Par Hassane Zerrouky [email protected] Ne tournons pas autour du pot. Ce crime abominable, revendiqué et assumé par ses auteurs sur les réseaux sociaux avant même qu'ils ne soient arrêtés et incarcérés, aurait pu se produire dans n'importe quelle région du pays. Le fait que ce lynchage ait eu lieu en Kabylie aurait pu prendre une dangereuse tournure et plonger le pays dans le chaos souhaité par ces apprentis sorciers de tous bords qui voyaient là une occasion propice, qui pour régler son compte à une région fière de son identité et qui les empêche de dormir, qui pour revendiquer une indépendance illusoire en comptant sur le soutien des faucons du Makhzen !(1) Et c'est là que l'appel empreint de dignité de Noureddine Bensmaïl, le père de la victime soutenu par la population de Miliana, l'un des fiefs de la Wilaya IV historique, est venu éteindre un début d'incendie entre frères et enfants d'une même patrie. Son appel a surtout faussé les calculs ourdis par ceux qui n'ont pas encore compris que l'Algérie a changé : elle est plus éduquée et elle n'a plus rien à voir avec l'Algérie des années 60. Tant et si bien que ce lynchage en règle n'a pas eu les effets escomptés, celui de briser l'élan de solidarité d'une extrême profondeur, exprimée par une majorité d'Algériens comme aux plus beaux jours du Hirak et qui a pris de court, comme un certain 22 février 2019, les politiques de tous bords et en particulier ceux qui n'ont eu de cesse d'agiter en vain les fractures régionales et linguistiques. Ceci dit, les responsabilités de chacun dans le tragique destin de Djamel Bensmaïl doivent être clairement établies. Quant au MAK, dont je ne partage pas du tout l'orientation politique et qui bénéficie du soutien du Makhzen, il ne faudrait pas lui donner un poids qu'il ne possède ni en Algérie ni au sein de la diaspora algérienne en France. Sauf à vouloir le conforter dans un statut de protagoniste et lui faire de la publicité à l'international, je reste persuadé que le MAK est un mouvement minoritaire. Quant à ses liens avérés avec Israël, un Etat colonial pratiquant une politique d'apartheid envers les Palestiniens, un Etat qui n'hésite pas à emprisonner des enfants palestiniens – 250 arrestations d'enfants de moins de 16 ans entre janvier et mai 2021 – ils sont naturellement une source d'inquiétude, surtout après les propos menaçants tenus, le 12 août dernier, par le chef de la diplomatie israélienne au Maroc, à l'endroit de l'Algérie.(1) D'autant que ces menaces surviennent quelque temps après l'affaire de Pegasus, ce logiciel espion fourni par Israël à son obligé marocain pour mettre sur écoute non seulement l'Algérie mais aussi même son allié et parrain français qui, pour l'heure, observe un silence bien étrange. Ç'aurait été la Russie, Paris aurait réagi et dégainé comme Lucky Luke, ce personnage de bande dessinée qui « tire plus vite que son ombre » ! Par ailleurs, le réchauffement climatique est une réalité que les autorités, et même l'opposition, ont eu tendance à négliger. D'autant que ces méga-incendies de forêt n'ont pas touché que l'Algérie, ils ont embrasé tout le Bassin méditerranéen, dévasté le continent nord-américain, la Sibérie, l'Australie... où des températures frôlant les 50 degrés ont été enregistrées. Concernant l'Algérie, ces méga-incendies ont révélé l'impréparation d'un Etat trop sûr de lui, et qui en est resté à une approche ancienne, datant sans doute des années 60-70, en matière de lutte contre les feux de forêt et les risques naturels... Ils ont démontré l'urgence de se doter d'une vraie stratégie de prévention à court et moyen terme contre les risques majeurs – incendies, crues — intégrant la question du réchauffement climatique. À ce sujet, la question du climat et ses enjeux devrait figurer comme matière à enseigner dès l'école primaire comme cela se fait dans de nombreux pays. H. Z. (1) Sur la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc, c'était dans l'air, surtout après le soutien affiché le 16 juillet dernier par la diplomatie marocaine au MAK et le récent discours de M6. À suivre.