Dans cet entretien, cet économiste formé aux Etats-Unis d'Amérique, explique que l'Etat doit suivre un scénario dans lequel il doit privilégier les réformes économiques et les mener de manière efficace. Abdelhak Lamiri estime que les Algériens sont maîtres de leur destin et qu'ils peuvent faire face aux effets pervers de la crise économique internationale qui secoue, ces derniers temps, tous les pays de la planète, y compris les nations riches et industrialisées. Dans cet entretien, cet économiste formé aux Etats-Unis d'Amérique, explique que l'Etat doit suivre un scénario dans lequel il doit privilégier les réformes économiques et les mener de manière efficace. Abdelhak Lamiri estime que les Algériens sont maîtres de leur destin et qu'ils peuvent faire face aux effets pervers de la crise économique internationale qui secoue, ces derniers temps, tous les pays de la planète, y compris les nations riches et industrialisées. Midi Libre : Quel est l'impact de la crise financière internationale sur l'économie algérienne, notamment après la chute du prix du baril de pétrole ? Abdelhak Lamiri : Tout d'abord, il faut dire que les conséquences, bonnes, moyennes ou mauvaises, du krach financier international sur notre économie vont être ce qu'elles sont. C'est-à-dire que cela va dépendre de nos capacités de riposte. Ainsi trois scénarios possibles se présentent à notre économie. Le scénario catastrophe, c'est celui que les pouvoirs publics doivent éviter à tout prix. Ce sont les répercussions directes à court terme sur les dépenses publiques de l'Etat et l'impact sur la population, mais pas tout de suite. Le second scénario est celui où l'Etat va continuer d'ignorer les messages de l'économie internationale. C'est à dire que le gouvernement va continuer à avoir le même budget et injecter de l'argent dans l'économie, surtout dans les infrastructures publiques et les logements. Là, la crise va être diffusée et pendant deux années, nous aurons l'illusion que rien ne nous touche et nous allons continuer à mener le même train de vie.Et puis, quand nous aurons épuisé nos ressources en termes de réserves et les marchés financiers auront des difficultés à octroyer des crédits, il faudra faire de l'économie réelle. Les travailleurs employés dans des chantiers vont devenir des chômeurs, il y aura également une crise sociale très importante. Ce scénario est aussi à éviter. Enfin, le troisième scénario, et c'est le plus important à mon sens, consiste à mener à bien des réformes économiques de manière efficace et profiter de cette crise. Il s'agit d'utiliser une partie des réserves financières pour réaliser trois objectifs. Il faut, en fait, garder une partie des réserves pour effectuer les réajustements nécessaires, tel que le transfert des ressources. Qualifier les ressources humaines et le système de formation, ainsi que le recyclage des cadres et des personnels. Car, on ne peut jamais avoir une économie performante sans qualifier les ressources humaines. Il y a lieu également d'orienter les ressources financières et bancaires de l'Etat vers l'investissement, surtout privé et à un degré moindre vers le secteur public national. C'est-à-dire, il faut arriver à un rythme de création de 100.000 petites et moyennes entreprises par an. Car, nous créons peu de PME actuellement. Il devient impérieux de mettre en place 1 million de PME dans les quatre années à venir et les gérer par des ressources humaines qualifiées. Le troisième axe à développer consiste à moderniser les institutions et le management, ainsi que les ministères et les wilayas en transformant leurs capacités managériales. A ce moment, dans 3 ou 74 ans nous aurons épuisé les réserves de la manne pétrolière et on aura créé une économie industrielle dynamique qui va exporter. On aura mis en place une économie durable qui va très bien résister à la crise. J'espère que nos décideurs iront vers ce troisième scénario qui est meilleur. Ainsi, on aura profité de la crise pour pouvoir mener à bien une véritable réforme qui va engendrer une économie durable. Les PME/PMI créatrice de richesses et d'emplois manquent terriblement de liquidités et de sources de financement au point où des entrepreneurs estiment qu'elles sont en voie de disparition en raison de l'absence de concurrence et de compétitivité. Qu'en pensez-vous ? Absolument, il y a un problème et tout le monde est d'accord pour dire qu'on va à l'économie de marché trop vite alors qu'on n'a pas qualifié nos entreprises qui sont mal gérées et mal préparées à la compétitivité. Regardez les Européens, ils nous disent d'ouvrir notre économie dans 5 ou 6 ans, mais pour ce qui est de l'agriculture, on va voir plus tard en négociant. Nous aussi, nous aurions pu imposer les mêmes conditions en étudiant chaque secteur en fonction de nos capacités, de nos moyens, des réalités et de la productivité. C'est-à-dire discuter secteur par secteur de la mise à niveau des entreprises. On s'est engagé sur un calendrier, maintenant il faut qu'il y ait un plan Marshal en direction de nos PME pour leur mise à niveau et surtout celle de son environnement aussi. Il est vrai qu'il y