L'Aïd El-adha, comme chaque année dresse toujours le même décor : d'une part, Messaoud qui, depuis la fin de son adolescence déteste les fêtes et les fuit, qu'elles soient familiales, nationales ou religieuses préférant un jour de travail à un jour chômé et payé au point qu'il s'est taillé une réputation d'homme ombrageux, ; d'autre part Aïcha dont l'esprit de convivialité ne pouvait s'exprimer qu'à l'occasion des fêtes. Et, quelques jours avant la fête du sacrifice le même problème se reposait toujours dans les mêmes termes : c'est toujours Aïcha qui ouvrait les hostilités : «Ya radjel ! Qu'est-ce qu'on fait cette année ? On achète le mouton ou non ? Chaque année je suis gênée que les voisins viennent frapper à ma porte pour me proposer des morceaux de viande, nous mettant ainsi dans la position d'une famille indigente. Les voisins, passe ! Mais je ne supporte pas que mes belles sœurs se la ramènent pour crâner devant moi…" -Ya M'ra, je t'avais dit, dès les premiers jours où j'ai uni ma destinée à la tienne que je ne suis guère doué pour m'occuper du mouton. Bien que montagnard d'origine je ne supporte pas l'idée de faire grimper à cette pauvre créature dix étages, de le parquer dans l'étroit balcon pour qu'il mêle, lui aussi, ses bêlements au chœur de ses congénères… Tu entends tous les cris de détresse de ces pauvres animaux ! Il y a des gens sans cœur qui les achètent quinze jours avant l'Aïd, les laissant dans les couloirs où se mêlent fourrage et excréments dans une épouvantable odeur d'écurie ! Les immeubles ne sont pas conçus pour cela ! A la campagne, d'accord, mais ici c'est contraire au bon sens ! Et puis tu me vois me rabaisser au niveau du voisin d'en face, Farouk pour ne point le nommer, dont les enfants sont des pickpockets notoires et patentés : tout le monde se f…. de sa gueule quand il promène son mouton au bout d'une corde tandis que sa femme s'extasie au balcon. C'est d'une débilité ! D'autre part, tu trouves normal qu'un type comme le gardien qui squatte la cave achète chaque année un mouton de plus de deux millions de centimes : d'où lui vient l'argent ? Avec ce qu'il a dépensé pour les moutons, il aurait pu acheter un petit logement pour ses enfants ! Et puis , tu connais mes principes : je suis contre toute forme de spéculation, on nous dépouille déjà assez comme cela. Imagine la chaîne des suceurs de sang : les éleveurs, les maquignons, les chevillards, les bouchers… Tout ce beau monde se frotte les mains à la perspective de l'Aïd. Sans oublier bien sûr, tout le folklore qui est organisé à cette occasion : un marché aux moutons à chaque coin de rue, des marchands de foin et d'avoine, des marchands de couteaux de toutes tailles, les rémouleurs… Ah ! J'oubliais les enfants qui font paître les moutons sur les espaces verts de la cité : ils organisent des tournois de béliers où les paris vont bon train ! Tu crois que tout cela c'est hallal ! Le mouton n'est pas un jouet ! Et puis cette odeur nauséabonde qui envahit la cage d'escaliers, les voisins qui ne nettoient pas les déjections de leur animal sans oublier l'orgie du méchoui qui suivra !...Si vous voulez égorger, occupez-vous en ! Je m'en lave les mains !... » Et c'est ce qui fut fait. L'Aïd El-adha, comme chaque année dresse toujours le même décor : d'une part, Messaoud qui, depuis la fin de son adolescence déteste les fêtes et les fuit, qu'elles soient familiales, nationales ou religieuses préférant un jour de travail à un jour chômé et payé au point qu'il s'est taillé une réputation d'homme ombrageux, ; d'autre part Aïcha dont l'esprit de convivialité ne pouvait s'exprimer qu'à l'occasion des fêtes. Et, quelques jours avant la fête du sacrifice le même problème se reposait toujours dans les mêmes termes : c'est toujours Aïcha qui ouvrait les hostilités : «Ya radjel ! Qu'est-ce qu'on fait cette année ? On achète le mouton ou non ? Chaque année je suis gênée que les voisins viennent frapper à ma porte pour me proposer des morceaux de viande, nous mettant ainsi dans la position d'une famille indigente. Les voisins, passe ! Mais je ne supporte pas que mes belles sœurs se la ramènent pour crâner devant moi…" -Ya M'ra, je t'avais dit, dès les premiers jours où j'ai uni ma destinée à la tienne que je ne suis guère doué pour m'occuper du mouton. Bien que montagnard d'origine je ne supporte pas l'idée de faire grimper à cette pauvre créature dix étages, de le parquer dans l'étroit balcon pour qu'il mêle, lui aussi, ses bêlements au chœur de ses congénères… Tu entends tous les cris de détresse de ces pauvres animaux ! Il y a des gens sans cœur qui les achètent quinze jours avant l'Aïd, les laissant dans les couloirs où se mêlent fourrage et excréments dans une épouvantable odeur d'écurie ! Les immeubles ne sont pas conçus pour cela ! A la campagne, d'accord, mais ici c'est contraire au bon sens ! Et puis tu me vois me rabaisser au niveau du voisin d'en face, Farouk pour ne point le nommer, dont les enfants sont des pickpockets notoires et patentés : tout le monde se f…. de sa gueule quand il promène son mouton au bout d'une corde tandis que sa femme s'extasie au balcon. C'est d'une débilité ! D'autre part, tu trouves normal qu'un type comme le gardien qui squatte la cave achète chaque année un mouton de plus de deux millions de centimes : d'où lui vient l'argent ? Avec ce qu'il a dépensé pour les moutons, il aurait pu acheter un petit logement pour ses enfants ! Et puis , tu connais mes principes : je suis contre toute forme de spéculation, on nous dépouille déjà assez comme cela. Imagine la chaîne des suceurs de sang : les éleveurs, les maquignons, les chevillards, les bouchers… Tout ce beau monde se frotte les mains à la perspective de l'Aïd. Sans oublier bien sûr, tout le folklore qui est organisé à cette occasion : un marché aux moutons à chaque coin de rue, des marchands de foin et d'avoine, des marchands de couteaux de toutes tailles, les rémouleurs… Ah ! J'oubliais les enfants qui font paître les moutons sur les espaces verts de la cité : ils organisent des tournois de béliers où les paris vont bon train ! Tu crois que tout cela c'est hallal ! Le mouton n'est pas un jouet ! Et puis cette odeur nauséabonde qui envahit la cage d'escaliers, les voisins qui ne nettoient pas les déjections de leur animal sans oublier l'orgie du méchoui qui suivra !...Si vous voulez égorger, occupez-vous en ! Je m'en lave les mains !... » Et c'est ce qui fut fait.