Il est difficile ou quasiment impossible d'imaginer le moindre événement festif sans gâteaux. Que dire donc des fêtes de l'Aïd, des mariages et autres cérémonies! Gâteaux aux amandes, pistaches noix..., trempés dans du miel ou recouverts de sucre glace, sans incontournables pour chaque célébration. La nouveauté, c'est que de plus en plus de femmes algéroises «au foyer» se tournent vers ce créneau lucratif pour en faire leur «profession». Ce phénomène tend d'ailleurs à se généraliser à toutes les régions du pays. Il est difficile ou quasiment impossible d'imaginer le moindre événement festif sans gâteaux. Que dire donc des fêtes de l'Aïd, des mariages et autres cérémonies! Gâteaux aux amandes, pistaches noix..., trempés dans du miel ou recouverts de sucre glace, sans incontournables pour chaque célébration. La nouveauté, c'est que de plus en plus de femmes algéroises «au foyer» se tournent vers ce créneau lucratif pour en faire leur «profession». Ce phénomène tend d'ailleurs à se généraliser à toutes les régions du pays. Il est bien révolu le temps où les maîtresses de maison préparaient elles-même leurs gâteaux, pour les fêtes ou les évènements religieux. Lors de chacune de ces occasion, les femmes se rassemblaient et s'entraidaient pour la préparation de ces gâteaux traditionnels, nécessitant un savoir-faire indéniable. Ces réunions féminines faisaient partie des us ancrés dans la vie quotidienne . «Autrefois les femmes s'activaient à préparer les gâteaux traditionnels à la veille de chaque occasion, les voisines ou les femmes d'une grande famille faisaient une sorte de concours entre elles, où chacune d'elles faisait montre de son talent et savoir-faire pour attirer l'attention de la belle famille, du mari ou pour avoir la réputation de la femme qui sait tout faire, «koul sbaâ bsnaâ» comme on dit chez nous», nous dira khalti Zahra qui continue d'un ton désabusé : «De nos jours on ne sens même plus l'odeur des gâteaux dans les foyers à la veille de l'Aïd, tout arrive emballé la veille. Les femmes d'aujourd'hui ont de plus en plus recours à l'achat de gâteaux prêts et ce à n'importe quel prix», ajoute-t-elle. Implication «socio-économique» de la femme au foyer ... Ce phénomène, vieux d'au moins dix ans, commence à «contaminer» beaucoup de ménages par l'instauration de nouvelles règles au sein de la cellule familiale. Des inconditionnels mais également des détracteurs s'expriment à ce sujet, «cette pratique trouve toute sa raison dans l'évolution verticale de la condition socio-économique de la femme, mais pas uniquement, selon l'analyse de M. Lefki, sociologue et professeur à l'université de Blida. De plus en plus de femmes se tournent vers les «professionnelles» du rouleau à patisserie pour passer commande des gâteaux de l'Aïd et différentes fêtes. «Si toutes les conditions matérielles sont réunies pour l'émancipation de la femme des affaires de la cuisine, il n'en demeure pas moins que les mœurs ont évolué. La femme, même désargentée, aspire de plus en plus à conquérir une liberté financière qui passe forcément par trouver une place dans le monde du travail et accessoirement se débarrasser des contraintes et des corvées ménagères». Si dans l'esprit, la distance que prend la femme vis-à-vis des exigences du toit familial ou conjugal s'inscrit dans la logique de l'évolution des mœurs, en réalité c'est tout un processus qui s'est mis doucement, mais sûrement, en place pour offrir à la femme ce substitut. Cependant sur le terrain, cette théorie de l'esprit n'a rien à voir avec la réalité des fours puisque les femmes qui passent commande le font souvent pour des raisons tout à fait pratiques, tiennent-elles, à le souligner. Le gain n'est toutefois pas la cause principale!! Les femmes qui passent commande le font souvent pour des raisons pratiques. «Je n'ai pas le