Née et résidant à Boujdour, une ville de quarante-deux mille habitants érigée face à l'Atlantique, au Sahara Occidental, son pays, Sultana Haya, assignée à résidence depuis novembre 2020, subit les sévices des forces de sécurité marocaines. Elle n'a jamais caché ses convictions et milite pour l'indépendance de son peuple. Pour cela, elle est battue, violée devant sa vieille mère âgée de 84 ans. Sa sœur connaît le même sort. Depuis plusieurs mois, elle et sa famille sont soumises à un blocus total, aucune visite ne leur est permise, les délégations étrangères qui viennent s'enquérir de leur état sont refoulées manu militari. Mais cela ne décourage pas la jeunesse sahraouie de l'intérieur qui se mobilise pour lui manifester sa solidarité malgré les risques de voir s'abattre sur elle les foudres de la police qui recourt aux moyens les plus violents, en témoignent le nombre de blessés graves et les emprisonnements. Les services de répression du Makhzen peuvent s'enorgueillir d'une longue tradition de traque, d'emprisonnement et leur savoir-faire dans la manière d'infliger les pires sévices aux détenus politiques. La prison de Ouarzazate, dans le sud du royaume, est de sinistre réputation. Aujourd'hui encore, on y meurt en plus du Covid-19. Toutefois, malgré son intensité, la répression ne fait que radicaliser le mouvement anti-marocain dans les territoires sahraouis. En dépit de la campagne de désinformation et du black-out imposé aux médias susceptibles de faire éclater la vérité au grand jour, l'écho de la résistance parvient à l'opinion publique internationale. Répression-désinformation sont devenues, ces dernières années, le credo des services de sa majesté. Rien ne doit filtrer de ce massacre à huis clos. Pour preuve, comment imaginer qu'aucun soldat derrière les retranchements du mur de sable ne soit touché ou simplement égratigné suite à plus de deux mille opérations de bombardements intensifs ? Cette omerta sur les pertes matérielles et surtout humaines est érigée en politique par le Makhzen, tatillon pour tout ce qui touche à un dossier que feu Hassan II déclarait clos. Il en est de même pour toutes les actions que mène, à l'intérieur des territoires sahraouis, l'armée d'occupation. Occulter une réalité de rejet populaire du hold-up du Sahara Occidental ne travaille pas pour autant en faveur du Makhzen. Sultana Khaya, nominée pour le prix Sakharov, sait à quoi elle s'expose face à la férocité de la police de sa majesté. Elle ne recule pas pour autant et sait que son sacrifice n'est pas vain. Nombreux, y compris parmi les opposants marocains, qui ont subi les affres de la torture pour simplement avoir réclamé le respect de leur dignité. Plusieurs dizaines de jeunes militants sahraouis croupissent dans les geôles du royaume où ils subissent les pires maltraitances. Tête de proue de la lutte pour l'indépendance du Sahara Occidental, Aminatou Haider est une autre icône de ce combat pour la liberté. La justesse de son engagement lui vaut d'être, en 2008, citée pour le prix Nobel de la paix. Le cordon de policiers entourant, en permanence, le domicile de Sultana Khaya, les violentes et fréquentes descentes, à toute heure de la nuit, des forces de sécurité marocaines ont provoqué l'effet inverse, c'est-à-dire une plus grande détermination de la militante sahraouie qui rappelle ses sœurs algériennes durant la guerre de Libération nationale, en l'occurrence Hassiba Ben Bouali, Djamila Bouhired et bien d'autres. Pour elles, c'est la liberté au bout de la lutte qui ne fait pas de doute. Brahim Taouchichet