de l'Etat, Abdelkader Bensalah, dans lequel il a appelé à un "dialogue inclusif" pour trouver une issue à la crise politique que traverse le pays. Pour rappel, M. Bensalah avait invité la classe politique, la société civile et les personnalités nationales à opter pour la voie du "dialogue inclusif" en vue de "poser les jalons du processus de concertation que l'Etat s'emploiera à organiser dans les meilleurs délais, à débattre de toutes les préoccupations portant sur la prochaine échéance présidentielle et partant, tracer une feuille de route devant aider à l'organisation du scrutin dans un climat d'entente et de sérénité". Dans leurs marches pacifiques, les manifestants ont affiché leur rejet à la tenue d'élections "sous la conduite des symboles du système" et réitéré leur attachement à l'instauration d'un Etat de droit où règne la démocratie et la transparence. Ils ont également scandé les slogans habituels appelant à la préservation de l'unité nationale et brandi des pancartes sur lesquelles ont pouvait lire: "Pas de régionalisme, nous sommes tous des frères", "Djeich-chaâb, khawa khawa" (Armée et peuple sont frères), "Silmya, silmya" (Pacifique, pacifique) ou encore "Djazair hora dimocratia" (Algérie libre et démocratique)". Ils ont aussi exprimé leur rejet de toute ingérence étrangère dans les affaires internes de l'Algérie. Il est à signaler, par ailleurs, que l'accès au parvis de la Grande-Poste, lieu symbolique du Hirak, a été bloqué pour le troisième vendredi consécutif, de même que le tunnel des Facultés, et les voies menant vers le Palais du gouvernement pour parer à tout dérapage.
Dans les autres wilayas hors la capitale D'ailleurs, des marches ont été organisées encore une fois un peu partout dans le territoire du pays pour faire entendre la voix du peuple qui appelle à des réponses pratiques à ses revendications : départ des symboles honnis du pouvoir en place, institution de la commission autonome d'organisation des élections et un changement profond du système . A Constantine, les groupes qui ont convergé vers le centre-ville, dès la fin de la prière du vendredi, ont appelé au "changement radical du système de gouvernance", au "départ de tous les symboles du régime" et à "une période de transition" menée par des personnalités "crédibles", non impliquées dans des affaires de corruption. A Mila et Oum El Bouaghi, des milliers de citoyens ont manifesté, dans le calme, à travers les artères de ces deux villes, en réitérant l'essentiel des revendications exprimées depuis le début de la dynamique populaire. Dans la wilaya de Batna, quelques milliers de marcheurs ont sillonné le centre-ville, entonnant des chants patriotiques et exigeant le départ de la "Issaba" (bande) et revendiquant "un Etat civil". A Skikda, ils ont réclamé la poursuite de tous les responsables impliqués dans des affaires de corruption et de dilapidation des deniers publics. A Annaba, les citoyens, qui ont battu le pavé de nouveau, ont appelé à "une période de transition avec des figures consensuelles", alors que les manifestants dans la wilaya de Guelma ont réitéré les mêmes slogans: "Silmiya, Silmiya" et "Pour une Algérie nouvelle". A El Tarf, les manifestants ont indiqué l'urgence d'opérer "un changement à la hauteur des attentes du peuple". Les mêmes scènes ont été constatées à Sétif. A l'ouest du pays, les citoyens sont également sortis pour réclamer le départ de "tous les symboles de l'ancien régime". A Oran, les marcheurs, qui ont traversé les principales artères de la ville, partant de la place du 1er novembre jusqu'au siège de la wilaya, ont scandé notamment le "report de l'élection présidentielle jusqu'au départ de tous les B". A Tlemcen, les manifestants ont retenti "Oui pour une phase de transition", tout en réclamant l'activation des articles 7 et 8 de la Constitution, deux principes fondamentaux consacrant le pouvoir au peuple. A Mostaganem, les marcheurs ont emprunté le même itinéraire que les vendredis passés en dépit de la forte chaleur, réaffirmant une nouvelle fois leur détermination de passer à un "Etat républicain et civil". A Tiaret comme à Sidi Bel-Abbes, Mascara, Tissemsilt, Ain Temouchent, El Bayadh et Naâma, les protestataires ont exprimé notamment leur refus d'élections organisées par "Bensalah et Bedoui". A Blida, Tipasa, Ain Defla, Djelfa et Médéa, les manifestants ont réitéré leur souhait de voir un "changement" et une "transparence" dans la gestion du pays. Des marches similaires ont eu lieu dans les wilayas de Tizi-Ouzou, Béjaïa, Bouira et Boumerdes, où des milliers de citoyens ont sillonné les artères principales de ces villes en scandant des slogans et en brandissant des pancartes et banderoles pour exiger "des réformes politiques profondes" et le "jugement de tous ceux qui sont impliqués dans des affaires de mauvaise gestion et de corruption". Au sud du pays, les manifestants, au nombre relativement réduit cette fois-ci, sont sortis après la prière du vendredi dans certaines villes telles qu'Ouargla, Tindouf, Aflou et Laghouat, pour appeler au "changement politique profond", au "départ des symboles du système" et à la "préservation de l'unité nationale". Dans d'autres wilayas, à l'instar d'El-Oued, Ghardaïa, Tamanrasset et Adrar, les manifestations sont prévues pour la fin de l'après-midi en raison des chaleurs qui sévissent dans ces régions. En résumé, les " marcheurs " insistent sur "changement radical" du système tout en appelant à un "dialogue mené par des personnalités nationales propres".