Son ombre a plané des semaines durant sur les manifestations. Hier, la rue a convoqué Gaïd Salah. Jusque-là épargné par les slogans, le chef d'état-major a été, hier, une cible de choix. «Ni Bensalah, ni Salah», ont tranché les manifestants. Nawal Imès - Alger (Le Soir) - Son hyperactivité et ses annonces qui se succèdent ont fini par démystifier le personnage de Gaïd Salah. En ce huitième vendredi de mobilisation populaire, les slogans se sont, une fois de plus, adaptés à l'évolution de la situation. Jusque-là très peu cité dans les slogans, le chef d'état-major a été destinataire de plusieurs messages, ne souffrant aucune ambiguïté. «Ni Bensalah, ni Salah», a scandé une foule compacte qui réitère ses revendications de voir l'ensemble du système partir. A coups de caricatures, d'un humour caustique doublés d'une grande lucidité, les manifestants ont rappelé au chef de l'état-major ses engagements, tous ses engagements. «Et les articles 7 et 8 ?», a écrit une jeune fille sur une énorme pancarte sur laquelle elle rappelle à Gaïd Salah qu'il s'était engagé à respecter la souveraineté populaire et pas seulement à faire appliquer le contesté article 102 de la Constitution. Au chef de l'état-major, qui estimait dans son dernier discours que les revendications de la rue n'étaient pas réalisables, une autre jeune femme lui répond clairement : «Nos revendications ne sont pas irréalisables !» Pour d'autres manifestants, la revendication est plus précise : ils ne demandent ni plus ni moins que le départ de Gaïd Salah de la tête de l'institution militaire. Pour beaucoup de manifestants, pas d'amalgame entre l'homme et l'institution : «Gaïd Salah n'est pas l'armée», écrit un homme qui arbore fièrement sa pancarte. La confiance entre l'homme et la rue est visiblement rompue. «Gaïd Salah, tu es avec Bensalah, partez tous», lit-on sur une pancarte alors que sur une autre, il est écrit «On a gagné la mi-temps mais Gaïd Salah a vendu le match». Signe d'une méfiance de plus en plus grande vis-à-vis des propositions de sortie de crise faites par le chef d'état-major, un manifestant a écrit «Méfiez-vous de l'avenir lorsque ce dernier porte un képi», a écrit un des manifestants. Ce huitième vendredi d'une mobilisation qui ne faiblit pas aura, une fois de plus, permis aux millions de manifestants de répondre clairement et sans ambiguïté aux dernières propositions faites par celui qui est désormais à la manœuvre. La rue rejette en bloc l'intronisation de Bensalah et le processus dans lequel il compte engager le pays. En dépit d'un dispositif répressif inédit, ils étaient encore des millions à le rappeler hier. N. I.