Paradoxale est la situation en Algérie. Au moment où le peuple algérien patauge dans une misère de toutes les couleurs, les officiels, toutes les parties confondues, s'amusent, l'esprit bien conforté par de belles oeillades arrivant de Londres, de Paris, de Washington, et de Madrid, de la pluie et du beau temps. Révoltante est cette attitude des autorités. Mais jusqu'où la révolte peut-elle mener? Décidément, il s'agit de tourner le dos à tous ce qui est officiel et de ne s'adresser, de ne parler et de n'écouter désormais que le peuple. Car n'est-ce pas que l'autorité qui permet à l'Etat de faire et de défaire est illégitime? Peuple algérien, sais-tu ce qui se passe en Algérie? Les médias algériens te parlent-il de ta faim, de tes angoisses, de tes soifs, de tes misères, de ton chômage, de tes peines, de tes malheurs, de tes bonheurs que tu réalise rarement et à prix de mille peines, de tes peurs, de tes nuits blanches, de tes espoirs, de tes ambitions, de tes rêves? Les medias algériens ne te parlent-ils pas des chiens qui meurent de sida en Australie, des enfants qui naissent avec quatre pieds en Indes, du derniers album de Hadj Brahim tandis que des Algériennes et des Algériens meurent dans l'anonymat par les balles assassines, criminelle du pouvoir? Certains diraient que j'exagère, pourtant la chose est très simples: les quelques journaux privés qui s'intéressent au peuple ne le font que pour entretenir l'illusion d'une presse écrite indépendante et d'une Algérie souveraine qui consacre la libre expression. N'a-t-on pas vu des personnes cupides qui, confondant entre les fins et les moyens, n'ont d'autres souci que celui de se remplir les poches par l'argent vilain d'une publicité frustrante vis-à-vis du peuple pauvre, des personnes incultes au sens propre du terme, qui n'ont aucune relation avec le journalisme, ni au sens pratique ni au sens théorique, se faire agréer des journaux tandis que de très grands journalistes, connus de tous, intègres, honnêtes et qui ont fait leur preuves sur le terrain se font cracher les « refus » crasseux des « autorités » sur la figure? Peuple algérien, sait-tu que cette Algérie pour laquelle des milliers d'Algériennes et d'Algériens se sont sacrifiés n'est toujours pas indépendante? Sait-tu que les conseillers du ministre de l'éducation nationale sont des Français? Sait-tu également, mon peuple, que pour acquérir la nationalité américaine il faut prêter un serment, la main sur la Constitution des USA, et jurer de défendre les intérêts américains au prix de sa vie et que nombre de nos ministres possèdent cette nationalité, à leur tête le « petit » Khelil qui parle très bien l'anglais? As-tu, cher peuple, entendu parler à la télévision de Benyoucef Mellouk, ce valeureux Algérien qui a osé dénoncer les magistrats faussaires et qui a déclenché l'affaire des faux moudjahiddines? Sais-tu qu'il est condamné pour quatre mois de prison ferme après 18 ans de cafouillage dans les tribunaux? Sais-tu, ô mon peuple bien aimé, que la majeure partie de ceux que l'on appelle les « cadres de l'Etat », « les officiers », « les agents du DRS » n'ont aucun niveau d'instruction et que la seule chose qu'ils sachent faire consiste à se montrer arrogants et, lorsque c'est nécessaire, dégainer pour faire couler le sang de tes enfants? Oh, mon peuple! Sais-tu que, il y a à peine quelques jours, les services de « sécurité » ont commis un ignoble assassinat en Kabylie, dans la région d'Ait Yahia Moussa, là où est né Krim Belkacem? Aissa, un père de 45 ans environ, possédant des ruches à quelques centaines de mètres de sa maison sise en pleins bois dans le village montagnard de Ait-atallah, est allé les visiter, histoire de les alimenter. Quelques soldats qui étaient juste dans les environs, dans le cadre d'un ratissage, l'ayant vu, le criblent de balles. Bavure? Peut-être. Mais pourquoi les services de sécurité exigent-ils de la famille de la victime de signer un PV attestant que le mort est un « terroriste », chose sans laquelle ils affichent un refus catégorique de leur remettre la dépouille? Quel est le terroriste dans ce cas? N'est-ce pas, cher peuple, l'Etat qui, par le biais de ses auxiliaires, terrorise la population en commettant des assassinats à ciel ouvert et en militarisant chaque jour un peu plus l'espace public? La dépouille a été remise hier à la famille de la victime mais ce ne fut plus celle d'un pauvre citoyen peinant à gagner un morceau de pain en vendant du miel mais celle d'un « terroriste ». Hier encore, sais-tu ce qui s'est passé en Kabylie mon cher peuple? La presse indépendante ne t'en a pas parlé? Si. Mais de quelle manière? » Deux personnes, un chauffeur de taxi et un mécanicien, ont trouvé la mort hier vers 13h dans l'explosion d'une bombe artisanale » Ce qui est vrai dans cette histoire est que, effectivement, une bombe a exposé hier, aux environs de 13h prés de Ain Zaouia, dans la route reliant Drâa-el-mizan à Boghni, et que deux personnes ont été mortes. Mais de quelle mort s'agit-il? C'est la bombe qui les a déchiquetés? Les services de Zerhouni n'ont pas encore terminé avec les affaires de Khider, Krim, Mecili, les 22000 disparus pour s'en occuper et les programmes de l'ENTV sont tellement chargés, étant donné que cette télévision mythique doit s'occuper des grandes affaires d'intérêt mondial comme la « toux de la chatte de Obama », « les sandales en caoutchouc de Omar el Bachir », « la couleur des yeux d'Angéla Merkel », etc., qu'elle ne trouve même la minute requise pour annoncer la nouvelle. Sais-tu, mon cher peuple, le taxieur et le mécanicien ne sont pas victimes de l'explosion d'une bombe comme l'on l'a si bien dit dans notre « presse indépendante », ce sont, au contraire, les gendarmes qui observent un barrage permanent à environ un kilomètre du centre ville de la commune de Ain Zaouia qui ont tiré sur la voiture où étaient ces deux personnes, paniquées par le bruit de la déflagration, et l'ont criblée de balles. Une preuve? Il n'y a qu'à voir la voiture et les corps de Boualem Amiziane le taxieur et Kamel Oubraham le mécanicien auxquels on a logé des balles dans le crâne, pour s'en convaincre. De plus, des témoins oculaires l'ont dit et le disent toujours. En attendant, mon cher peuple, tu dois savoir que ceux qui parlent en ton nom, ceux qui gouvernent en ton nom, ceux qui décident en ton nom, sont aussi ceux-là qui dilapident les richesses du pays en ton nom, qui te volent ta dignité en ton nom, qui offrent l'Algérie en cadeau aux barons de la finance internationale en ton nom, qui violent les droits les plus élémentaires des Algériennes et des Algériens en ton nom, qui assassinent tes rêves, tes espoirs, tes ambitions, tes hommes honnêtes et intègres au nom de ton histoire, qui te trahissent et trahissent Dieu au nom de ta religion. Oh, mon peuple bien-aimé, tu dois apprendre à prendre ton destin en main, tu dois apprendre à ne laisser personne ni parler, ni gouverner, ni décider, et encore moins assassiner l'Algérie en ton nom. Mon cher peuple, l'Algérie t'appartient, son passé et son présent aussi; il t'appartient de la sauver ou de la laisser périr sous les bottes des petits dieux de la mythologie impérialiste que sont tes tortionnaires. Réveille-toi, ô mon peuple bien-aimé!