De Tunis, Mohamed Kettou Depuis 2011, Kaïs Saïed est le seul Président à avoir affronté, de face, le gourou islamiste Rached Ghannouchi qui s'accroche encore à ses rêves et assimile les mesures présidentielles à un «putsch». Tunis, Kairouan, Sfax, Kasserine et d'autres villes tunisiennes ont renouvelé, ce dimanche, leur soutien au Président Kaïs Saïed. Comme s'ils étaient en compétition avec les détracteurs du chef de l'Etat, les nahdhaouis en particulier, des milliers de manifestants ont scandé des slogans contre le parti islamiste et ses dirigeants et appelé le président de la République à dissoudre l'Assemblée des représentants du peuple (ARP-Parlement). Dans sa bataille engagée avec les islamistes, Kaïs Saïed bénéficie de l'appui de pas moins de six partis politiques et, surtout, de la voix populaire. À la lumière de ces manifestations qui sonnent comme un plébiscite, du reste fort attendu, le chef de l'Etat détient, désormais, un blanc-seing pour poursuivre l'exécution de son plan engagé depuis plus de deux mois pour enterrer le régime «démocratique» en vigueur depuis une dizaine d'années. Son principal objectif est de venir à bout de la corruption qui a gangrené le pays et d'agir sur l'amélioration des conditions de vie des citoyens, toutes couches confondues. Un gouvernement de «couleur jeune et féminine» Simultanément, la toute fraîche cheffe du gouvernement Nejla Bouden Romdhane a annoncé que son cabinet aurait une couleur «jeune et féminine». Elle préférerait un gouvernement restreint où serait respectée la parité hommes-femmes parmi les 16 personnalités ministrables. Avant son installation au Palais de la Casbah (siège de la primature), Nejla Bouden — en tant que choix du président de la République — bénéficie, déjà, du soutien populaire. L'imposante manifestation organisée, ce dimanche, l'illustre bien. En effet, Kaïs Saïed, qui s'est toujours attiré la sympathie des masses, a, depuis le 25 juillet, gagné en grade. Aujourd'hui, il est devenu «l'idole» du peuple avec des intentions de vote dépassant les 70%. Idole pour un peuple qui se sent déchargé du poids étouffant du parti islamiste. Car, depuis 2011, Kaïs Saïed est le seul Président à avoir affronté, de face, le gourou islamiste Rached Ghannouchi qui s'accroche encore à ses rêves en assimilant les mesures présidentielles à un «putsch». Cette accusation ne diminue en rien la détermination du chef de l'Etat à rompre avec le passé et à rejeter le dialogue avec ceux qu'il considère comme corrompus. Cependant, il ne compterait pas résister encore longtemps et il pencherait, prochainement, vers un assouplissement de sa position. C'est l'hypothèse, en filigrane, à travers le compte-rendu publié par l'Elysée du contenu de l'entretien téléphonique de vendredi entre le Président Macron et Kaïs Saïed. Selon l'Elysée, ce dernier aurait affirmé que le dialogue serait repris après la formation du gouvernement alors que le communiqué de la présidence tunisienne n'en soufflait mot. Ce serait un double langage destiné à satisfaire à l'interne et l'étranger. D'ailleurs, les manifestations favorables au Président sont considérées comme un message à l'adresse de l'Europe, la France en particulier, et aux Etats-Unis qui exercent des pressions sur Kaïs Saïed pour accélérer un retour à la situation qui prévalait avant le 25 juillet. M. K.