La formation des médecins en Algérie doit évoluer. Elle doit aller vers des références à des standards internationaux. Tout en répondant aux besoins de la société qui ne cessent d'évoluer. En tous les cas, revoir le programme académique des futurs praticiens est en voie de devenir une obligation. Leila Z. - Alger (Le Soir)- «Nous devons revoir les méthodes d'enseignement et de préparation des futurs médecins qui n'ont pas évolué depuis des années. Les textes juridiques également, la Faculté de médecine doit s'intéresser davantage aux besoins de citoyens qui ne cessent pas de changer». C'est sur quoi se sont mis d'accord, avant-hier jeudi, praticiens et responsables du secteur de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique ainsi que le ministère de la Santé et de la Réforme hospitalière, à l'occasion d'une journée d'étude et de formation sur la refonte des études en médecine, conjointement organisée par les deux secteurs à Ben Aknoun. A la Faculté de médecine d'Alger, le débat tournait autour de la réforme du programme enseigné aux futurs médecins. Ce dernier doit changer. C'est-à-dire qu'il faut opter pour des modèles d'enseignement plus modernes et universels. Et mettre de côté les méthodes classiques datant des décennies précédentes. «Les méthodes classiques passives doivent disparaître de nos amphithéâtres. Introduire des méthodes interactives devient plus qu'une nécessité aujourd'hui», a déclaré à notre quotidien, le doyen de la Faculté de médecine d'Alger en marge de la journée d'étude (lire l'entretien Ndlr ) sur la refonte des études en médecine. Dans ce même contexte, la Faculté de médecine, dit Pr Meguenni, a commencé à s'interroger sur «ce qu'elle doit faire pour la communauté, en termes de santé, de bien-être, de recherche et de prestations. Le personnel de la faculté de médecine est de plus en plus conscient des enjeux sociaux. Le concept de la responsabilité sociale est au cœur de notre politique», a-t-il laissé entendre. Dans sa déclaration au Soir d'Algérie, ce même responsable a souligné le rôle de la société, consommatrice du produit de la Faculté de médecine, dans l'évolution des méthodes de soin. «Il est important que la société s'implique dans le processus médical et de soin. Car elle est concernée directement», a-t-il ajouté. Affirmant que «la Faculté de médecine est un acteur incontournable dans le changement du secteur sanitaire. Une chose que nous souhaitons tous». Lors de cette journée d'étude et de formation, s'inscrivant dans le cadre d'«évaluation sur la formation en médecine, de la recherche scientifique ainsi que la pratique médicale», les secrétaires généraux des secteurs de l'enseignement supérieure et de la recherche scientifique, ainsi que le secteur de la santé et de la réforme hospitalière, ont évoqué l'importance de réforme du secteur sanitaire, et ce, en visant la formation universitaire. Dans ce sens, le secrétaire général du ministère de l'Enseignement supérieur, M. Noureddine Ghouali qui lisait le discours du ministre, a assuré que son secteur a déjà entamé des réformes au niveau des programmes enseignés aux universités. «Nous sommes intervenus sur les trois premières années de la formation médicale. Nous sommes dans l'attente des résultats», a-t-il dit. Pour lui, la refonte des études en médecine participera à la promotion du secteur sanitaire en Algérie. Les professeurs intervenants ont souligné, à cette occasion, le chemin qu'a fait notre pays dans la promotion du secteur de la santé et de la réforme hospitalière depuis des décennies, (démocratisation d'accès aux soins, réduction de taux des maladies infectieuses, etc.). L. Z. Lakhdar Griene : doyen de la faculté de Médecine : «Le médecin d'aujourd'hui ne peut pas être que soignant» Vous organisez une journée d'étude sur la nécessaire refonte des études en médecine. Pour la plupart des intervenants, la formation en médecine doit changer et suivre les normes internationales. Partagez-vous ce constat ? Pr Lakhdar Griene : Oui, bien sûr. Nous devons changer nos méthodes d'enseignement et de préparation des médecins de demain. La discipline est en train d'évoluer, la société aussi. Du coup, nous nous trouvons dans l'obligation de répondre aux besoins de nos concitoyens. Pourquoi devons- nous changer nos méthodes d'apprentissage ? Pour plusieurs raisons. Les besoins de soins de la population d'aujourd'hui ne sont plus ceux d'il y a trente ou quarante ans. Donc, il faut adapter la formation du médecin, en particulier le médecin généraliste, aux besoins actuels et aux besoins de demain, car il est important de prévoir. Rien que pour cette raison-là, nous nous trouvons dans l'obligation de revoir la formation médicale. Secundo, nous devons la revoir par rapport aux méthodes d'enseignement dans nos facultés. Celles-ci doivent évoluer, se moderniser. Notre objectif est de faire de la formation, un processus interactif entre l'enseignant et l'étudiant. Il est nécessaire aujourd'hui de mettre de côté les méthodes classiques où l'enseignant vient délivrer son cours à l'étudiant qui le reçoit d'une manière passive et s'en va. Cela doit cesser. Qu'est-ce qu'il faut faire concrètement ? Comment vous envisagez de préparer les futurs médecins ? Il est nécessaire de mettre en place des méthodes pédagogiques dites interactives. Où on accordera une grande place à la discussion et au dialogue entre enseignant et étudiant. Et cela peut se faire par le biais de modalités de formation qui mettent en jeu l'apprentissage par résolution du problème par exemple. L'étudiant en médecine doit apprendre le raisonnement clinique. C'est-à-dire : il est devant un malade, il doit envisager le diagnostic à travers ses connaissances qu'il va mobiliser d'une manière logique et rationnelle. Donc, il faut qu'on inculque aux futurs médecins ce type de comportement. Autre chose, l'étudiant est invité à discuter du programme. Il porte un regard critique. Pourriez-vous nous parler du comportement des médecins récemment diplômés avec les malades... Les médecins récemment diplômés peuvent avoir des difficultés à être opérationnels immédiatement. Il faut savoir qu'il y a un certain nombre de compétences qui ne sont pas acquises, non parce que l'étudiant ne pouvait pas les acquérir, mais lors de la formation académique, nous n'avons pas enseigné cela. Je m'explique : le médecin d'aujourd'hui ne peut pas être que soignant. Le médecin d'aujourd'hui doit communiquer, parler avec le malade, sa famille, son environnement, il faut qu'il communique avec les autorités aussi. Il faut qu'il participe aux programmes nationaux de santé, de vaccination, de lutte contre le tabagisme. C'est pour toutes ces raisons que revoir la formation médicale est indispensable.