L'accalmie sur le front social risque de ne plus durer. La trêve imposée par la situation sanitaire est rompue par la Confédération des syndicats algériens (CSA). Les syndicats autonomes dressent un constat sans appel, dénonçant l'érosion du pouvoir d'achat et le recul en matière de libertés syndicales. Les treize syndicats représentant les secteurs de la santé, de l'éducation, de l'enseignement supérieur, mais également plusieurs autres secteurs d'activités n'excluent pas le recours à des actions de protestation pour faire entendre leurs revendications. Nawal Imès - Alger (Le Soir) – Les syndicats autonomes signent leur retour sur le terrain de l'action. Ils étaient treize à se réunir sous la bannière de la Confédération des syndicats autonomes (CSA). Représentant les secteurs de l'éducation, de la santé, de l'enseignement supérieur, de la formation professionnelle mais également les imams et les vétérinaires, ils ont à l'unanimité estimé qu'il était temps de réinvestir le terrain et de planifier des actions de protestation si les pouvoirs publics restaient sourds à leurs revendications. «Nous avions sciemment laissé de côté nos activités syndicales depuis deux ans déjà. Il y a déjà eu l'année du Hirak puis celle de la pandémie, mais aujourd'hui, à travers cette réunion, nous marquons notre retour sur le terrain de l'activité syndicale, y compris par des actions de protestation, s'il le faut», explique le président du SNPSP. Même son de cloche auprès du président du Satef qui assure qu'«on ne peut pas rester comme cela les bras croisés sous prétexte de la pandémie. On a décidé de reprendre le travail syndical en réitérant les mêmes revendications puisque rien n'a été fait». Les syndicats membres de la CSA vont, en effet, se concerter avec leurs bases respectives avant de poser, dans un premier temps, les problèmes par écrit, en saisissant le Premier ministre, comme cela avait été fait en octobre et novembre derniers. Qu'est-ce qui est à l'origine de ces décisions ? Le Dr Lyès Merabet explique que la réunion de la CSA a été consacrée à l'évaluation de la situation sociale et économique et ses répercussions sur le pouvoir d'achat, mais également la question de l'agrément de la CSA qui est toujours au niveau du ministère du Travail, ainsi que les libertés syndicales. A ce sujet, notre interlocuteur assure que «par rapport aux libertés syndicales, la reconnaissance de la CSA, le droit aux réunions gouvernement-syndicats, notamment la tripartite, rien n'a changé. Au contraire, nous sommes dans une situation de statu quo absolu, même si, au plan politique, on parle beaucoup de changement». Le président du SNPSP évoque également la loi 90-14 qui stipule que la représentativité est assujettie à un taux de 20% d'adhésion, alors que dans beaucoup de pays, il n'est pas exigé plus de 5%. «Une entrave de plus à l'action syndicale», ajoute-t-il. Egalement au menu de la réunion de la CSA, la question du pouvoir d'achat. Boualem Amoura, le président du Satef, estime que ce dernier s'est «dangereusement érodé cette année avec une dégradation vertigineuse du mode de vie des Algériens». Pour Lyès Merabet, «il n'est pas question de faire dans le folklore et de proposer un salaire minimum qui risque rapidement d'évoluer vers un autre montant parce que, pour nous, il s'agit de mettre en place des mécanismes de protection du pouvoir d'achat et non pas uniquement d'avancer des chiffres au hasard. Il faut agir au niveau des indices des prix. Il faut pouvoir contrôler et encadrer l'inflation à des niveaux gérables et supportables, mais aussi agir au niveau de la régulation des marchés, de la lutte contre toutes les formes de fraudes et de l'économie informelle en général». Autre dossier évoqué, celui du chômage, notamment celui des jeunes diplômés qui pourrait être réglé en partie par le rétablissement de la retraite anticipée qui donnerait l'opportunité aux jeunes de postuler. La CSA a d'ailleurs réitéré son attachement au «droit acquis» des travailleurs à la retraite anticipée, et évoqué la situation des caisses d'assurances au sujet de laquelle le Dr Merabet affirme : «Nous avons évoqué également la situation des caisses, notamment la représentativité au niveau de leurs instances, à savoir les différentes commissions et les conseils d'administration qui siègent au nom des travailleurs et de leurs cotisations dans les différentes caisses. Nous demandons plus de transparence dans leur gestion, et pourquoi pas, l'affichage de leurs bilans sur lesquels les travailleurs ont un droit de regard.» Autant de revendications qui atterriront sur le bureau du Premier ministre. De la réaction de ce dernier dépendra celle des syndicats autonomes. N. I.