Le nom du successeur par intérim de Gaïd Salah a été rendu public très peu de temps après l'annonce officielle du décès du chef d'état-major : Saïd Chengriha, général-major et commandant des Forces terrestres. Sa désignation au poste de chef d'état-major de l'ANP n'est pas une surprise en soi. La règle veut en effet que le Commandement de l'armée soit attribué au chef des Forces terrestres ce qui a été le cas pour les trois derniers CFT qui se sont succédé. Nezzar, Lamari puis Gaïd Salah se trouvaient eux-mêmes à la tête de ce corps qui englobe près de 80% des effectifs de l'ANP. Promu général-major en 2003, Saïd Chengriha occupait le poste de commandant de la troisième Région militaire, avant d'être nommé à la tête des Forces terrestres en août 2018 dans le cadre de changements opérés en même temps dans cinq Régions militaires. Il accède ainsi à une fonction hautement stratégique qui le propulse à la troisième position dans la hiérarchie de l'ANP après le chef suprême des Forces armées (le président de la République, en l'occurrence) et le chef d'état-major. Agé de 74 ans, titulaire de plusieurs diplômes militaires, il a été, cependant, annoncé successeur par intérim au poste qu'occupait jusque-là le défunt Gaïd Salah. Avant sa confirmation, il faudra que celui-ci soit promu général de corps d'armée, soit le plus haut grade de l'ANP. Mais avant même que le fait ne soit établi, Saïd Chengriha se retrouve projeté au-devant de la scène dans une conjoncture très particulière, très sensible surtout, puisque l'ANP a été appelée à occuper un rôle qui ne lui est traditionnellement pas dévolu après le 22 février. Elle s'est, à la fois, investie dans une mission de stabilisation de la situation après les évènements ayant découlé de l'annonce de la décision de Abdelaziz Bouteflika de briguer un cinquième mandat, et d'un nettoyage profond de toutes les strates gangrenées par la corruption. Gaïd Salah a pleinement endossé ce rôle, lançant une opération anti-corruption qui a conduit les principaux symboles du régime Bouteflika en prison. Il en a fait l'axe même de la stratégie visant à l'édification d'une Algérie qui aspire à se reconstruire sur des bases plus saines. Ces démarches ont été entreprises sur un fond de critiques et de tensions qui n'ont fait que s'exacerber à l'approche de l'échéance électorale du 12 décembre dernier. Le nouveau chef d'état-major par intérim prend ses fonctions alors que vient d'être tout récemment installé le nouveau président de la République. Homme discret, il prend également ses fonctions dans un contexte régional très perturbé, marqué notamment par l'exacerbation de la guerre civile en Libye ainsi que par la recrudescence des actions terroristes au Mali et dans toute la région du Sahel. A. C.