Alors que les premiers manifestants avaient déjà rejoint leurs pairs affluant des autres quartiers d'Alger, au niveau de l'esplanade faisant face à la Grande-Poste, soit près de 4 km plus loin, la place des Martyrs peinait encore à se désengorger. M. Kebci - Alger (Le Soir) - Le vœu du peuple algérien pour un changement qui ne s'accommode pas de replâtrage et de simples opérations de toilettage est loin de relever «d'éphémères amours-vacances» ou de simples colères tout aussi passagères mais bel et bien d'une profonde aspiration à une rupture totale avec la gouvernance prévalant depuis le recouvrement par le pays de son indépendance. Hier encore, pour la sixième fois de suite depuis le 22 février dernier, il en a donné la plus éclatante des démonstrations avec une mobilisation de loin plus importante que celle enregistrée lors des cinq premiers vendredis de ce que d'aucuns n'hésitent pas à qualifier de révolution tranquille qui ne cesse d'ébahir le monde entier. Et comme le veut la tradition, la capitale a été, une fois de plus, le cœur battant de cette dynamique citoyenne avec des centaines de milliers de manifestants ayant battu le pavé pour crier leur soif de changement. Et la place des Martyrs, l'une des plus emblématiques de la capitale, tout comme l'est le quartier de Bab-el-Oued, dont elle constitue l'épicentre, a été au rendez-vous de ce sixième vendredi. Avec, il faut le relever, une mobilisation plus significative. Alors que les premiers manifestants avaient déjà rejoint leurs pairs affluant des autres quartiers d'Alger, au niveau de l'esplanade faisant face à la Grande-Poste, soit près de 4 km plus loin, la place des Martyrs peinait encore à se désengorger. Une véritable marée humaine qui n'a cessé, le long de la rue Bab-Azzoun, square Port-Saïd, Abane-Ramdane puis la rue Hocine- Asselah et la rampe Mustapha-Ben-Boulaïd qui la surplombe, de reprendre les traditionnels mots d'ordre «Djeïch chaâb khawa khawa», «Ouyahia dégage», «Kouninef dégage», «Bouteflika dégage», «FLN+RND, dégagez», «Nous ne cessons pas, chaque vendredi nous descendrons, dans les rues», portés, par ailleurs, sur des pancartes et banderoles. Avec, faut-il le relever une fois de plus, des slogans actualisés à la lumière des développements intervenus en cours de semaine. Comme le rejet de l'article 102 de la Constitution à l'application duquel a appelé, mardi dernier, le chef d'état-major et vice-ministre de la Défense nationale, lui préférant l'application de l'article 7 de la même loi fondamentale qui stipule que «le peuple est la source de tout pouvoir» et que «la souveraineté nationale appartient exclusivement au peuple», ou encore usant d'ironie en appelant à l'application de l'article 2019 qui stipule, selon eux, «Irhalou, yaâni irhalou (dégagez veut dire dégagez)», ou encore «Gaïd-Salah toi aussi dégage». Fait marquant lors de cette marche, témoignant du sens élevé du civisme des manifestants de tous les âges et des deux sexes, leur silence au passage d'une demeure mortuaire, à hauteur de la rue Abane-Ramdane. Une attitude qui s'ajoute à bien d'autres facettes d'une dynamique citoyenne qui ne cesse d'impressionner et d'ébahir localement mais surtout ailleurs, donnant une image du peuple algérien tout autre que celle, hideuse, véhiculée des années durant. M. K.