aura un problème de liquidités pour ces PME, mais le gouverneur de la Banque centrale vient de dire dans une de ses déclarations qu'il existe 10 milliards de dollars gelés et qu'ils ne savent pas fructifier par l'octroi de crédits. C'est un problème, car le secteur bancaire gère des ressources alors que les PME ont en besoin, soit pour l'économie actuelle, soit pour créer de nouvelles entreprises. Certes, il n' y aura plus de liquidités, mais il y aura des crédits octroyés par les banques pour l'importation. Il y aura des liquidités pour les entreprises publiques qui ne rembourseront jamais. Il faut que le secteur bancaire soit restructuré, recapitalisé pour avoir les paramètres qui lui donneront les crédits d'investissement. A ce moment, on aurait levé ce problème et l'Etat doit investir dans la formation et le développement en modernisant les capacités managériales et l'ingineering pour en faire bénéficier nos PME. Ainsi, on peut les mettre à niveau. Cependant, il faut aller vers 1,5 million de PME alors, sinon on risque de se retrouver avec 300.000 PME seulement. L'Algérie est un pays mono exportateur (hydrocarbures) et les exportations industrielles ne représentent que 5 % du total du volume des exportations, n'est-ce pas là un risque pour nos entreprises? On va trop vite du fait que les exportations hors hydrocarbures ne se développent pas, alors qu'en 2000, on avait 9 milliards de dollars d'importations, et nous aurons atteint 37 milliards de dollars d'ici quelques années. L'économie nationale n'est pas compétitive malgré l'injection de 140 à 150 milliards de dollars dans le plan de relance économique. Cela reste sans changement et ce n'est pas la bonne solution et la meilleure ordonnance. La bonne solution de rechange réside dans la qualification des ressources humaines, le management et le développement de la PME. Voilà les trois axes du futur plan de relance et de riposte à la crise internationale. Que faut –il pour rentabiliser les 150 milliards de dollars dans des investissements productifs ? Bien sûr, ce sont des investissements dont on a besoin dans la réalisation des infrastructures, mais pas à ce niveau là. Car, on ne peut pas avoir des infrastructures de haut niveau avec des qualifications humaines de très bas niveau. Il faut un équilibre et c'est la raison pour laquelle le plan avait intégré des ressources pour qualifier les compétences humaines et surtout sur le plan qualitatif. Il s'agit de développer la PME et aller vers la création de 100.000 PME par an. Il faut, rappelons-le, moderniser le management, les infrastructures et les institutions. Car, on aura beaucoup d'infrastructures inutilisées et mal gérées. Quelle pourrait être la leçon à retenir de cette crise? L'avenir est entre nos mains. La science a des solutions. Va-t-on continuer dans l'erreur. De toute façon, la crise est une excellente opportunité pour nous corriger et aller vers la construction d'une économie durable qui va bien riposter aux futures crises que connaîtra l'économie internationale. A. A. Midi Libre : Quel est l'impact de la crise financière internationale sur l'économie algérienne, notamment après la chute du prix du baril de pétrole ? Abdelhak Lamiri : Tout d'abord, il faut dire que les conséquences, bonnes, moyennes ou mauvaises, du krach financier international sur notre économie vont être ce qu'elles sont. C'est-à-dire que cela va dépendre de nos capacités de riposte. Ainsi trois scénarios possibles se présentent à notre économie. Le scénario catastrophe, c'est celui que les pouvoirs publics doivent éviter à tout prix. Ce sont les répercussions directes à court terme sur les dépenses publiques de l'Etat et l'impact sur la population, mais pas tout de suite. Le second scénario est celui où l'Etat va continuer d'ignorer les messages de l'économie internationale. C'est à dire que le gouvernement va continuer à avoir le même budget et injecter de l'argent dans l'économie, surtout dans les infrastructures publiques et les logements. Là, la crise va être diffusée et pendant deux années, nous aurons l'illusion que rien ne nous touche et nous allons continuer à mener le même train de vie.Et puis, quand nous aurons épuisé nos ressources en termes de réserves et les marchés financiers auront des difficultés à octroyer des crédits, il faudra faire de l'économie réelle. Les travailleurs employés dans des chantiers vont devenir des chômeurs, il y aura également une crise sociale très importante. Ce scénario est aussi à éviter. Enfin, le troisième scénario, et c'est le plus important à mon sens, consiste à mener à bien des réformes économiques de manière efficace et profiter de cette crise. Il s'agit d'utiliser une partie des réserves financières pour réaliser trois objectifs. Il faut, en fait, garder une partie des réserves pour effectuer les réajustements nécessaires, tel que le transfert des ressources. Qualifier les ressources humaines et le système de formation, ainsi que le recyclage des cadres et des personnels. Car, on ne peut jamais avoir une économie performante sans qualifier les ressources humaines. Il y a lieu également d'orienter les ressources