temps. Déjà qu'entre le travail, les enfants et les repas, je n'arrive pas à m'en sortir, alors s'il faut encore préparer les gâteaux de l'Aïd!» s'exclame Nadia, fonctionnaire au sein d'une société publique. Elle n'est pas la seule à faire cette réponse. «Avec le boulot, nous n'avons pas le temps de préparer des gâteaux, moi par exemple je travaille jusqu'à la veille de l'Aïd et avec toutes les charges du foyer, notamment en ce mois sacré qui nécessite beaucoup de plats, de préparations en plus des sorties pour faire les achats de l'Aïd : tenues pour les enfants, affaires pour la maison, etc., comment voulez-vous que j'ai le temps de préparer les gâteaux ?!!, d'autant que je peux les avoir prêts à être dégustés dans les commerces», nous explique Samia secrétaire dans une société étrangère à Alger. D'autres femmes, «au foyer», celles-ci justifient l'achat de gâteaux par le fait que cela reviendrait moins onéreux que de les préparer chez elles sans parler de la fatigue, perte de temps, etc. ». D'autres femmes disent «ne pas maîtriser la préparation de certains gâteaux surtout avec le grand actuel, «pour la fête de l'Aïd, personnellement, je préfère goûter et savourer un peu de tout, alors à la maison je prépare mes gâteaux préférés que je ne trouve pas dans le commerce», nous avoue Manal, future maman et ex-policière. Les gâteaux aux amandes ne sont pas à la portée de toutes les bourses, faute de temps mais également de moyens. En témoignent les prix affichés par pièce cédée entre 35 et 50 DA. Nora, la quarantaine, enseignante, assume pleinement son choix : «J'ai toujours préparé mes gâteaux pour l'Aïd même quand je travaillais. Mais depuis que je suis seule avec mon mari, j'ai décidé de recourir aux pâtissières traditionnelles». Même si dépense est lourde, la quiétude e le gain de temps n'ont pas de prix », développe notre interlocutrice. Fatiha, 45 ans, fonctionnaire dans une banque nous avoue : «J'arrive à comprendre que par le passé les femmes avaient pour seul souci de cuisiner toute la journée et de préparer de délicieux gâteaux. Elles ne travaillaient pas à l'extérieur et n'avaient pour unique occupation que la préparation de succulents gâteaux pour toutes les occasions», et d'ajouter avec une pointe de nostalgie : «La situation a bien changé, depuis ! La femme n'a pas de temps pour ça, surtout quand il s'agit de faire de grandes quantités.» Quand les traditions restent les plus fortes... Certaines sont opposés catégoriquement à cette nouvelle pratique. «La femme algérienne est censée être au top de la préparation des gâteaux. Les femmes qui commandent des gâteaux, même pour l'Aïd, vraiment, ce sont des bras cassés ! Elles se cachent derrière l'argument du travail», s'indigne Samira, professeur à l'université d'Alger. «Rien ne remplace le plaisir de faire ses gâteaux soi-même», affirme Samira. Si le cas de Samira semble pour plusieurs personnes interrogées, «atypique», il reste néanmoins beaucoup de ménages à cheval sur les traditions. «L'ambiance de la préparation des gâteaux de l'Aïd est spéciale», attaque d'emblée Kader, à l'orée de la quarantaine, entre deux gorgées d'un thé sans saveur. «J'ai interdit à mon épouse de commander des gâteaux, non pour des considérations budgétaires mais tout bonnement parce que j'ai envie que mon fils vive les mêmes sensations que celles que j'ai vécues au cours de mon enfance. J'ai envie qu'il ait les mêmes souvenirs des fêtes de l'Aïd», nous explique-t-il. L'aisance financière engendre-t-elle la paresse ?! Il y a ceux qui accusent nouvelle classe bourgeoise d'avoir contribué à l'émergence de ce phénomène. «Ce sont des personnes qui veulent afficher autour d'elles une certaine image d'aisance», nous explique Samir, avant d'ajouter : «Les prix pratiqués sont exorbitants. Je préfère le makrout «taâ laâjouz» à ces sucreries