Le président du conseil régional de déontologie médicale de l'Est à Liberté “Pour une pratique saine de la médecine dans les cliniques privées” Liberté le 19 décembre 2010 Comportement de certains médecins vis-à-vis des patients, certaines pratiques indignes de cette profession censée apporter réconfort, soulagement et guérison aux malades, et surtout des actes médicaux qui n'ont pas lieu d'être et qui sont payés au prix fort, cela n'a pas laissé indifférent le conseil de l'ordre des médecins. Le professeur Ayadi, éminent chirurgien, président du conseil régional de déontologie médicale et vice-président du conseil national dénonce ces pratiques. Il nous a déclaré qu'“il y a eu, depuis l'institution de ce conseil, 43 plaintes de malades”. “La commission de discipline a étudié ces plaintes. Elle a décidé des mesures qui ont été transmises à la direction de la santé et de la population (DSP) pour exécution. Nous avons décidé, entre autres, la fermeture d'un cabinet médical”, dit-il. Concernant le remplacement des médecins en période de congés, une pratique pour le moins illégale puisque des spécialistes se font remplacer par des généralistes qui ordonnent des actes médicaux de spécialistes, le professeur rétorque : “Selon le code de déontologie, il faudrait une licence délivrée par le conseil de l'ordre, licence qui doit être entérinée par la DSP. Donc, ce sont pour nous des remplacements au noir passibles du conseil de discipline.” Au cours de cet entretien avec le président du conseil, la question du détournement des malades a été également évoquée. “C'est une pratique que nous avons toujours dénoncée puisqu'elle porte atteinte aux intérêts du patient qui a le droit de choisir le médecin en qui il a confiance et qu'il juge compétent pour traiter sa maladie”, nous déclare-t-il, ajoutant que “les œuvres sociales établissent des conventions avec les cliniques sans passer par le conseil de l'ordre. C'est une dérive grave aussi bien pour les responsables des œuvres sociales que pour les établissements privés de santé. C'est une concurrence déloyale au détriment de la santé du malade qu'on prend en otage parce qu'on lui impose de se faire soigner dans telle ou telle clinique sans se soucier de son état de santé qui nécessite l'intervention de tel ou tel spécialiste. Nous allons porter plainte contre ces pratiques qui portent atteinte à la corporation”. Certaines cliniques de santé engrangent des millions en l'espace de quelques semaines sans que les patients profitent des soins. En effet, dès l'arrivée d'un malade, il est tout de suite pris en charge par le service d'accueil qui l'oriente vers un médecin qui prescrit directement des analyses, une radiographie, une échographie et parfois même un scanner. Le tout bien sûr à la clinique et au prix fort. Passé cette étape, le patient, trimballé d'un service à l'autre, se retrouve devant un autre médecin dit spécialiste qui fait “paniquer” le malade en lui inventant une infection qui pourrait, si une thérapie adéquate n'est pas ordonnée, le conduire à la mort. De là, c'est l'intervention chirurgicale qui se profile. Le docteur le prépare psychologiquement en lui faisant miroiter une guérison rapide dès que le mal aura été extirpé après l'opération qui coûtera, pour les plus bénignes d'entre elles, entre 80 et 100 000 dinars. En réalité, la malade n'a nullement besoin d'une intervention, même pas d'une petite chirurgie ; on se contente de “l'ouvrir” sous anesthésie et on le recoud, lui faisant croire que l'opération a parfaitement réussi et qu'il se rétablira très vite. Puisque n'étant pas spécialiste en la matière et ayant peur pour sa santé, le patient, qui a toute confiance en son médecin, croit tout ce que celui-ci lui dit et suit à la lettre les prescriptions faites. Les paiements qui se font exclusivement en espèces échappent à tout contrôle des services de l'Etat. Les patients, futurs opérés, s'acquittent à l'avance des honoraires et des frais des actes médicaux qui sont surfacturés. En effet, pour une simple ablation de la vésicule biliaire, on débourse entre 60 et 80 000 DA, une opération dont le coût réel ne dépasse pas 5 000 DA puisque le suivi postopératoire se fait à l'extérieur avec un traitement prescrit par le médecin. Pour le renouvellement des pansements, les soins locaux et les consultations qui suivent, le malade est encore contraint de mettre la main à la poche, alors que, normalement, tout le suivi postopératoire est pris en charge gratuitement, le paiement ayant déjà été effectué. À tous ces dépassements, il faut ajouter celui de la fraude fiscale de certains patrons de cliniques qui font peu cas de la réglementation en vigueur en ne déclarant pas leur chiffre d'affaires réel. On parle d'une évasion fiscale de l'ordre de plusieurs millions de dinars et qui dure depuis des années. Selon certaines indiscrétions, l'arnaque relative aux impôts consiste en la non-délivrance de factures aux malades opérés. On fait comprendre à ceux-ci que si on leur délivre le document en question, ils devraient s'acquitter du montant de la TVA. Déjà ruinés par les dépenses créées de toutes pièces par des actes médicaux qui n'ont pas lieu d'être, pour le coût de l'opération, les pauvres malades préfèrent ne pas demander la facture. Et, donc, tout le monde est “gagnant”. En réalité, le dindon de la farce, c'est le pauvre malade qui croit s'en sortir à bon compte alors qu'il a été plumé avec art et doigté. Les hôpitaux et les établissements publics de santé ont la réputation de fournir de mauvais services parce que dépourvus de moyens et ne comptant parmi leurs personnels les “bons médecins”, juste là pour servir de centres de recrutement pour les cliniques privées. Ces dernières ont leurs sergents recruteurs qui “conseillent” les malades d'aller vers tel ou tel médecin ou telle ou telle clinique. Ce que le patient, crédule et apeuré, fait sans réfléchir, pour se retrouver dans le circuit infernal sans pour autant se faire soigné véritablement. La situation est alarmante à Annaba où la santé des citoyens est malmenée, voire menacée par certains praticiens. Non-conformité des locaux, équipement obsolète et ne répondant pas aux normes sont légion. La décision de la commission ministérielle est tombée comme un couperet. La fermeture de la clinique Tahar-Saïdani à Annaba a été perçue par beaucoup comme étant un avant-goût de ce qui attend d'autres établissements. En effet, dans les autres cliniques, on se prépare à affronter ladite commission en procédant à la hâte à certains travaux et à l'acquisition de nouveaux équipements et appareils à même de présenter ces centres hospitaliers sous leur meilleur jour.