financières et bancaires de l'Etat vers l'investissement, surtout privé et à un degré moindre vers le secteur public national. C'est-à-dire, il faut arriver à un rythme de création de 100.000 petites et moyennes entreprises par an. Car, nous créons peu de PME actuellement. Il devient impérieux de mettre en place 1 million de PME dans les quatre années à venir et les gérer par des ressources humaines qualifiées. Le troisième axe à développer consiste à moderniser les institutions et le management, ainsi que les ministères et les wilayas en transformant leurs capacités managériales. A ce moment, dans 3 ou 74 ans nous aurons épuisé les réserves de la manne pétrolière et on aura créé une économie industrielle dynamique qui va exporter. On aura mis en place une économie durable qui va très bien résister à la crise. J'espère que nos décideurs iront vers ce troisième scénario qui est meilleur. Ainsi, on aura profité de la crise pour pouvoir mener à bien une véritable réforme qui va engendrer une économie durable. Les PME/PMI créatrice de richesses et d'emplois manquent terriblement de liquidités et de sources de financement au point où des entrepreneurs estiment qu'elles sont en voie de disparition en raison de l'absence de concurrence et de compétitivité. Qu'en pensez-vous ? Absolument, il y a un problème et tout le monde est d'accord pour dire qu'on va à l'économie de marché trop vite alors qu'on n'a pas qualifié nos entreprises qui sont mal gérées et mal préparées à la compétitivité. Regardez les Européens, ils nous disent d'ouvrir notre économie dans 5 ou 6 ans, mais pour ce qui est de l'agriculture, on va voir plus tard en négociant. Nous aussi, nous aurions pu imposer les mêmes conditions en étudiant chaque secteur en fonction de nos capacités, de nos moyens, des réalités et de la productivité. C'est-à-dire discuter secteur par secteur de la mise à niveau des entreprises. On s'est engagé sur un calendrier, maintenant il faut qu'il y ait un plan Marshal en direction de nos PME pour leur mise à niveau et surtout celle de son environnement aussi. Il est vrai qu'il y aura un problème de liquidités pour ces PME, mais le gouverneur de la Banque centrale vient de dire dans une de ses déclarations qu'il existe 10 milliards de dollars gelés et qu'ils ne savent pas fructifier par l'octroi de crédits. C'est un problème, car le secteur bancaire gère des ressources alors que les PME ont en besoin, soit pour l'économie actuelle, soit pour créer de nouvelles entreprises. Certes, il n' y aura plus de liquidités, mais il y aura des crédits octroyés par les banques pour l'importation. Il y aura des liquidités pour les entreprises publiques qui ne rembourseront jamais. Il faut que le secteur bancaire soit restructuré, recapitalisé pour avoir les paramètres qui lui donneront les crédits d'investissement. A ce moment, on aurait levé ce problème et l'Etat doit investir dans la formation et le développement en modernisant les capacités managériales et l'ingineering pour en faire bénéficier nos PME. Ainsi, on peut les mettre à niveau. Cependant, il faut aller vers 1,5 million de PME alors, sinon on risque de se retrouver avec 300.000 PME seulement. L'Algérie est un pays mono exportateur (hydrocarbures) et les exportations industrielles ne représentent que 5 % du total du volume des exportations, n'est-ce pas là un risque pour nos entreprises? On va trop vite du fait que les exportations hors hydrocarbures ne se développent pas, alors qu'en 2000, on avait 9 milliards de dollars d'importations, et nous aurons atteint 37 milliards de dollars d'ici quelques années. L'économie nationale n'est pas compétitive malgré l'injection de 140 à 150 milliards de dollars dans le plan de relance économique. Cela reste sans changement et ce n'est pas la bonne solution et la meilleure ordonnance. La bonne solution de rechange réside dans la qualification des ressources humaines, le management et le développement de la PME. Voilà les trois axes du futur plan de relance et de riposte à la crise internationale. Que faut –il pour rentabiliser les 150 milliards de dollars dans des investissements productifs ? Bien sûr, ce sont des investissements dont on a besoin dans la réalisation des infrastructures, mais pas à ce niveau là. Car, on ne peut pas avoir des infrastructures de haut niveau avec des qualifications humaines de très bas niveau. Il faut un équilibre et c'est la raison pour laquelle le plan avait intégré des ressources pour qualifier les compétences humaines et surtout sur le plan qualitatif. Il s'agit de développer la PME et aller vers la création de 100.000 PME par an. Il faut, rappelons-le, moderniser le management, les infrastructures et les institutions. Car, on aura beaucoup d'infrastructures inutilisées et mal gérées. Quelle pourrait être la leçon à retenir de cette crise? L'avenir est entre nos mains. La science a des solutions. Va-t-on continuer dans l'erreur. De toute façon, la crise est une excellente opportunité pour nous corriger et aller vers la construction d'une économie durable qui va bien riposter aux futures crises que connaîtra l'économie internationale. A. A.