qui fondent dans la bouche avant même d'être mâchées.» D'autres voix jettent l'opprobre sur ces pratiques qu'elles imputent volontiers à l'émergence d'une nouvelle bourgeoisie avide d'étaler maladroitement et ostensiblement ses marques ostentatoires de richesse. Salah, smicard invétéré, repousse d'un revers de la main ces habitudes «étrangères à notre société», «Vous avez vu les prix pratiqués; je préfère encore la «tronia» d'antan (un gâteau sec très consommé dans le centre du pays) à ces milliers de variétés bien trop onéreuses pour les revenus modestes» nous dira-t-il. Acheter... oui, mais pas à n'importe quel prix ! Les prix ne cessent d'augmenter selon les exigences du marché aussi bien dans les magasins spécialisés que chez les femmes-artisans. Yamina une de ces patissières, tentera de justifier cela : «J'ai commencé à à 30 DA la pièce, mais avec la hausse du prix du sucre, huile, cacahuètes, amandes et autres fruits secs, je suis contrainte d'exiger 45 DA cette année». Spécialisée dans les gâteaux traditionnels, son champ d'action ne se limite pas simplement aux fêtes de mariages mais s'étale sur le reste de l'année. «On travaille presque toute l'année quand on nous sollicite pour les circoncisions, les mariages, les occasions religieuses et les naissances. Pour vous dire, on ne chôme pas, El-Hamdoulillah». l'augmentation des prix épouse les exigences du marché comme tient à expliquer Mohamed, gérant d'une pâtisseries spécialisée dans les gâteaux orientaux à El Biar. «J'ai commencé à 200 DA le kilo de griouèche et 400DA pour la Chamia et à 35 DA la pièce pour les autres genres, mais avec la hausse du prix des matières de base, le kilo de griouèche par exemple est cédé à 400 DA cette année et la pièce de 50 à 70DA ». Commerce juteux et lucratif Alger et les autres grandes villes ont vu, en l'espace d'une décennie, fleurir des magasins vantant leur savoir-faire dans la préparation de gâteaux traditionnels et modernes, souvent fusion entre la pâtisserie française et celle orientale. Si au début de l'aventure, ils n'étaient que quelqu'uns, aujourd'hui, la tendance est à la généralisation. Légalement ou au noir, de plus en plus de cuisines se transforment en lieux dédiés aux gâteaux. La plupart des tenants de ce commerce sont des femmes qui ont appris sur le tas ayant côtoyé une voisine syrienne ou jordanienne ou ayant elles-mêmes vécu quelque temps dans les pays du Machreq. Ce phénomène a certainement de beaux jours devant lui et il est fort à parier que de plus en plus de femmes finiront l'adopter. Les hommes aussi se sont introduits dans cet univers auparavant exclusivement féminin. Beaucoup de clients préfèrent la pâtisserie de ces hommes ; ils seraient plus professionnels et plus «créatifs» surtout en patisserie occidentale, «moi je trouve que les hommes réussissent la patisserie mieux que les femmes, c'est peut-être par le fait qu'ils veulent dépasser la femme dans le domaines qui était autrefois sien», nous affirme Mourad qui achète tous ses gâteaux auprès d'un pâtissier à Saïd-Hamdine. Petit métier de la débrouille pour d'autres De jeunes chômeurs, tentent avec plus ou moins de succès, d'investir ce créneau pour aider leurs familles ou pour subvenir à leurs propres besoins. C'est l'ère de la débrouillardise où les plus imaginatifs, les plus futés aussi, au lieu de faire la manche, préfèrent s'adonner à quelque modeste activité marchande ne demandant généralement que de modestes investissements matériels et financiers mais pouvant cependant s'avérer quelque peu rentable. C'est le cas de plusieurs femmes et jeunes filles qui s'occupent ainssi de la confection des gâteaux chez elles. «Ce métier nous permet d'acheter, non seulement le pain mais aussi la «viande» du jour», nous dira Fella en rigolant. Cette dernière a abandonné ses études pour suivre