Le verdict de la LAADH en matière de droits de l'homme en Algérie est sans appel.«Il y a une régression des droits de l'homme en Algérie et chaque année c'est encore pire que la précédente», a déclaré hier le président de la LADDH, maître Mustapha Bouchachi, qui animait une conférence de presse au siège de cette organisation à Alger, aux côtés de Ali Yahia Abdenour, président d'honneur de la ligue. Selon le conférencier, la torture continue d'être pratiquée. «C'est une pratique générale», tonne le président de la LADDH, qui affirme avoir des témoignages de plusieurs personnes torturées. Bouchachi, qui appelle à revoir les procédures pénales, souligne que «la justice n'a jamais ouvert des enquêtes sur ces cas de torture». «La torture, c'est un crime d'Etat», poursuit, sans complaisance, le président de la LADDH qui affirme que la protection des citoyens de ce genre de pratique «n'a jamais été incluse dans les différentes modifications apportées à la loi ces dernières années». Les enseignants grévistes, le mouvement associatif, les événements de Berriane, les centres d'attente pour les étrangers, l'UPM étaient hier autant de sujets développés par le responsable de la LADDH qui souligne que cela entre dans le cadre des rencontres organisées périodiquement par la ligue pour faire une «évaluation des droits de l'homme en Algérie». Ainsi la situation des enseignants contractuels qui étaient hier à leur 17e jour de grève de la faim est qualifiée de «grave» par le conférencier qui note «que l'Etat a trouvé le moyen de recruter 100.000 policiers» mais refuse de réintégrer et régulariser des enseignants qui ont, dit-il, servi dans les pires moments qu'a vécus l'Algérie et dans des régions dont personne n'en voulait. «Le plus dangereux, c'est le mépris observé par le ministère de l'éducation qui n'a pas voulu ouvrir de dialogue avec les enseignants grévistes», ajoute M. Bouchachi qui note que cette absence de dialogue est une «atteinte aux droits sociaux» des enseignants qui ne demandent, soutient-il encore, qu'à vivre et faire vivre leurs familles. Concernant les événements de Berriane, le président de la LADDH a affirmé hier que des centaines de familles de la région sont toujours réfugiées dans des écoles. Il soulignera que contrairement à la version officielle, des familles entières se trouvent encore dans des salles de classe. «Le problème de Berriane a été traité uniquement sur le plan sécuritaire», s'est désolé l'avocat qui souligne que les véritables associations civiles sont embrigadées. Par ailleurs, abordant le projet de Nicolas Sarkozy d'unir les deux rives de la Méditerranée, le responsable de la Ligue de défense des droits de l'homme en Algérie ne voit pas d'un très bon œil cette démarche. «C'est une régression du Processus de Barcelone», a-t-il déclaré en soulignant que dans le projet, la LADDH n'a pas encore vu d'indices sur les droits de l'homme. Il expliquera que le Processus de Barcelone mentionnait clairement que la coopération économique est liée au respect des droits de l'homme. «L'UPM va donner de la légitimité aux pays qui bafouent les droits de leurs citoyens». De son côté, Ali Yahia Abdenour n'a pas mâché ses mots. «Nous ne portons pas de jugements sur les hommes ou leurs fonctions mais sur leur action», a déclaré d'emblée le président d'honneur de la ligue qui est revenu sur «l'aveu d'échec du président» lors de son dernier discours devant les P/APC. «On a semé le vent et on a récolté la tempête», dira Ali Yahia Abdenour pour qui le «départ du pouvoir» est une nécessité. Le président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme a affirmé «qu'aujourd'hui nous sommes dans la même situation que celle qui a prévalu en 1978 après la mort de Boumediène» qui a laissé, poursuit-il sa succession ouverte. La question, ajoute-t-il, c'est de savoir s'il faut changer le système en place depuis 1962 ou seulement procéder à des changements à l'intérieur de ce système. Le constat de l'avocat algérien est clair à ce sujet: «Le pouvoir veut reproduire le même système politique» en donnant comme preuve l'échec constaté par le chef de l'Etat lui-même et qui n'a conduit, soutient-il encore, à aucune démission d'un quelconque ministre.