De Tunis, Mohamed Kettou La date du 17 décembre est attendue avec impatience par le peuple tunisien qui s'attend à des mesures fortes que son Président annoncerait dans un discours très attendu. Pourquoi le 17 décembre ? Tout d'abord, parce qu'il s'agit de la date choisie par le chef de l'Etat pour commémorer le déclenchement de la «révolution» à la place du 14 janvier, date du départ de Ben Ali. Ensuite, parce que Kaïs Saïed cherche à la célébrer par des décisions «fracassantes». C'est, du moins, ce que relatent tous les médias et le tout politique tunisien. Des indiscrétions prêtent au Président son intention de dissoudre le Parlement, certains partis politiques, le Conseil supérieur de la magistrature et les Conseils municipaux. Si c'est le cas, ce sera, sans doute, un séisme politique qui, selon les détracteurs du chef de l'Etat, mettrait le pays en péril. Cela conduirait, automatiquement, à des élections législatives et municipales anticipées. Selon certaines sources, Kaïs Saïed n'hésiterait pas, dans la foulée, à annoncer l'arrestation de politiciens impliqués dans des affaires de corruption, de financement étranger et proches des organisations terroristes. Une fois de plus, le chef de l'Etat aura fait preuve d'un grand courage, même si de telles décisions ne sont pas faciles à prendre, sachant que l'avenir est incertain quand on mesure l'ampleur de la tâche qui l'attend pour remettre le pays sur les rails. L'incendie du siège d'Ennahdha, Ghannouchi accuse Cela fait plus de quatre mois que le Président Kaïs Saïed, qui s'est proclamé «détenteur» des pouvoirs exécutif et législatif, s'est mis à amasser les ingrédients nécessaires à une telle sortie. Parmi ces ingrédients, figurerait la dernière bourde du chef du parti islamiste Rached Ghannouchi qui, après l'incendie qui s'est déclaré dans le siège de son parti, jeudi dernier et qui a fait un mort, a accusé l'Etat et le gouvernement de négligence, oubliant que, depuis 2012, il détenait la quasi-totalité des pouvoirs. Pour Kaïs Saïed, la Constitution de 2014 est obsolète, donc, caduque. Par quoi sera-t-elle remplacée. Il propose l'élaboration d'un nouveau texte à soumettre à l'approbation du peuple, par système digital, pour gagner en légitimité. Pour ce faire, une équipe de juristes, experts en droit constitutionnel, doit être mise sur pied par le président de la République en personne. Samedi dernier, le parti islamiste avait affirmé qu'il s'opposerait à toutes décisions qui «mettrait en péril les institutions» tout en soutenant le Conseil supérieur de la magistrature appelé par Kaïs Saïed à hâter l'instruction des affaires relatives au financement de la campagne électorale des législatives de 2019. Ce à quoi le parti islamiste et ses satellites s'opposent ouvertement. L'opposition dans l'expectative L'opposition au projet de Kaïs Saïed vient aussi du Parti destourien libre (PDL) de Abir Moussi. Celle-ci rejette ce projet qui, selon ses dires, vise à expulser son parti qui tient à participer à l'édification de l'Etat et au développement du pays. L'opposition vient aussi du côté de la centrale syndicale, UGTT qui, selon les dires de son patron, ne tolérerait pas un «régime personnel». N'empêche que, lors de la réunion du Conseil national de sécurité, le Président a effectué un revirement aussi étonnant qu'imprévu. Sur un ton inhabituel, celui qui menaçait de traduire en justice tous ceux qui ont fait mal au pays durant la dernière décennie, prône, désormais, la coexistence dans le respect des libertés tout en montrant de la compassion envers les victimes de l'incendie qui avait ravagé le siège du parti islamiste Ennahdha. Ce revirement n'a pas manqué de surprendre les observateurs qui ne lui trouvent aucune explication sinon le dernier communiqué des ambassadeurs du G7 qui exercent, encore, des pressions pour que Kaïs Saïed n'annule pas la Constitution de 2014. Est-ce un revirement ? Wait and see. M. K.