une formation dans une école spécialisée dans la cuisine et les gâteaux. «Je n'ai pas pu terminé mes études, faute de moyens, alors j'ai suivi une formation dans une école de cuisine à Blida et maintenant j'ai ma propre clientèle et je travaille durant toute l'année chez moi». Même cas pour Farid qui après sa formation a ouvert un petit magasin dans le grand marché de Koléa où il vend toutes sorte de gâteaux qu'il confectionne lui-même à l'exception des gâteaux traditionnels que sa mère prépare pour lui. Ses prix sont très abordables, selon plusieurs clients : 30DA ceux aux amandes et 20DA les gâteaux aux cacahuètes, ce qui explique la longue file devant son petit magasin à quelques jours de l'Aïd. L'hygiène, la grande inconnue ! Il est vrai que le commerce des gâteaux connaît un boom et une nette progression côté esthétique visuelle de même qu'une variété infinie où chacun rivalise d'imagination, mais certains problèmes restent néanmoins posés, notamment ceux de l'hygiène et la conservation de ces sucreries. Plusieurs personnes achètent sans se soucier des conditions dans lesquelles ces gâteaux ont été faits ou sur les ingrédients les composant… «Il est vrai que les magasins de nos jours agrémentent leurs vitrines pour appâter le client, mais il est tout de même recommandé au consommateur d'être très vigilant, il faut être sûr de la bonne qualité des ingrédients et de la composition du gâteau aussi», nous affirme M. Hammich, chef-cuisinier et patissier émérite à l'hôtel Amraoua de Tizi-Ouzou. D'autre part les multiples colorants, censés être alimentaires, peuvent être néfastes pour la santé au vue de leurs compositions chimiques, nous révéle un biologiste spécialisé dans le contrôle de la qualité alimentaire. Quand fête rime avec gourmandise ! Il faut avouer que l'importante demande de gâteaux par les Algériens est due à certaines habitudes et exigences traditionnelles. Les Algériens déboursent de grosses sommes juste pour avoir sur leurs tables toutes sortes de gâteaux , et ce quelle que soit l'occasion festive. Cela ne s'arrange pas avec la flambée des prix des ingrédients nécessaires à la préparation de ces gâteries. «Cela ne devrait être, en aucun cas, une obligation. Tout dépend des moyens de chacun d'entre nous», déplore ammi Mouloud, un viel Algérois qui a longtemps vécu à l'étranger et qui estime que les fêtes ne devraient pas se limiter aux gâteaux ruineux pour le budget familial. Il est bien révolu le temps où les maîtresses de maison préparaient elles-même leurs gâteaux, pour les fêtes ou les évènements religieux. Lors de chacune de ces occasion, les femmes se rassemblaient et s'entraidaient pour la préparation de ces gâteaux traditionnels, nécessitant un savoir-faire indéniable. Ces réunions féminines faisaient partie des us ancrés dans la vie quotidienne . «Autrefois les femmes s'activaient à préparer les gâteaux traditionnels à la veille de chaque occasion, les voisines ou les femmes d'une grande famille faisaient une sorte de concours entre elles, où chacune d'elles faisait montre de son talent et savoir-faire pour attirer l'attention de la belle famille, du mari ou pour avoir la réputation de la femme qui sait tout faire, «koul sbaâ bsnaâ» comme on dit chez nous», nous dira khalti Zahra qui continue d'un ton désabusé : «De nos jours on ne sens même plus l'odeur des gâteaux dans les foyers à la veille de l'Aïd, tout arrive emballé la veille. Les femmes d'aujourd'hui ont de plus en plus recours à l'achat de gâteaux prêts et ce à n'importe quel prix», ajoute-t-elle. Implication «socio-économique» de la femme au foyer ... Ce phénomène, vieux d'au moins dix ans, commence à «contaminer» beaucoup de ménages par l'instauration de nouvelles règles au sein de la cellule familiale. Des inconditionnels mais également des détracteurs s'expriment à ce