Malgré les possibles fuites des capitaux, les banques libanaises ont rouvert au public vendredi après deux semaines de fermeture en raison des manifestations. La veille, le président Michel Aoun a appelé à la formation d'un gouvernement "productif". Les banques libanaises ont rouvert leurs portes au public, vendredi 1er novembre, après deux semaines durant lesquelles elles sont restées fermées en raison des manifestations, qui ont mené à la démission du gouvernement. Craignant une fuite des capitaux, les établissement bancaires prévoient donc de n'autoriser les virements bancaires vers l'étranger que pour certaines situations, notamment les cas d'enfants faisant leurs études à l'étranger et ayant besoin de virements en provenance de leur famille. Même si la Banque centrale avait demandé aux établissements de ne pas imposer de contrôle, afin de ne pas effrayer les investisseurs, son gouverneur les a laissées libres de décider. Pour encaisser leur salaire et effectuer des virements, plusieurs Libanais ont formé de longues files d'attente dès l'aube à l'extérieur des agences bancaires. Les populations craignaient que la réouverture des banques ne s'accompagne d'une dévaluation monétaire, mais la Banque centrale a déclaré en début de semaine que la monnaie locale resterait indexée sur le billet vert au taux de 1 507,5 livres pour un dollar, fixé en 1997. Sur le marché parallèle, celle-ci se négociait ces derniers jours à plus de 1 700 livres pour un dollar. "Les ministres devront être choisi(e)s en fonction de leurs compétences" Les mouvements bancaires seront en tout cas particulièrement scrutés au lendemain de la déclaration du président libanais Michel Aoun, qui a appelé, sous la pression de la rue, à la formation d'un gouvernement "productif", composé de ministres choisis pour leurs "compétences" et non pour leur appartenance politique. "Les ministres devront être choisi(e)s en fonction de leurs compétences, non de leurs allégeances politiques […], d'autant que le Liban se trouve à un tournant critique, notamment sur le plan économique, et a désespérément besoin d'un gouvernement harmonieux capable d'être productif", a déclaré le chef de l'État. Michel Aoun s'est engagé à "poursuivre la lutte contre la corruption" et à œuvrer en faveur de la formation d'un nouveau cabinet capable de répondre aux "aspirations des Libanais […] et de réaliser ce que le gouvernement précédent a failli" à faire, a-t-il dit. Le président libanais a par ailleurs exprimé sa volonté de dépasser la répartition confessionnelle du pouvoir. Le Liban repose en effet depuis son indépendance, en 1943, sur le "confessionnalisme", un système politique complexe basé sur l'équilibre entre différentes confessions. La mise en place d'une gouvernance non confessionnelle fait partie des revendications des manifestants.
"Tous, ça veut dire tous" Ces promesses n'ont pas calmé les manifestants, qui accusent le gouvernement d'incompétence et de corruption. À peine le discours terminé, ceux massés au centre de la capitale ont scandé "Tous, ça veut dire tous", un slogan phare de la contestation affirmant leur souhait de voir partir tous les dirigeants au pouvoir, sans exception. "Dégage, dégage, tu as affamé tout le monde" et "Le peuple veut la chute du régime", ont encore crié les manifestants, qui suivaient le discours en direct, retransmis sur un écran géant. Déclenché le 17 octobre, le mouvement de contestation, qui a pris de court les partis au pouvoir, continue de mobiliser des dizaines de milliers de Libanais à travers plusieurs régions du pays. Les manifestants, qui ont obtenu la démission du Premier ministre Saad Hariri le 29 octobre, réclament un renouvellement complet de la classe politique restée inchangée depuis la fin de la guerre civile (1975-1990).