YouTube suspend indéfiniment le compte de Donald Trump. Depuis le 13 janvier, l'ex-Président américain ne peut plus poster sur sa chaîne. Sur Twitter aussi. Pour la seconde fois consécutive, la plateforme de partage de vidéos a suspendu son compte, pour une durée indéterminée. Sur Twitter aussi, le désormais ex-Président des Etats-Unis (le 45e) ne peut pas, non plus, disposer de toute la liberté de s'exprimer sur tout et rien. On connaît son style de communication le plus souvent irrespectueux des convenances, diplomatiques a fortiori. C'est à croire qu'il se plaît à tout renverser sur son passage. Passage en force qui rencontre des résistances fortes (Chine, Iran), ou plutôt molles (pays du Golfe). Les régimes arabes tétanisés Mais c'est certainement de par sa politique dans cette région qu'il s'est vu pousser des ailes allant jusqu'à imposer ses quatre volontés aux dirigeants des pays de la région, apeurés par tant d'audace. En « businessman » heureux, il engrangera de juteux contrats de vente d'armes, en centaines de milliards de dollars, principalement à l'Arabie Saoudite et aux Emirats arabes qu'il s'est évertué à enfoncer dans une guerre désastreuse contre le Yémen. Président de la première puissance économique et militaire au monde, il n'a de cesse de profiter de cette situation privilégiée et mettre sur pied un tandem avec le Premier ministre de l'Etat d'Israël, Benyamin Netanyahou. L'on connaît le résultat : déplacement de l'ambassade des Etats-Unis à El Qods occupée, reconnaissance d'Israël, avec échange d'ambassadeurs. Le honteux troc du siècle conclu avec le royaume du Maroc - reconnaissance d'Israël contre «marocanité» du Sahara Occidental - dans cette démarche. Il ne lèvera pas le petit doigt dans l'affaire de l'assassinat, le 2 octobre 2018, à Istanbul (Turquie) par un commando saoudien, du journaliste saoudien, Jamal Khashoggi, alors que tous les regards se tournent vers le royaume wahhabite. Il aura beau jeu dans la crise avec l'Iran, s'amusant à souffler plutôt le chaud que le froid, en fonction de la conjoncture du moment. Il s'amusera à brandir la menace de l'expansionnisme perse, non sans réussite. Suffisant en tout cas pour les régimes arabes pour se serrer sous son parapluie. Et pour enfoncer le clou, il décide d'un nouveau tour de vis à l'embargo contre l'ennemi iranien, causant des dommages humains désastreux – autant de crimes contre l'humanité. La guerre des nerfs constituera un moyen pour maintenir un état de guerre factice dans la région. L'Asie résiste L'Asie lui réussira moins. La résistance à l'hégémonie «trumpienne» mettra le Président sortant en rage, en particulier avec la Chine et la Corée du Nord. Il compensera son échec à travers le recours à une diatribe où se mêlent des accusations de toute sorte. L'exemple de cette confrontation avec la Chine est la pandémie de Covid-19, Trump, faisant fi de toute prudence, accusera nommément la Chine d'avoir fabriqué et diffusé le virus mortel dans le but d'avoir sa domination commerciale dans le monde. En dépit de ses pressions, visant à entraîner l'Europe dans ses désidératas, il ne sera pas suivi. Et d'ailleurs, l'opinion américaine est outrée par tant d'inconséquences d'un Président qui ne veut écouter nulle voix discordante, au moment où la crise sanitaire emporte des milliers de vies. Il payera cher son attitude à la faveur de l'élection présidentielle qui portera au pouvoir le démocrate Joe Biden. Malgré le désaveu de ses compatriotes, il franchira le Rubicon en contestant le verdict des urnes, chauffera à blanc ses partisans qui n'hésitent pas à verser dans la violence avec la prise du Capitole. Durant son mandat, la ségrégation raciale relève la tête (Black Lives Matter), mépris outrancier contre la communauté latine à travers la construction d'un mur de plusieurs centaines de kilomètres. Et pour avoir foulé aux pieds les valeurs-phares de la société américaine et mis sous pression le fonctionnement démocratique du pays, il n'est pas étonnant qu'il tombe en disgrâce... et se retrouve devant les tribunaux pour ses méfaits notoires. Vu sous cet angle, son successeur aura du pain sur la planche pour réparer les dégâts. Joe Biden promet donc le meilleur et veut sortir l'Amérique de la démarche de délinquant de son prédécesseur. Et déjà son staff a annoncé la levée immédiate des accords sur l'immigration signés sous la présidence de Donald Trump avec le Salvador, le Honduras et le Guatemala. Selon ces accords signés en 2019, les demandeurs d'asile se voyaient contraints de retourner dans ces pays dans l'attente de leur audition par un tribunal américain. A son actif, Biden ne cèdera pas aux multiples provocations dans l'intervalle de la passation de pouvoir, et se contentera d'insister sur le ridicule dans lequel s'englue Donald Trump – qui ne voulait pas quitter the White House ! Alors, un procès en destitution (impeachment) est intenté contre lui. Il est lié à l'attaque du Capitole, à Washington, le 6 janvier. Mieux, observe-t-on, Trump détient un record : celui d'avoir fait l'objet de deux procès en destitution. Il concentre la moitié du nombre de procès en destitution de présidents de l'Histoire des Etats-Unis. Joe Biden à la Maison-Blanche, l'on attend les premiers signes de changement de la politique américaine post-Trump. Il y a ainsi l'arrêt de la construction du mur le long de la frontière avec le Mexique, la régularisation de milliers d'immigrés entrés clandestinement aux Etat-Unis. Au plan interne, retour à la politique de protection sociale, chère à Barack Obama, et l'aide financière aux plus démunis. C'est aussi sur la politique étrangère qu'il est attendu afin de réparer les nombreux dégâts causés par le sulfureux Trump qui s'est illustré, à sa manière, au Moyen-Orient. Joe Biden voudra se démarquer un tant soit peu de l'alignement systématique sur Israël, la reprise des négociations israélo-palestiniennes avec comme toile de fond la solution de deux Etats, afin de mettre fin à un conflit vieux de plus d'un siècle. Le retour aux accords de Paris sur le nucléaire est positivement vu par Téhéran qui attend des gestes concrets du 46e Président américain. Y compris en Asie, l'on s'attend à une désescalade. Il n'est pas surprenant que le nouveau Président mette en garde contre le comportement «imprévisible» de son prédécesseur. Joe Biden avait déclaré que Donald Trump ne devrait plus recevoir les informations confidentielles des agences américaines de renseignement, comme c'est habituellement le cas pour les anciens Présidents. B. T.