sujet, «cette pratique trouve toute sa raison dans l'évolution verticale de la condition socio-économique de la femme, mais pas uniquement, selon l'analyse de M. Lefki, sociologue et professeur à l'université de Blida. De plus en plus de femmes se tournent vers les «professionnelles» du rouleau à patisserie pour passer commande des gâteaux de l'Aïd et différentes fêtes. «Si toutes les conditions matérielles sont réunies pour l'émancipation de la femme des affaires de la cuisine, il n'en demeure pas moins que les mœurs ont évolué. La femme, même désargentée, aspire de plus en plus à conquérir une liberté financière qui passe forcément par trouver une place dans le monde du travail et accessoirement se débarrasser des contraintes et des corvées ménagères». Si dans l'esprit, la distance que prend la femme vis-à-vis des exigences du toit familial ou conjugal s'inscrit dans la logique de l'évolution des mœurs, en réalité c'est tout un processus qui s'est mis doucement, mais sûrement, en place pour offrir à la femme ce substitut. Cependant sur le terrain, cette théorie de l'esprit n'a rien à voir avec la réalité des fours puisque les femmes qui passent commande le font souvent pour des raisons tout à fait pratiques, tiennent-elles, à le souligner. Le gain n'est toutefois pas la cause principale!! Les femmes qui passent commande le font souvent pour des raisons pratiques. «Je n'ai pas le temps. Déjà qu'entre le travail, les enfants et les repas, je n'arrive pas à m'en sortir, alors s'il faut encore préparer les gâteaux de l'Aïd!» s'exclame Nadia, fonctionnaire au sein d'une société publique. Elle n'est pas la seule à faire cette réponse. «Avec le boulot, nous n'avons pas le temps de préparer des gâteaux, moi par exemple je travaille jusqu'à la veille de l'Aïd et avec toutes les charges du foyer, notamment en ce mois sacré qui nécessite beaucoup de plats, de préparations en plus des sorties pour faire les achats de l'Aïd : tenues pour les enfants, affaires pour la maison, etc., comment voulez-vous que j'ai le temps de préparer les gâteaux ?!!, d'autant que je peux les avoir prêts à être dégustés dans les commerces», nous explique Samia secrétaire dans une société étrangère à Alger. D'autres femmes, «au foyer», celles-ci justifient l'achat de gâteaux par le fait que cela reviendrait moins onéreux que de les préparer chez elles sans parler de la fatigue, perte de temps, etc. ». D'autres femmes disent «ne pas maîtriser la préparation de certains gâteaux surtout avec le grand actuel, «pour la fête de l'Aïd, personnellement, je préfère goûter et savourer un peu de tout, alors à la maison je prépare mes gâteaux préférés que je ne trouve pas dans le commerce», nous avoue Manal, future maman et ex-policière. Les gâteaux aux amandes ne sont pas à la portée de toutes les bourses, faute de temps mais également de moyens. En témoignent les prix affichés par pièce cédée entre 35 et 50 DA. Nora, la quarantaine, enseignante, assume pleinement son choix : «J'ai toujours préparé mes gâteaux pour l'Aïd même quand je travaillais. Mais depuis que je suis seule avec mon mari, j'ai décidé de recourir aux pâtissières traditionnelles». Même si dépense est lourde, la quiétude e le gain de temps n'ont pas de prix », développe notre interlocutrice. Fatiha, 45 ans, fonctionnaire dans une banque nous avoue : «J'arrive à comprendre que par le passé les femmes avaient pour seul souci de cuisiner toute la journée et de préparer de délicieux gâteaux. Elles ne travaillaient pas à l'extérieur et n'avaient pour unique occupation que la préparation de succulents gâteaux pour toutes les occasions», et d'ajouter avec une pointe de nostalgie : «La situation a bien changé, depuis ! La femme n'a pas de temps pour ça, surtout quand il s'agit de faire de grandes quantités.» Quand les traditions restent les plus fortes... Certaines sont opposés catégoriquement à cette nouvelle pratique. «La femme algérienne est censée être au top de la préparation des gâteaux. Les femmes qui commandent des gâteaux, même pour l'Aïd, vraiment, ce sont des bras cassés ! Elles se cachent derrière l'argument du travail», s'indigne Samira, professeur à l'université d'Alger. «Rien ne remplace le plaisir de faire ses gâteaux soi-même», affirme Samira. Si le cas de Samira semble pour plusieurs personnes interrogées, «atypique», il reste néanmoins beaucoup de ménages à cheval sur les traditions. «L'ambiance de la préparation des gâteaux de l'Aïd est spéciale», attaque d'emblée Kader, à l'orée de la quarantaine, entre deux gorgées d'un thé sans saveur. «J'ai interdit à mon épouse de commander des gâteaux, non pour des considérations budgétaires mais tout bonnement parce que j'ai envie que mon fils vive les mêmes sensations que celles que j'ai vécues au cours de mon enfance. J'ai envie qu'il ait les mêmes souvenirs des fêtes de l'Aïd», nous explique-t-il. L'aisance financière engendre-t-elle la paresse ?! Il y a ceux qui accusent nouvelle classe bourgeoise d'avoir contribué à l'émergence de ce phénomène. «Ce sont des personnes qui veulent afficher autour d'elles une certaine image d'aisance», nous explique Samir, avant d'ajouter : «Les prix pratiqués sont exorbitants. Je préfère le makrout «taâ laâjouz» à ces sucreries qui fondent dans la bouche avant même d'être mâchées.» D'autres voix jettent l'opprobre sur ces pratiques qu'elles imputent volontiers à l'émergence d'une nouvelle bourgeoisie avide d'étaler maladroitement et ostensiblement ses marques ostentatoires de richesse. Salah, smicard invétéré, repousse d'un revers de la main ces habitudes «étrangères à notre société», «Vous avez vu les prix pratiqués; je préfère encore la «tronia» d'antan (un gâteau sec très consommé dans le centre du pays) à ces milliers de variétés bien trop onéreuses pour les revenus modestes» nous dira-t-il. Acheter... oui, mais pas à n'importe quel prix ! Les prix ne cessent d'augmenter selon les exigences du marché aussi bien dans les magasins spécialisés que chez les femmes-artisans. Yamina une de ces patissières, tentera de justifier cela : «J'ai commencé à à 30 DA la pièce, mais avec la hausse du prix du sucre, huile, cacahuètes, amandes et autres fruits secs, je suis contrainte d'exiger 45 DA cette année». Spécialisée dans les gâteaux traditionnels, son champ d'action ne se limite pas simplement aux fêtes de mariages mais s'étale sur le reste de l'année. «On travaille presque toute l'année quand on nous sollicite pour les circoncisions, les mariages, les occasions religieuses et les naissances. Pour vous dire, on ne chôme pas, El-Hamdoulillah». l'augmentation des prix épouse les exigences du marché comme tient à expliquer Mohamed, gérant d'une pâtisseries spécialisée dans les gâteaux orientaux à El Biar. «J'ai commencé à 200 DA le kilo de griouèche et 400DA pour la Chamia et à 35 DA la pièce pour les autres genres, mais avec la hausse du prix des matières de base, le kilo de griouèche par exemple est cédé à 400 DA cette année et la pièce de 50 à 70DA ». Commerce juteux et lucratif Alger et les autres grandes villes ont vu, en l'espace d'une décennie, fleurir des magasins vantant leur savoir-faire dans la préparation de gâteaux traditionnels et modernes, souvent fusion entre la pâtisserie française et celle orientale. Si au début de l'aventure, ils n'étaient que quelqu'uns, aujourd'hui, la tendance est à la généralisation. Légalement ou au noir, de plus en plus de cuisines se transforment en lieux dédiés aux gâteaux. La plupart des tenants de ce commerce sont des femmes qui ont appris sur le tas ayant côtoyé une voisine syrienne ou jordanienne ou ayant elles-mêmes vécu quelque temps dans les pays du Machreq. Ce phénomène a certainement de beaux jours devant lui et il est fort à parier que de plus en plus de femmes finiront l'adopter. Les hommes aussi se sont introduits dans cet univers auparavant exclusivement féminin. Beaucoup de clients préfèrent la pâtisserie de ces hommes ; ils seraient plus professionnels et plus «créatifs» surtout en patisserie occidentale, «moi je trouve que les hommes réussissent la patisserie mieux que les femmes, c'est peut-être par le fait qu'ils veulent dépasser la femme dans le domaines qui était autrefois sien», nous affirme Mourad qui achète tous ses gâteaux auprès d'un pâtissier à Saïd-Hamdine. Petit métier de la débrouille pour d'autres De jeunes chômeurs, tentent avec plus ou moins de succès, d'investir ce créneau pour aider leurs familles ou pour subvenir à leurs propres besoins. C'est l'ère de la débrouillardise où les plus imaginatifs, les plus futés aussi, au lieu de faire la manche, préfèrent s'adonner à quelque modeste activité marchande ne demandant généralement que de modestes investissements matériels et financiers mais pouvant cependant s'avérer quelque peu rentable. C'est le cas de plusieurs femmes et jeunes filles qui s'occupent ainssi de la confection des gâteaux chez elles. «Ce métier nous permet d'acheter, non seulement le pain mais aussi la «viande» du jour», nous dira Fella en rigolant. Cette dernière a abandonné ses études pour suivre une formation dans une école spécialisée dans la cuisine et les gâteaux. «Je n'ai pas pu terminé mes études, faute de moyens, alors j'ai suivi une formation dans une école de cuisine à Blida et maintenant j'ai ma propre clientèle et je travaille durant toute l'année chez moi». Même cas pour Farid qui après sa formation a ouvert un petit magasin dans le grand marché de Koléa où il vend toutes sorte de gâteaux qu'il confectionne lui-même à l'exception des gâteaux traditionnels que sa mère prépare pour lui. Ses prix sont très abordables, selon plusieurs clients : 30DA ceux aux amandes et 20DA les gâteaux aux cacahuètes, ce qui explique la longue file devant son petit magasin à quelques jours de l'Aïd. L'hygiène, la grande inconnue ! Il est vrai que le commerce des gâteaux connaît un boom et une nette progression côté esthétique visuelle de même qu'une variété infinie où chacun rivalise d'imagination, mais certains problèmes restent néanmoins posés, notamment ceux de l'hygiène et la conservation de ces sucreries. Plusieurs personnes achètent sans se soucier des conditions dans lesquelles ces gâteaux ont été faits ou sur les ingrédients les composant… «Il est vrai que les magasins de nos jours agrémentent leurs vitrines pour appâter le client, mais il est tout de même recommandé au consommateur d'être très vigilant, il faut être sûr de la bonne qualité des ingrédients et de la composition du gâteau aussi», nous affirme M. Hammich, chef-cuisinier et patissier émérite à l'hôtel Amraoua de Tizi-Ouzou. D'autre part les multiples colorants, censés être alimentaires, peuvent être néfastes pour la santé au vue de leurs compositions chimiques, nous révéle un biologiste spécialisé dans le contrôle de la qualité alimentaire. Quand fête rime avec gourmandise ! Il faut avouer que l'importante demande de gâteaux par les Algériens est due à certaines habitudes et exigences traditionnelles. Les Algériens déboursent de grosses sommes juste pour avoir sur leurs tables toutes sortes de gâteaux , et ce quelle que soit l'occasion festive. Cela ne s'arrange pas avec la flambée des prix des ingrédients nécessaires à la préparation de ces gâteries. «Cela ne devrait être, en aucun cas, une obligation. Tout dépend des moyens de chacun d'entre nous», déplore ammi Mouloud, un viel Algérois qui a longtemps vécu à l'étranger et qui estime que les fêtes ne devraient pas se limiter aux gâteaux ruineux pour le budget familial.